Représentation des femmes au parlement: «Comme si on n’élisait que des hommes compétents!»

La chronique féministe • Comme pour Nadine Morano, dès que l’on tend un micro à Christian Lüscher (PLR), on est sûr-e qu’il va dire une sottise. Lors de l’émission «Forum» de lundi 5 octobre sur la RTS, à propos de la représentation des femmes, il parle de leurs «compétences», seul critère valable selon lui, et conclut par l’inutilité des quotas «puisque l’on y arrive sans ça». Le coup des compétences, on nous le fait à chaque élection. Bon sang, comme si, du côté des hommes, on n’élisait que des hommes compétents!

Comme pour Nadine Morano, dès que l’on tend un micro à Christian Lüscher (PLR), on est sûr-e qu’il va dire une sottise. Lors de l’émission «Forum» de lundi 5 octobre sur la RTS, à propos de la représentation des femmes, il parle de leurs «compétences», seul critère valable selon lui, et conclut par l’inutilité des quotas «puisque l’on y arrive sans ça». Le coup des compétences, on nous le fait à chaque élection. Bon sang, comme si, du côté des hommes, on n’élisait que des hommes compétents! Le problème, c’est que les listes de droite ne leur font pas assez de place. Celles de gauche, qui, en gros, alternent les hommes et les femmes, ont presque autant de représentantEs que de représentants au parlement au bout du compte. Il y a donc une relation de cause à effet, contrairement à ce que prétend M. Lüscher, avec cette façon d’affirmer n’importe quoi comme des vérités indéniables (c’est l’absence de doute qui révèle les sots).

Personnellement, je suis en faveur non seulement des quotas, mais de la parité. Parité sur les listes, parité dans les résultats (on alternerait les meilleur-e-s élu-e-s de chaque sexe, quitte à ce qu’une femme passe avant un homme ayant obtenu plus de voix), et nous aurions enfin une juste représentation.

Dire que les choses suivent leur cours «naturellement» (comme si la nature avait quelque chose à voir là-dedans!), c’est nier le fait que la représentation des femmes, au lieu d’augmenter progressivement, stagne ou recule. Leur nombre avait progressé de manière constante depuis les premières élections au Conseil national, où les femmes ont eu le droit de vote et d’éligibilité (1971), il a pour la première fois légèrement reculé (–1) en 2011 pour se situer à 58 (sur 200, soit 29%). Les femmes sont un peu plus faiblement représentées au Conseil des Etats, formé de 46 membres: elles occupent actuel­lement 9 sièges (19,6%), suite aux élections de 2011, soit un de moins qu’en 2007.

Les élections fédérales d’octobre 2015 affichent un nombre record de 3’802 candidat-e-s, dont 1’310 femmes, ce qui représente 34,5% du total. Cette proportion a augmenté de 2,6% par rapport aux élections de 2011 (32,1%), mais s’affiche en-dessous de celle de 2007, où l’on recensait 35,1% de candidates. Sur les 160 candidat-e-s en lice pour le Conseil des Etats, 34 sont des femmes, soit 21,25% des prétendant-e-s.

On constate de manière générale que les partis de gauche sont plus proches de la parité que les partis de droite. Les Verts sont le seul parti à présenter plus de femmes que d’hommes (51%). Ensemble à gauche présente 18 femmes sur 37 soit 50% de femmes. Le Parti socialiste suit de près avec 46,7% de candidates. En revanche, c’est à l’UDC que les femmes sont les moins nombreuses à briguer un siège au National (19% des 431 candidat-e-s du parti). Le constat est pratiquement le même pour la Chambre haute, où le PS est le parti où le plus de femmes sont en campagne (36,8%), devant les Verts (33,3%). A droite, l’UDC présente 18,1% de candidates et le PLR 13,63%.

Sur les 422 listes enregistrées pour les élections fédérales 2015 (un autre record), on en recense 17 exclusivement féminines. Ces listes ont été lancées par des partis de tous bords, principalement dans les cantons alémaniques, mais aussi en Valais (la liste indépendante «Graine de futur»). On dénombrait 7 listes féminines en 2011 et 14 en 2007.

A celles et ceux qui prétendent que les femmes ne se présentent pas, je réponds que les 1’310 candidates pourraient occuper 5,5 fois la totalité des 246 sièges des deux Chambres. Elles sont certes minoritaires, mais une loi sur la parité pourrait leur donner la place qui leur revient.

Sans surprise, on constate que ce sont les partis de gauche qui favorisent davantage les femmes, l’UDC étant le dernier de la classe.Mais même à moins de 30% (il faut au minimum 33% pour compter dans les débats et les décisions), la représentation des femmes dérange nombre de machos, ceux que j’appelle «les arriérés du bulbe». J’ai déjà eu l’occasion de parler du machisme insane de Me Bonnant, qui vient de se signaler à nouveau. Le 5 septembre dernier à Conthey (VS) s’est tenue la fête annuelle de l’UDC Valais romand, avec Marc Bonnant en tête d’affiche, invité par Oskar Freysinger. L’avocat s’est exprimé sur le thème «Du bonheur d’être de droite». La droite, seule idéologie respectable en politique selon lui. Premier élément: l’homme de droite est, avant tout, un homme, donc pas une femme. L’avocat fait ainsi écho aux propos de Freysinger tenus la veille à la radio. Le politicien avait dit regretter «la disparition de la testostérone» en politique, dont la gauche – cette «mère castratrice» – serait responsable. Tout au long de son discours, Marc Bonnant reprend à son compte ce rejet du féminin, expliquant à quel point les caractéristiques intrinsèques des femmes (leur douceur, leur convivialité, leur sens du compromis) sont «incompatibles» avec la politique, art de la guerre et de l’affrontement. Selon lui, les femmes devraient retourner à leurs «fonctions sacrales»: piano, enfants et fourneaux, au lieu d’être «magistrateuses» ou «médecinesses». Il finit par avouer «la haine absolue» qu’il porte aux féministes, «ces transsexuelles psychiques». Ce soir-là, par un mélange de références classiques, de mépris des faibles et d’humour douteux, Marc Bonnant a posé les bases de ce que doit être à ses yeux la droite de demain: violente, patriarcale et tournée vers un leader éclairé. En résumé, l’idéologie fasciste…

Sans être aussi extrémistes, beaucoup d’hommes (et, hélas, de femmes) biffent les femmes au sein même de leur parti. La faute à qui? Aux manuels scolaires, qui favorisent les garçons et les hommes aux dépens des filles et des femmes, aux médias, qui ne leur font pas la place qui leur est due et s’intéressent davantage à leur physique ou à leur habillement qu’à leurs idées.
Des séminaires sont organisés ici et là, destinés aux politiciennes de tous les partis, pour travailler sur leur questionnement «En serai-je capable?», alors que les hommes ne se posent jamais cette question. Sollicités pour un débat, les hommes disent oui avant de connaître le sujet, alors que les femmes hésitent ou désignent un homme «qui sera plus capable de répondre». Dramatique.
Olympe de Gouges, reviens, ils sont devenus fous!

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