Globale «Jacquerie»

il faut le dire • Avant la Révolution française, avant Marx et la lutte des classes, les révoltes paysannes qui se produisaient spontanément et souvent de manière désordonnée un peu partout en Europe ont souvent porté des noms relatifs à la réalité de leur époque: Maillotins, Harelle, Tuchins, Jack Cade ou encore Frioul.

En France, la Jacquerie, ou «révolte des Jacques» en 1358 fût si mémorable que le terme passa dans le langage courant et prit ainsi un sens générique pour désigner la vindicte populaire. Le terme est peut-être aussi surtout resté dans les mémoires , parce que le «Jacques» du Moyen Âge, c’est avant tout l’individu lambda, le petit, le pécore qu’on écoute que lorsqu’il brandit une fourche.

Aujourd’hui, le citoyen lambda oublié par la finance globalisée et l’ultralibéralisme galopant exprime à nouveau sa colère. Une colère mesurée depuis quelques années par tous les référendums populaires sur lesquels les décideurs se sont assis, par une fascination retrouvée pour les hommes à poigne à la fibre sociale plus ou moins fantasmée et par la nostalgie de décennies passées dans lesquels on se love comme on plongerait dans l’opium. C’est surtout, comme à l’époque, une révolte désordonnée, sans lignes directrices, qui s’allume par ici ou par là, qui contamine ou ne contamine pas ses voisins ou qui peut prendre aléatoirement ailleurs sur la planète.

Des aventuriers peuvent surfer sur ces vagues avec facilité en s’exprimant au nom du peuple tout en gardant leur allégeance aux puissants. Ils sont souvent dépassés quand le raz de marée a réellement lieu. Il n’y a qu’à voir la débandade du UKIP britannique après le Brexit, ou l’embarras manifeste d’un Donald Trump qui ne se voyait sans doute pas si haut et qui voit presque avec soulagement les casseroles lui tomber dessus les unes après les autres.

On fêtera en 2017 le centenaire de la révolution d’Octobre, on pourra ainsi se souvenir à l’occasion qu’il y a cent ans, une partie des élites avait pareillement tenté de maîtriser la vague avant de se faire emporter par la fureur des éléments provoquée parmi les «Jacques», (enfin les «Ivans»).