L’Egyptien Mohamed El-Ghanam reste en prison

genève • Le Tribunal d'application des peines a finalement décidé de ne pas libérer l'opposant à Hosni Moubarak, alors qu'une manifestation de solidarité s'est déroulée au Caire devant l'Ambassade de Suisse.

Le Tribunal d’application des peines a finalement décidé de ne pas libérer l’opposant à Hosni Moubarak, alors qu’une manifestation de solidarité s’est déroulée au Caire devant l’Ambassade de Suisse.

Le jugement est tombé en fin de semaine. Le tribunal d’application des peines et des mesures, présidé par Leonardo Malfanti, a décidé ne pas remettre en liberté l’opposant à Hosni Moubarak, Mohamed El-Ghanam, enfermé depuis 2007 à Champ-Dollon (notre édition du 14 janvier). Le militant est incarcéré suite à une altercation avec un quidam à l’Université de Genève en 2005, soldée par un non-lieu, mais suivie d’une expertise psychiatrique nettement à charge. Le juge et le Ministère public ont décidé de ne pas suivre les recommandations des deux psychiatres, qui, lors d’une audience le 10 janvier passé, avaient demandé que le prisonnier soit transféré en milieu psychiatrique ouvert comme à Belle-Idée. Depuis son incarcération, ses problèmes somatiques et psychiques se sont pourtant nettement aggravés, faisant craindre pour sa vie. Le Tribunal concède cependant que la mesure thérapeutique institutionnelle en milieu fermé s’est soldée par un échec et demande que le Service des peines trouve un autre établissement pénitentiaire susceptible d’accueillir le plus rapidement possible le détenu. Oui, mais où ? Cette décision ne satisfait pas l’association Citoyens pour la justice publique (CJP) et Pierre Bayenet, le défenseur de Mohamed El-Ghanam. Celui-ci prévoit de faire appel contre ce jugement. Il estime que la décision rendue viole la Convention européenne des droits de l’homme, notamment l’article sur les traitements dégradants. Sans traitement, il y a violation des droits de l’accusé, a-t-il rappelé. Le maintien à Champ-Dollon empêche un véritable traitement médical, précise-t-il. Infirmier en psychiatrie, Jean-Marc Burnod, membre de la CJP, considère que l’on fait un faux prétexte. « On invoque la dangerosité du patient, mais à 55 ans, celle-ci n’est pas un argument. En psychologie adulte à Belle- Idée, il y a suffisamment de professionnels pour gérer des cas comme lui. »

Echo égyptien

Selon Laurent Tettamanti, vice-président de la CJP, le combat mené ici trouve maintenant écho au Caire. Des occupants de la place Tahrir ont organisé le 25 janvier une marche depuis cette fameuse place jusqu’à l’ambassade suisse pour demander, comme l’explique le journal Albadil, le retour en Egypte de l’argent volé par Moubarak et placé en Suisse. Ils ont aussi appelé à la solidarité ave Mohamed El-Ghanam, le militant qui, dès 2001, a demandé le jugement d’Hosni Moubarak devant la Cour de justice de Belgique. Un autre rassemblement, organisé par Ali, le frère de Mohamed El-Ghanam, et fort d’une dizaine de personnes, s’est déroulé aussi devant l’ambassade de Suisse au Caire, avec des banderoles demandant « la fin du terrorisme suisse et la relaxe du colonel et docteur en droit Mohamed El-Ghanam ». La police aurait été appelée en renfort. Contactés, l’ambassade de Suisse et le Département des affaires étrangères confirment que quatre personnes ont réclamé pacifiquement la libération de Mohamed El-Ghanam devant l’ambassade suisse au Caire le 30 janvier dernier, et à cette date-là seulement. Par ailleurs, Ali El-Ghanam s’est aussi entretenu avec la télévision égyptienne, où il a réexpliqué longuement la situation de son frère. « L’autisme des autorités suisses ne fait qu’envenimer la situation », estime le vice-président de la CJP, qui entrevoit la possibilité de problèmes réels entre l’Egypte et la Suisse.

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L’association Citoyens pour la justice publique milite activement pour la libération de Mohamed El-Ghanam détenu à Champ-Dollon. (photo Carlos Serra)