L’ultime intervention du député Bernard Borel

Bernard Borel quittera mardi le Grand Conseil où, actif et très écouté, il siège depuis 2003. Au grand regret de son groupe, il renonce à son mandat. Le pédiatre d'Aigle compte privilégier une plus grande activité au sein de Médecins du Monde. Pour son ultime intervention au parlement, le popiste s'est livré à une réflexion largement inspirée par sa fille et qui illustre en filigrane une certaine amertume.

Bernard Borel quittera mardi le Grand Conseil où, actif et très écouté, il siège depuis 2003. Au grand regret de son groupe, il renonce à son mandat. Le pédiatre d’Aigle compte privilégier une plus grande activité au sein de Médecins du Monde. Pour son ultime intervention au parlement, le popiste s’est livré à une réflexion largement inspirée par sa fille et qui illustre en filigrane une certaine amertume.

Bernard borel Chaque année a lieu la grande messe du budget. Avant même que le budget ne soit clos, je sais que je vais le refuser. Pas seulement parce qu’il est se révèle injuste et à côté de toutes les priorités essentielles, mais surtout parce qu’il ne me laisse pas la chance d’être créatif, ni à moi, ni à personne. Nous jouerons très bien les mécaniques budgétaires, on sait d’avance lesquelles. Or, j’aimerais que nous réussissions à sortir de nos schémas sclérosés qui nous obligent à des réactions prévues et prévisibles. Sommes-nous encore capables de raisonner autrement que dans un ronron mécanique de « budgétisation » ? Nous participons à une tradition, mais cette tradition ne sert à rien si elle est noyée dans la consensualité. Or la consensualité, c’est l’envers de la vie. Parce que la vie est une création perpétuelle faite d’inconnues. Je veux un budget qui favorise la création. La création n’est pas liée au monde unique des arts, ce n’est pas non plus seulement un livre ou un film. La création, ce n’est pas faire table rase, et en cela une certaine gauche s’est trompée. La création, ce n’est pas non plus les innovations qui inondent le marché, ce n’est pas que le néolibéralisme fiévreux qui ne jure que par la nouveauté. C’est une graine plantée puis une longue gestation avant la germination. Ce qu’il en sortira, on ne peut jamais en être certain. Il me serait égal aujourd’hui de refuser le budget et même de perdre si j’avais la sensation qu’une petite graine de création existera dans le budget. Or, toute ma vie politique et institutionnelle j’aurai refusé les budgets. Si j’avais été homme de droite, je les aurais probablement systématiquement acceptés. Qu’est-ce que cela signifie ? Nous discutons des heures, la grande messe du budget est dite. Puis on vote consensuellement. Mais sans obtenir de consensus. Je laisse chacun le méditer.