Amanda Ioset réagit à notre édito sur la Syrie

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Chère rédaction,

Je souhaite réagir au «Il faut le dire» sur la Syrie publié dans le dernier numéro de Gauchebdo. Je suis surprise d’y trouver un tel parti pris pour la propagande de l’OTAN, déjà largement relayée pas les médias occidentaux. La guerre en Syrie est le résultat des conflits d’un monde multipolaire où les puissances luttent pour s’approprier les combustibles fossiles et pour contrôler le marché vers l’Europe et le monde industrialisé. La réalité est complexe et ne se résume pas à un conflit religieux ou ethnique, avec d’un côté les bons et de l’autre les méchants.

La libération de la ville d’Alep est un pas important dans la lutte contre les islamistes et sûrement aussi vers la fin de la guerre civile en Syrie. Pourquoi cela n’est-il souligné nulle part? Après tous ces morts, ces réfugiés, ces déplacés, la perspective de s’approcher de la fin du conflit devrait pourtant donner de l’espoir à tous ceux qui veulent la paix en Syrie. Certes, il y a des accusations de crimes de guerre. Ce sera naturellement à une enquête indépendante d’en juger. Ce n’est en tout cas pas aux pays de l’OTAN ni aux grands groupes médiatiques d’en décider, en se basant comme ils le font toujours sur des sources plus que controversées.

Par ailleurs, une telle enquête devra également se pencher sur les agissements des autres acteurs impliqués dans cette guerre, à commencer par ceux qui n’ont fait que souffler sur le feu depuis le début en fournissant des armes à des groupes extrémistes.

Un jour, quelqu’un a dit: «La première victime de la guerre, c’est la vérité». Dans cet éditorial, vous dénoncez la «machine de propagande de Bachar Al-Assad». Qu’en est-il de la propagande des islamistes, qui ont déjà diffusé des «Fake News» concernant des massacres supposés du gouvernement syrien (même genre de «news» qui ont conduit à l’invasion de l’Irak et qui se sont révélées fausses depuis)? Qu’en est-il de la machine de propagande des pays de l’OTAN, pour qui le seul but en Syrie était dès le départ un changement de régime, coûte que coûte? C’est avec la même propagande de guerre qu’on a fait accepter à «l’opinion publique» européenne les guerres d’Afghanistan, d’Irak et de Libye, avec les résultats catastrophiques que tout le monde peut constater aujourd’hui. C’est désespérant de voir que les mêmes manipulations médiatiques fonctionnent encore et encore.

Aujourd’hui, plus que jamais, il faut revendiquer la reprise des négociations de paix pour une sortie politique de cette guerre. C’est la seule solution pour mettre un terme à des années de conflits, pour que la Syrie puisse envisager la paix, mais aussi pour (re)construire un État laïc qui respecte les droits humains.

Amanda Ioset