Le passeport biométrique conduit à l’appauvrissement des services de proximité

A l'avenir, les habitants du Haut perdront presque une demi-journée pour renouveler leurs papiers.

A l’avenir, les habitants du Haut perdront presque une demi-journée pour renouveler leurs papiers.

Selon les règles de l’économie capitaliste, l’immédiateté des intérêts passe avant tous les autres paramètres, y compris dans les tâches d’intérêt public. Les concentrations, les fusions et la fameuse masse critique évoquée à chaque réduction d’un service public, naissent de cette conception.

Dans une interpellation sur la distribution des passeports biométriques dans le canton de Neuchâtel, Danièle Cramatte, conseillère législative du Parti Ouvrier et Populaire (POP) au Parlement de la Ville du Locle, a mis en évidence ce dysfonctionnement.

Elle a rappelé d’abord que l’arrivée du passeport biométrique résulte d’une des « fabuleuses » mesures sécuritaires prises par l’Union européenne après le 11 septembre par fraternité « schengenienne ». Elle n’a pas manqué de souligner que la Confédération a pu l’imposer à la suite de l’acceptation populaire par une petite majorité de 5’680 voix.

La Confédération ayant laissé la compétence de désigner les services chargés d’établir les documents d’identité aux cantons, Neuchâtel a centralisé cette prestation dans la capitale.

Or, depuis la création de ce service, 2’560 documents ont été établis pour les seuls mois de mars et avril de cette année et pourraient concerner environ 17’000 passeports par année. Le service cantonal a dû se doter de 3 stations biométriques coûtant 20’000 francs chacune. A cette somme s’ajoutent les serveurs informatiques. Le service occupe 5 personnes à temps complet.
Jusque-là, tout paraît simple. Mais Danièle Cramatte se préoccupe des demandeurs. Un Loclois devant se rendre à Neuchâtel en voiture devra compter 1h10 aller-retour. Celui ou celle qui, par choix ou obligation, opte pour les transports publics devra prévoir deux heures, sans compter les temps d’attente. Avec le temps passé auprès du service, c’est un demi-jour de congé qu’il devra obtenir. Les démarches sont encore plus compliquées pour un habitant des petites communes du district. Or, dit Danièle Cramatte, à l’heure où la mobilité est un sujet épineux, il est aberrant que le Canton n’ait pas pris en compte cette préoccupation en appauvrissant une nouvelle fois les services de proximité.
Danièle Cramatte a profité de son intervention pour rappeler que les cartes d’identité biométriques sont normalement prévues dans moins de 2 ans. Cependant, la commission des institutions politiques du Conseil des Etats a accepté deux initiatives parlementaires demandant que la loi sur les documents d’identité précise s’il est toujours possible d’établir les cartes d’identité habituelles non biométriques, via les communes de résidence. La popiste a souligné que lors de la campagne de votation, le Conseil fédéral avait proposé de maintenir l’accès à la carte d’identité classique.

Si cette dernière prestation, encore proposée au guichet communal, venait à disparaître, ce sont plus de 1’500 habitants de la ville du Locle qui devraient effectuer annuellement les déplacements. Rapporté à un prix du kilomètre en voiture de 65 centimes, c’est un montant de près de 60’000 francs qui seront dépensés pour ces déplacements. Au nom du groupe POP, l’interpellatrice a souhaité savoir si la commune a été consultée par le Canton avant la prise de décision. Elle attend avec intérêt la réponse de l’exécutif. Jean Studer, maître des Finances et des concentrations, a déjà fait savoir que la centralisation ne serait pas remise en cause.

C’est ainsi que l’on éloigne la population des affaires publiques tout en se plaignant aux élections de la baisse de participation au scrutin.