Magali Orsini sur les traces de Mélenchon

Français de l’étranger • La candidate du Front de Gauche en Suisse brigue un siège à l'Assemblée nationale en juin.

La candidate du Front de Gauche en Suisse brigue un siège à l’Assemblée nationale en juin.

C’est une première dans l’histoire de la Vème République française. Les Français de l’étranger pourront élire 11 de 577 représentants à l’Assemblée nationale dans onze circonscriptions découpées au niveau mondial les 10 et 17 juin prochain. Dans la 6ème circonscription qui couvre la Suisse et le Liechtenstein et qui regroupe près de 155’000 électeurs, neuf listes se sont pour l’instant déclarées. Pour celle du Front de gauche (Parti de Gauche – Parti communiste), c’est la Genevoise Magali Orsini, de nationalité franco-suisse, qui est candidate. Pourquoi sur cette liste ? « Je pourrais tirer un parallélisme entre mon parcours et celui de Jean-Luc Mélenchon. Comme lui, j’ai quitté le PS à cause de la droitisation de ce parti et suis partie en quête d’une vraie gauche », explique cette experte-comptable, ancienne enseignante de droit fiscal à la Haute école de gestion et juge assesseur au Tribunal administratif de première instance pour la fiscalité. Originaire d’Arles et arrivée à Genève en 1969, l’ancienne conseillère municipale de Grand-Saconnex a entamé sa trajectoire politique au Parti socialiste genevois dont elle a été l’une des vice-présidentes, après avoir milité en France au PSU, puis au Parti socialiste français. En 2007, elle quitte le parti à la rose genevois. Elle raconte ses désillusions sur ce parti dans un roman policier à clef Euphrosyne s’en va t’au diable. Elle n’en abandonne pas pour autant l’engagement politique. Elle est membre du comité de l’association Attac, qui prône depuis le début l’instauration d’une taxe sur les transactions financières à l’échelle mondiale et, depuis le début de la crise, un audit citoyen de la dette des états. « J’ai lutté en Suisse contre toutes les votations par lesquelles le système néolibéral n’a cessé de faire des cadeaux aux contribuables les plus fortunés », explique-t-elle. Elle a participé à la création en 2007 de La Gauche, formation qui essaie de regrouper les forces à la gauche du PS en Suisse. Présidente de La Gauche-Genève, elle soutient l’initiative fédérale de cette coalition contre les forfaits fiscaux. « Je suis contre le secret bancaire. Les banquiers suisses ne doivent pas favoriser la fraude fiscale des citoyens des autres pays, ce qui est une forme de délinquance comme une autre, mais miser sur leurs compétences ». Elle dénonce aussi les accords Rubik d’imposition à la source des ressortissants de ces pays et signés par la Suisse avec l’Angleterre. « L’échange automatique d’information est le seul moyen d’agir efficacement contre la fraude fiscale », explique-t-elle.

Depuis le congrès fondateur du 2 février 2009, elle est aussi membre du Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon. « Avec la création de ce parti, c’est un vent d’espoir qui s’est levé face à la résignation ambiante. Des économistes émérites, tels que Jacques Généreux, expliquaient enfin haut et fort que l’asservissement aux marchés financiers et la spirale de l’austérité n’étaient pas inévitables », s’exclame-t-elle.

Comment se déroulera sa campagne ? Pour ce qui est du budget, les dépenses sont plafonnées par la loi électorale pour chaque candidat, mais ceux-ci ne seront remboursés que s’ils franchissent la barre des 5%. A côté des courriels sur la base des listes données à tous les candidats par le consulat, elle veut appliquer les méthodes de Jean-Luc Mélenchon qui a placé sa campagne sous les auspices d’une rencontre avec les Français. « Nous allons organiser des assemblées citoyennes qui privilégieront une écoute collective des problèmes de nos compatriotes de Suisse et de grands événements concernant le Front de Gauche », souligne-t-elle. Quels sont les thèmes qu’elle mettra en avant pour sa campagne ? « Nous souhaitons traiter avec nos concitoyens les points essentiels du programme du Front de Gauche L’humain d’abord : création d’un pôle financier public, planification écologique qui permette une réindustrialisation avec des garanties environnementales. Le Front de Gauche souhaite revenir sur la révision générale des politiques publiques (RGPP) qui a eu d’importantes conséquences sur le réseau consulaire, notamment des coupes dans les moyens alloués au rayonnement culturel et aux bourses d’études. Il faut réinvestir sur ces domaines. » Elle souligne aussi l’importance d’instaurer une 6ème République qui soit parlementaire, sociale et participative par la rédaction d’une Constitution qui rende le pouvoir au peuple. « Il faut tout de suite nous affranchir du Traité de Lisbonne, remettre en cause le pacte pour l’Euro et créer un Fonds de développement social, écologique et solidaire européen. »

Quels sont les liens avec l’autre candidate qui prétend représenter la gauche ? Pour Magali Orsini, la candidate du PS n’est pas une « ennemie », la divergence est politique. « Il existe pour la France et pour l’Europe une autre voie que le gouffre du néolibéralisme, auquel les soi-disant sociodémocrates, en réalité sociolibéraux, s’apprêtent à collaborer », martèle-t-elle.

Huit autres listes dans la course à l’Assemblée nationale

A côté de Magali Orsini sur la Liste Front de Gauche, on trouve pour l’heure huit autres listes en concurrence. Pour la liste socialiste des Français de l’étranger, c’est Nicole Castioni qui est première candidate. La Genevoise a été députée au parlement cantonal de 1993 à 2001 et Conseillère municipale dans deux communes genevoises. Elle occupe la fonction de juge assesseur au Tribunal Criminel de Genève. Actuellement, elle travaille sur l’écriture d’une série pour la Radio Télévision Suisse qui raconte la vie d’une femme de son âge qui se lance dans une campagne électorale. Son suppléant, Louis Lepioufle, est étudiant en dernière année de Master à l’Institut Européen de l’Université de Genève.

Chez les Verts, la tête de liste est occupée par la Vaudoise Ximena Kaiser Morris. Elle est active dans le mouvement écologiste suisse depuis dix ans et participe aux niveaux local, cantonal et fédéral, en tant que déléguée des Verts suisses auprès des Verts européens et des Global Greens. Son suppléant est le multi casquettes Jean Rossiaud. Docteur ès sciences économiques et sociales, il a été maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Genève jusqu’en 2005, spécialiste des mouvements altermondialistes. Il est aujourd’hui conseiller du prince et chef de cabinet au Département de la cohésion sociale et de la solidarité d’Esther Alder en Ville de Genève.

Docteur en biologie, formée à Grenoble et Cambridge, travaillant dans le monde du recrutement de profils spécialisés pour l’industrie pharmaceutique à Genève, Laila Barki est la tête de liste du Parti Radical de gauche.

A droite, Claudine Schmid, qui travaille comme rapporteur général de la commission de l’Union européenne sera la représentante de l’UMP et pourra profiter de la machine économique du parti de Sarkozy. Marie-Françoise d’Anglemont de Tassigny sera la candidate sur la liste du Parti radical de Jean-Louis Borloo. Elle a été députée PLR genevoise de 1995 à 2007 et présidente du Grand Conseil en 2005. Quant à la revenante Micheline Spoerri, ancienne Conseillère d’Etat genevoise, particulièrement critiquée lors de son passage au Département de Justice et police, elle se présente sur la liste de la droite indépendante. Et les hommes ? Ils seront réduits à la part congrue. Pierre-Jean Duvivier se présente sur une liste indépendante, alors que Didier Salavert présidera la liste Indépendante libérale.