Gesualdo, prince maudit et compositeur fascinant

concert • La musique sensuelle et douloureuse de Carlo Gesualdo «à l’avant-garde du passé» est à l’affiche des Concerts Arts et Lettres de Vevey le 21 mars.

La vie du compositeur Gesualdo a défrayé la chronique de son époque, comme elle a inspiré poètes, écrivains et musiciens qui ont vu en lui l’archétype de l’artiste maudit. Né en 1566 à Venosa, mort en 1613 à Gesualdo, membre de la noblesse italienne de la fin de la Renaissance, il tue sa femme et son amant, pris en flagrant délit d’adultère. Son deuxième mariage est un nouvel échec. Il meurt seul, obsédé par un besoin de contrition qui le fait multiplier les séances de flagellation pratiquée par de jeunes garçons engagés à cet effet. Son œuvre restera longtemps oubliée. C’est dans les années 1930 que Nadia Boulanger dirige en France certains de ses madrigaux, lesquels sont aussi donnés en Italie par Dallapiccola et en Allemagne par Hindemith, et même à Hollywood où Stravinski les entend, fasciné à son tour par cette musique aux sonorités inouïes.

Madrigaux, motets et répons

Gesualdo a été initié à la musique par son père, fondateur d’une académie musicale. Il a écrit des recueils de madrigaux ainsi que de la musique religieuse mais aucune pièce pour l’ordinaire de la messe. Il laisse 110 madrigaux à 5 voix, un livre de madrigaux à 6 voix, 2 livres de motets et un de répons. Parmi les poètes qui l’ont inspiré, citons Torquato Tasso, avec qui il était lié.

Son contrepoint remarquablement maîtrisé s’enrichit de chromatismes et de dissonances étonnantes, d’où ce terme d’«avant-garde du passé», qui lui a été attribué. Sa musique se modèle sur le texte, en colore les mots, les images et nombreux oxymores; il ne craint ni les contrastes brusques, ni les ruptures de rythme et d’harmonie. Il adhère aux paroles avec une force expressive saisissante, voire troublante. En fait, sa polyphonie s’inscrit dans la tradition de son époque mais avec une liberté et une audace dans la conduite et la superposition des lignes musicales qui la font apparaître totalement innovante.

Concert et présentation d’une œuvre écrite en 1611

Dans une programmation où se succèdent des propositions fort diverses, tant dans le choix des formations que des œuvres, les Concerts Arts et Lettres de Vevey affichent Gesualdo le 21 mars à 19h30 à la salle del Castillo. On entendra Responsaria et aria ad officium hebdomadae sanctae spectantia, qui datent de 1611, ainsi que des pièces de Monteverdi et de Marenzio avec, pour interprète, la Compagnia del Madrigale. Il y aura une présentation de la soirée à 19h et, après le concert, l’habituel cocktail offert qui permet d’échanger impressions et commentaires en présence des artistes.

Vevey, salle del Castillo, 21 mars. 19h présentation, 19h30 concert.