Alpen peak, la pointe de l’iceberg

il faut le dire • Des ouvriers polonais qui travaillent sur des chantiers six jours sur sept pour des salaires de 12 francs de l’heure, logés à cinq ou six dans des deux- pièces loués à plus de 3000 francs par mois où ils doivent couper du bois pour avoir de l’eau chaude?

ça se passe chez Alpen Peak à Sainte-Croix, près d’Yverdon, et les ouvriers sont en grève depuis fin août pour demander le paiement d’arriérés de salaires. Réaction des patrons pris la main dans le sac: «Circulez, y’a rien à voir! On n’a rien à se reprocher». Alors que l’affaire passe entre les mains de la commission paritaire du canton de Vaud, il n’y aura pas d’acte de contrition de la part d’entrepreneurs qui ne suivent pas les règles du jeu.

C’est sans doute le plus gros problème lorsque on s’attelle à traiter le sujet du dumping salarial, un fléau contre lequel la lutte n’est pas menée avec toute la conviction nécessaire, malgré les promesses faites jadis: les coupables ne risquent finalement pas beaucoup au regard des bénéfices réalisés. Quand le rapport bénéfice/risque s’inversera, on pourra enfin commencer à parler de mesures efficaces et de retombées réelles.

Cette démarche nécessite malheureusement une volonté politique s’inscrivant dans la durée et l’établissement d’une échelle des priorités. Aujour-d’hui, on ne peut compter que sur des employés courageux qui osent dénoncer les excès, pour que les syndicats puissent faire démarrer des actions qui ne font au final apparaître bien souvent que les pointes des icebergs.
En l’état, et dans une situation économique et sociale où pouvoirs publics, ouvriers détachés et patrons peu scrupuleux ont tous à y gagner, l’omerta
qui règne dans le domaine du dumping salarial favorise d’année en année la montée de la xénophobie, la régression des droits sociaux et le creusement du fossé entre les plus riches et les plus pauvres.