Des suffragettes à l’émission «On n’est pas couché»

La chronique féministe • Il faut absolument voir Les Suffragettes, le film britannique réalisé par Sarah Gavron. L’histoire se situe en 1912-1913 à Londres. Il traite des suffragettes, militantes du mouvement britannique pour le droit de vote des femmes. Si le personnage de Maud a été créé pour les besoins du film, on suit des femmes qui ont réellement existé et luttèrent avec courage pour défendre leurs droits, nos droits. Maud, une jeune ouvrière qui travaille dans une blanchisserie, se trouve mêlée à cette lutte par hasard puis devient une fervente convaincue de l’Union sociale et politique des femmes (SWPU), dirigée par la très célèbre Emmeline Pankhurst (qu’interprète Meryl Streep).

Il faut absolument voir Les Suffragettes, le film britannique réalisé par Sarah Gavron. L’histoire se situe en 1912-1913 à Londres. Il traite des suffragettes, militantes du mouvement britannique pour le droit de vote des femmes. Si le personnage de Maud a été créé pour les besoins du film, on suit des femmes qui ont réellement existé et luttèrent avec courage pour défendre leurs droits, nos droits. Maud, une jeune ouvrière qui travaille dans une blanchisserie, se trouve mêlée à cette lutte par hasard puis devient une fervente convaincue de l’Union sociale et politique des femmes (SWPU), dirigée par la très célèbre Emmeline Pankhurst (qu’interprète Meryl Streep).

Elles sont terribles, les conditions de vie de ces femmes qui travaillent dans une blanchisserie. Maud est la préférée, parce que le chef la harcèle sexuellement, avec l’assentiment du mari, semble-t-il, puis il choisit une jeune de 14 ans que Maud, licenciée, fera engager comme domestiques dans une riche famille, pour la préserver. Jusqu’au début du 20ème siècle, les femmes n’avaient absolument aucun droit. Non seulement elles n’étaient pas considérées comme des citoyennes à part entière, mais elles n’avaient pas non plus le droit de gérer leur fortune (le mari d’une féministe riche refuse de payer la caution de ses codétenues), ni l’autorité parentale. Le mari de Maud la jette dehors, l’empêche de voir leur fils et finit pas le faire adopter. La mère n’a rien à dire…

Au début du siècle dernier, en Angleterre, des femmes de toutes conditions décident de se battre pour obtenir le droit de vote. On entend les arguments mille fois servis aux femmes: elles n’en ont pas les capacités, et si on leur accordait le droit de vote, elles voudraient ensuite devenir députées, ministres… Des députés questionnent quelques représentantes sur leurs conditions de travail et écoutent leurs revendications. Mais la réponse officielle est le refus, devant un rassemblement de suffragettes abasourdies. Comme le gouvernement n’entend pas les discours, elles passent à la vitesse supérieure. Elles lancent des pierres dans des vitrines, jettent des explosifs dans des boîtes aux lettres publiques, attaquent des symboles politiques. Les réactions du gouvernement sont de plus en plus brutales, mais pour leur cause, elles sont prêtes à tout risquer: leur travail, leur maison, leur liberté, leurs enfants et même leur vie.

Bien sûr, je connaissais la lutte des suffragettes britanniques, sur le papier, leur courage, la répression des autorités. Mais voir les événements sur grand écran, en s’identifiant à ces pionnières, c’est autre chose. J’étais scotchée, émue aux larmes. J’étais giclée par la bassine d’eau bouillante qui avait tué la mère de Maud quand elle avait quatre ans, je recevais les coups des policiers durant les manifestations, sentais les naseaux des chevaux qui les chargeaient, n’arrivais plus à avaler ma salive quand on les gavait de force, en prison, pour casser leur grève de la faim.

Le 4 juin 1913 a lieu le Derby d’Epsom, une prestigieuse course hippique, où se rend le roi. On attend 500’000 spectateurs. Les suffragettes décident d’y dérouler des banderoles, afin qu’on parle de leur combat, puisque le gouvernement réduisait les médias au silence. Emily Davison est placée à l’intérieur du virage de Tattenham Corner. Durant la course, elle passe sous la barrière de sécurité, pénètre sur la piste, s’approche d’Anmer, un cheval appartenant au roi George V, qui la renverse. Emily Davison est hospitalisée et meurt de ses blessures le 8 juin.
Les médias ont filmé la scène, trouvé la banderole dans la poche de son manteau et parlé de son combat. Ses funérailles ont lieu le 14 juin à Bloomsbury, dans le district de Camden. 2000 suffragettes, appartenant à différentes associations militantes, assistent à la cérémonie. En voyant le cortège de ces femmes, belles, déterminées et dignes, accompagner le cercueil, on comprend que le mouvement féministe est en marche et que rien ne pourra l’arrêter.

En 1918, le Parlement du Royaume-Uni vote une loi accordant le droit de vote aux femmes de plus de 30 ans. Elles obtiennent en 1928 le même statut que les hommes. Emmeline Pankhurst meurt quelques mois avant, et ne peut donc pas savourer cette victoire, qui lui doit beaucoup.

Le Royaume-Uni fut le huitième pays à avoir donné le droit de vote aux femmes. Le premier fut la Nouvelle-Zélande (1893), grâce à une pionnière mondiale, Kate Sheppard, née Catherine Malcolm (1847-1934). Ce fut ensuite au tour de l’Australie (1902) et de la Finlande (1906). Les Etats-Unis, sur le plan fédéral, l’adoptèrent en 1919, en même temps que l’Allemagne. En France, les femmes n’obtinrent ce droit qu’en 1944, à la fin de la Seconde Guerre mondiale… et les Suissesses en 1971. Aujourd’hui, tous les pays ont accordé le droit de vote aux femmes, y compris l’Arabie saoudite, depuis 2015. Les autres droits en découlèrent.

A la fin de la séance de cinéma, j’ai remercié ces suffragettes courageuses, qui affrontaient les politiques, les patrons, leur mari, leurs voisins, dont les plus féroces étaient les autres femmes.

Depuis, on a fait du chemin, malgré les inégalités qui perdurent. Le 21 décembre, pour son émission «On n’est pas couché», Laurent Ruquier a réuni Audrey Pulvar, Natacha Polony et Eric Nauleau autour des actuel-le-s débatteurs: Léa Salamé et Yann Moix. L’invité politique était le porte-parole du gouvernement Hollande, Stéphane Le Foll. J’ai alors assisté à un spectacle que je n’avais pas imaginé dans mes rêves féministes les plus délirants: les trois journalistes femmes, Audrey Pulvar, Natacha Polony et Léa Salamé, ont soumis Le Foll à un feu roulant qui dura une dizaine de minutes et laissa sans voix Laurent Ruquier, Yann Moix et Eric Nauleau, qui sont pourtant de patentés bavards. Là, je me suis dit que nous avions franchi une étape supplémentaire dans l’émancipation des femmes.
Ce constat s’ajoute à quelques autres: les femmes sont désormais plus nombreuses que les hommes à étudier la médecine, seraient davantage à l’écoute de leurs patient-e-s et commencent à investir les postes de cadre; leur présence pour un tiers au moins dans les postes de direction rend les entreprises plus performantes. Durant l’année écoulée, concernant les réfugié-e-s, le seul représentant d’un pays à avoir eu une vision politique et s’être comporté en homme d’Etat fut une femme: Angela Merkel. Et l’année 2016 pourrait voir, pour la première fois de son histoire, une femme diriger les Etats-Unis…