Les «CFF» espagnols menacés de privatisation

Espagne • Tous les vendredis jusqu’au 23 octobre, durant six heures, le personnel de la compagnie nationale ferroviaire Renfe et celui d’Adif, établissement public qui gère les infrastructures ferroviaires nationales depuis 2005, est en grève...

Tous les vendredis jusqu’au 23 octobre, durant six heures, le personnel de la compagnie nationale ferroviaire Renfe et celui d’Adif, établissement public qui gère les infrastructures ferroviaires nationales depuis 2005, est en grève. «Les mobilisations ont pour objectif de s’opposer aux attaques du gouvernement contre le service public et la politique continue de privatisations du secteur qui attente aux intérêts des usagers, en concédant aux privés des activités rentables pour les caisses publiques», dénonce ainsi la Commission ouvrière, qui soulignait que le 18 septembre, la grève avait été soutenue par 85% des équipes.

Devançant le projet de la Commission européenne qui veut la fin des monopoles ferroviaires nationaux en 2019, le gouvernement espagnol de Mariano Rajoy est en train d’accélérer le processus de privatisation du rail. En 2005, le secteur marchandise de la Renfe a été ouvert aux concurrents étrangers, puis en 2014, la compagnie a été divisée en 4 sociétés anonymes de droit public divisées en secteurs marchandise, voyageurs, entretien du matériel et location de machines à des entités privées, confiée à l’entreprise Rosco. «Nous savons qu’il existe maintenant un plan de privatisation de 49% du secteur marchandise et pour privatiser encore plus le secteur d’entretien des trains, en menaçant l’emploi de près de 5’000 travailleurs», relevait en août, dans un communiqué, Nicolas Taguas, secrétaire général de Commission ouvrière. Dans le même temps, Adif a été divisée en deux secteurs, l’un dédié à l’entretien des infrastructures de grande vitesse et l’autre aux lignes régionales. A cela s’est ajoutée la suppression de 45’000 services annuels de circulation de trains, alors que 172 arrêts dans des gares furent rayés de la carte.

Antécédent anglais catastrophique
Aujourd’hui, le gouvernement veut aller encore plus loin et ouvrir à la concurrence le transport passager sur les grandes lignes, comme l’a annoncé la ministre en charge du dossier Ana Pastor en juin. La première ligne soumise à la concurrence sera celle du couloir à haute vitesse sur la côte méditerranéenne jusqu’à Valence, puis devrait venir le tour de la ligne Barcelone-Madrid-Séville, une ligne pourtant très rentable pour l’Etat espagnol, qui a investi déjà 48 milliards d’euros dans ses lignes TGV.

L’autre exigence de la lutte des syndicats touche à l’investissement de moyens financiers dans la Renfe et l’engagement de personnel. « Nous exigeons un plan urgent pour répondre à la suppression de près de 1’000 postes depuis 2014 et pour rajeunir le personnel du fait du vieillissement du personnel qui a une moyenne d’âge de 53,4 ans, la plus haute d’Europe», souligne la Confédération générale du travail. Plus généralement, les deux syndicats dénoncent la stratégie du gouvernement, dénonçant le tarissement des investissements, les coupes dans le personnel afin de produire une dégradation du service, avant la mise en vente des secteurs les plus lucratifs à des opérateurs privés. Et ils rappellent la catastrophe qu’a occasionnée la privatisation en 1993 sous la règne de John Major du rail britannique, qui a finalement dû être remis sous administration publique en 2001 par Tony Blair.