Des services sociaux toujours moins sociaux

Neuchâtel • Réformes fédérales et économies cantonales mettent à mal l’Action sociale à La Chaux-de-Fonds. Le personnel et les usagers sont sous tension. Des dysfonctionnements sont pointés. (Par Julien Gressot)

Le durcissement des lois afférentes aux prestations sociales génère des effets délétères sur les prestations sociales. (Nelson Minar)

Le Service de l’Action sociale de La Chaux-de-Fonds est actuellement dans une situation délicate comme le dénonçait vivement un article de presse paru le 9 janvier dans le journal neuchâtelois Arcinfo qui titrait sa une «Services sociaux: l’incroyable gâchis». La situation du Service n’est pas nouvelle, mais plusieurs évènements l’ont plongé définitivement dans une crise dont les effets sont sensibles sur les bénéficiaires et sur le personnel.

Pour en savoir plus, le Conseil général a demandé des explications à Katia Babey, la responsable du dicastère, dans une interpellation urgente portée par le POP durant la séance du 4 février.

Les soucis du Service débutent en grande partie avec le durcissement des différentes lois ayant trait aux prestations sociales survenu ces dernières années sous la pression de la droite (LACI, LAI, …). Ces réformes, qui ont rendu l’accès aux prestations plus compliqué, ont diminué le nombre de bénéficiaires de ces assurances. Loin de résoudre la situation des personnes, c’est en fait un simple report qui est survenu en augmentant le nombre de dossiers des services sociaux, créant au passage de nouvelles inégalités car ce sont les budgets des communes qui sont impactés.

Des économies problématiques

A ces réformes fédérales, se sont ajoutées des réformes au niveau du canton de Neuchâtel, qui ont aussi changé la donne. Les services communaux sont devenus des guichets sociaux régionaux (GSR). Ils sont désormais financés par un pot commun réparti à 60% entre le canton et 40% pour les communes. Comme l’a rappelé le conseiller d’Etat en charge de l’Action sociale, Jean-Nathanaël Karakash, en peu de temps de très nombreuses mesures ont été prises pour réduire les coûts, au prix d’une complexification des normes. Traduction: pour faire des économies, les normes ont été durcies, compliquées et c’est bien là le fond du problème.

Les répercussions concernent en premier lieu les bénéficiaires de l’Action sociale considérés comme une charge qu’il faut réduire, par exemple en instaurant une campagne intitulée «réglo» pour lutter contre «les abus». Ces modifications touchent également l’organisation du travail des services sociaux qui ont davantage de dossiers, davantage de normes à appliquer et, en corollaire, une perte de sens dans un domaine qui se mue davantage en service administratif plutôt qu’en service d’aide à la personne.

Devant ces modifications, des résistances semblent être survenues au GSR de La Chaux-de-Fonds et les rapports entre la hiérarchie et le personnel se sont détériorés. Les bénéficiaires ont également été moins soutenus, voyant moins leur référent.e qui, en plus, changeait fréquemment en raison du fort roulement du personnel (jusqu’à 20% certaines années), rajoutant ainsi à des situations déjà complexes, un accès limité au Service et donc au soutien qu’il devrait représenter.

Opacité controversée

Le Conseil communal de La Chauxde-Fonds, dans ce dossier comme dans d’autres, a cherché à filtrer au maximum les informations qu’il donnait tant publiquement que dans les commissions et aux membres du législatif. Cette opacité explique sans doute en partie les articles de presse assez piquants qui s’accumulent dernièrement dans le quotidien régional sur plusieurs sujets (aéroport des Éplatures, campagne de communication du «Troll» de la Ville, …).

Désormais le Conseil communal semble avoir saisi l’ampleur de la situation. Il prend des mesures pour garantir l’égalité de traitement des bénéficiaires et retrouver un climat de travail serein. Seul l’avenir dira si elles seront suivies de résultats positifs. Il faudra également attendre avant d’avoir des réponses claires sur l’impact des dysfonctionnements tant du point de vue humain que financier, réponses qui devraient venir dans un prochain rapport d’information.