Les aînés plébiscitent les cafés-philo

Le concept de «café-philo» est né en France, à Paris en 1992 à l’initiative d’un professeur de philosophie, Marc Sautet, qui organisait dans des lieux publics des dialogues autour de questions philosophiques. Il s’agissait de démocratiser la philosophie pour la rendre accessible à tous. Eric Suarez – doctorant en philosophie et fondateur de la société...

Le concept de «café-philo» est né en France, à Paris en 1992 à l’initiative d’un professeur de philosophie, Marc Sautet, qui organisait dans des lieux publics des dialogues autour de questions philosophiques. Il s’agissait de démocratiser la philosophie pour la rendre accessible à tous.

Eric Suarez – doctorant en philosophie et fondateur de la société Cocoonin’ qui propose ces cafés-philo en Suisse romande – a eu l’idée d’animer des cafés-philo auprès des aînés en 2011 lorsqu’il travaillait dans une résidence à Québec. Après en avoir discuté avec la responsable des animations, il organisait son premier café-philo. L’activité connut un formidable succès et des résidents qui ne participaient pas aux autres activités, faisaient preuve de motivation pour ce projet.

Les effets du dialogue philosophique sur la dimension intellectuelle des participants sont multiples: il leur permet d’utiliser différentes habiletés de penser, de s’exercer à la rigueur logique dans l’élaboration des arguments ou de faire travailler l’imagination. Ce travail réflexif crée une véritable dynamique intellectuelle chez les participants dont plusieurs avaient l’impression de retourner aux études. Le fait d’avoir une question philosophique à travailler entre deux rendez-vous les garde dans une dynamique intellectuelle. Le dialogue philosophique en résidence pour aînés est une chance extraordinaire qui leur est offerte de pouvoir exercer leurs compétences cognitives.

 L’âge disparaît

Ces cafés-philo impactent les relations sociales. En étant au cœur du dialogue, les participants sont en relation directe les uns avec les autres. Les personnes se connaissent mieux, des liens se créent. Les participants sont acteurs de la recherche et il y a une entraide. Cette expérience partagée du dialogue les conduit à continuer les échanges des jours après. Cela améliore donc le vivre ensemble au sein de l’établissement.

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la mort n’est pas le sujet qui les intéresse le plus. Ils s’interrogent sur les mêmes sujets que les autres générations. L’accent est donc mis sur les sujets humains. Ayant vécu beaucoup de choses, ils se rapprochent de l’essentiel, notamment les relations affectives.

La seule différence qu’on pourrait trouver avec les autres «cafés» est l’implication et la volonté de savoir. L’intérêt est proportionnel au nombre d’expériences vécues. Il y a une volonté d’interroger le sens de la vie et de la juger différemment à la lumière du questionnement philosophique.

«Dans l’échange d’idées, l’âge disparaît et on se retrouve entre consciences. Ça n’est pas des grands-parents avec qui je dialogue mais plutôt des sœurs et des frères dans lesquels je me reconnais pleinement et avec qui je partage des valeurs essentielles» décrit Eric Suarez.

Dans nos sociétés occidentales où le jeunisme fait des ravages, il est temps de renouer avec le dialogue transgénérationnel afin de mieux vivre ensemble en apprenant les uns des autres, et la philosophie fait partie des outils les plus aptes à rendre à la personne, quel que soit son âge, sa condition sociale ou son sexe, toute son utilité.