Les sans-abri continuent à donner de la voix

Vaud • Des dizaines de personnes sans-abri et solidaires ont investi le 1er décembre un collège lausannois pour tenter de se protéger du froid. Depuis 2015, la thématique des sans-abri sans solution est récurrente à Lausanne.

Depuis l’été 2015, lorsque les employés de la structure d’hébergement d’urgence du Sleep-in avaient jeté la lumière sur le nombre croissant de personnes sans solution qui dormaient dans leur jardin, un large mouvement de solidarité avec les sans-abri s’est développé dans la capitale vaudoise.

Avec le froid qui s’est fait mordant ces dernières semaines, la question lausannoise des sans-abri refait surface. Le 10 novembre dernier, une centaine de personnes sans-abri et solidaires avait ainsi passé la nuit sur la place Saint-Laurent pour protester contre le manque de places d’hébergement d’urgence, à l’appel de différents collectifs. Cette démonstration n’ayant été suivie d’aucun effet, le 1er décembre, alors que la température était descendue en dessous de 0 degré, entre 60 et 80 personnes ont investi la salle de gym d’un collège de la ville, avec l’intention d’y passer la nuit. «Il fallait une altercation pour que ces personnes qui dorment dehors soient révélées au grand jour», expliquait il y a quelques jours au Temps une membre du collectif New Life, constitué pour l’occasion.

«Une évacuation inhumaine»
L’action n’a pas été du goût de la Municipalité, qui a ordonné l’évacuation des lieux le soir même, au grand dam des occupants en quête d’un peu de chaleur. C’est une «mesure inhumaine. Les conséquences de cette évacuation, qui n’est rien d’autre qu’une omission de prêter secours, auraient pu s’avérer dramatiques. Elle est indigne d’une Municipalité se revendiquant de gauche», s’est empressé de dénoncer le mouvement solidaritéS par voie de communiqué, revendiquant «l’ouverture rapide de 150 places supplémentaires». Ensemble à Gauche a également tenté de faire passer au Conseil communal, dans le cadre des discussions sur le budget 2018, une augmentation de 600’000 francs de subventions aux institutions actives dans le domaine de l’accueil d’urgence.

Pour sa part, la Municipalité a commencé par critiquer une «violation de domicile inacceptable», avant d’annoncer le lendemain sa décision d’augmenter provisoirement jusqu’à 50 places la capacité d’accueil de ses différentes structures d’hébergement d’urgence. Une décision prise «en coordination avec le canton, en raison de la météo actuelle (froid et vent), et quand bien même les conditions formelles du plan ‘grand froid’ ne sont pas réunies», précise-t-elle par communiqué.

L’EVAM, une solution?
Depuis l’été 2015, lorsque les employés de la structure d’hébergement d’urgence du Sleep-in avaient jeté la lumière sur le nombre croissant de personnes sans solution qui dormaient dans leur jardin, un large mouvement de solidarité avec les sans-abri s’est développé dans la capitale vaudoise. Différentes maisons vides ont été occupées successivement pour abriter les personnes sans toit et plusieurs groupes ou projets se sont créés comme la Maraude (distribution de nourriture aux sans-abri) ou une armoire à couvertures.

Dans ce contexte, la revendication de plus de lits au chaud revient régulièrement. Mais du côté des autorités municipales et cantonales – ces dernières, bien que moins souvent interpellées par les militants, sont en charge d’une bonne partie du financement des structures d’hébergement d’urgence sur le sol cantonal – , la réponse est toujours la même: selon elles, nombre des personnes concernées relèvent de la migration et pourraient trouver des solutions via l’aide d’urgence accordée par l’EVAM (établissement vaudois d’accueil des migrants). Il n’est donc pas question de modifier durablement l’offre d’hébergement d’urgence hors EVAM.

Du côté des militants, on rétorque toutefois que la peur d’un renvoi, notamment en vertu des accords de Dublin, pousse nombre de concernés à éviter cette structure. «Quand on a 150 personnes qui dorment dans la rue, il ne s’agit pas de se préoccuper de leur statut de séjour», s’insurgeait quant à lui le conseiller communal de solidaritéS Pierre Conscience, interrogé par 24 Heures.