La Grève a Genève, c’est pas fini!

Genève • Malgré 10'000 personnes dans la rue la semaine dernière, le parlement genevois a fait la sourde oreille en votant un renforcement du frein à l'endettement, contre lequel un référendum est d'ores et déjà annoncé. Du côté de la construction, la section genevoise de la SSE continue de refuser toute négociation.

Pointés du doigts, comme toujours, par certains observateurs, les fonctionnaires ont rappelé qu'ils se mobilisaient avant tout pour une société solidaire qui assure des services publics de qualité. Les maçons étaient eux aussi de la partie. ©Carlos Serra

Trois jours de grève et plus de 10’000 personnes dans les rues, fonction publique et travailleurs de la construction confondus. C’était du jamais vu dans les rues de Genève la semaine dernière. Et les fonctionnaires ont d’ores et déjà annoncé qu’ils pourraient reprendre la grève début décembre. Pour rappel, ces derniers protestaient contre plusieurs mesures d’économies prévues par le Conseil d’Etat dans son budget 2016, qui touchent la fonction publique: le gel des annuités, le non-remplacement des départs naturels, l’augmentation de la durée de travail de 40 à 42 heures hebdomadaires et une simplification des procédures de licenciement, mesures dont les grévistes demandent tout simplement le retrait, estimant par ailleurs qu’il s’agirait d’une forme d’anticipation des dégâts qui seront provoqués par la future réforme fédérale de l’imposition des entreprises (RIE III), qui n’a même pas encore été votée.

Pointer du doigt les fonctionnaires ou réfléchir à la cohésion sociale?

A ceux qui, par ignorance ou sans autre but que la provocation, ne se sont pas privés des commentaires habituels sur «ces fonctionnaires privilégiés qui se plaignent», les premiers concernés rétorquaient qu’au-delà de leur situation personnelle, ils se dressaient contre le démantèlement de l’Etat qui, année après année, budget après budget, s’accentue. En effet, qui dit moins de budget dit également réduction des services publics. Or, on sait que, pour ne prendre qu’un exemple, les assistants sociaux de l’Hospice général peinent déjà à assurer un travail de qualité, tout en étant contraints d’attribuer des prestations financières de plus en plus réduites. Avec des conséquences directes sur la cohésion sociale: plongées dans la précarité, manque d’accompagnement des assurés, incompréhensions, sentiment d’injustice, développement d’une haine des institutions, etc… Si les fonctionnaires manifestent, ce n’est donc pas seulement pour garder jalousement leur salaire, argumentent-ils, mais aussi parce qu’ils sont les premiers à voir les effets de ce démantèlement. Plutôt que de remettre en question la situation des fonctionnaires, pourquoi ne pas revendiquer de meilleurs salaires pour toutes et tous? Pourrait-on ajouter, à titre de réflexion.

Sourd aux demandes de la rue – ainsi qu’à la position du Conseil d’Etat – , le Grand Conseil genevois a toutefois voté vendredi dernier un renforcement du dispositif de frein à l’endettement, qui bloque les dépenses futures de l’Etat. Le lancement d’un référendum a d’ores et déjà été annoncé.

La SSE Genève fait la sourde oreille
Quant au secteur de la construction, il était lui aussi en grève le 11 novembre, pour revendiquer une amélioration de ses conditions de travail dans le cadre du renouvellement de la convention collective «Si certaines revendications, comme la retraite ou les salaires, commencent enfin à être discutées au niveau national, d’autres sujets essentiels à la protection des travailleurs doivent être négociés au niveau cantonal. C’est notamment le cas du fonds intempéries, en cours d’élaboration entre les partenaires sociaux du canton de Vaud, mais toujours pas négocié à Genève. Autres sujets on ne peut plus sensibles au bout du lac: l’explosion du nombre de travailleurs intérimaires sur les chantiers genevois, les nombreux licenciements à l’encontre des travailleurs âgés ou encore la lutte contre la sous-enchère salariale», déclaraient les syndicats UNIA, SIT et Syna dans un communiqué diffusé le 16 novembre. Dans une réunion tenue le même jour, la branche genevoise de la Société suisse des entrepreneurs (SSE) a toutefois refusé d’entrer en matière. «Par ce refus de négocier, les employeurs genevois jouent avec le feu et alimentent le risque de conflit social à Genève. Les syndicats ne peuvent qu’espérer que les employeurs entendent raison et reprennent le chemin du dialogue social. A défaut, ce sera aux travailleurs de décider de la réponse à donner à la SSE de Genève», poursuit le communiqué. Une assemblée des travailleurs est d’ores et déjà annoncée pour le 10 décembre prochain. Affaire à suivre, donc.