Pour assurer des services publics de qualité

Genève • Face à la crise économique qui s’amplifie et les pertes fiscales prévues pour l’Etat, la gauche, les Verts et les syndicats défendent leur initiative «zéro pertes», soumise au vote le 27 septembre.

Les initiants veulent assurer des ressources financières pour l’Etat afin de préserver les services publics et lutter contre le dumping fiscal intercantonal. (JDr)

C’est dans un parc en face des Hôpitaux universitaires que les promoteurs de l’initiative «Zéro pertes» ont lancé la semaine dernière leur campagne pour le 27 septembre.

Déposé en octobre 2018 pour mettre un frein aux baisses de rentrées fiscales prévues par la double réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA) tant au niveau national que cantonal acceptée finalement en mai 2019, le texte entend poser des garde-fous face aux coupes claires prévues par les deux réformes. Il veut ainsi maintenir le niveau des recettes fiscales, préserver le financement des services publics et les prestations à la population, renforcer la progressivité de l’impôt, mais aussi inscrire dans la constitution la nécessité que l’État agisse en faveur de la réduction de la concurrence fiscale intercantonale.

«L’initiative reste pertinente, alors que nous nous vivons les prémices de la pire crise économique des 30 dernières années. La période de confinement a aussi montré des trous béants dans le filet de la couverture sociale. Il est donc nécessaire de donner les moyens aux collectivités publiques pour financer un plan de relance de l’économie pour préserver l’emploi et les salaires, mais aussi les prestations dans le cadre des dépenses contraintes de l’État. Un tel plan de relance nécessite des moyens et des ressources, ce que refusent la droite et le patronat», a expliqué Davide De Filippo, nouveau président de la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS).

Une redistribution très faible

A titre d’exemple, plusieurs syndicalistes ont dénoncé la pression que connaît aujourd’hui le service public. «La dotation en personnel est basée sur des modèles informatiques qui ne correspondent pas à la réalité du terrain… Nous n’arrivons pas à répondre aux besoins des patient-e-s dans les conditions actuelles», a sou- ligné Sonia Pignat, infirmière aux HUG et mili- tante au SSP. «Les conséquences sont dramatiques pour beaucoup de gens, les services publics ne peuvent tout simplement pas répondre aux besoins alors que ceux-ci croissent sous l’effet de la paupérisation de larges couches de salarié.e.s depuis 20 ans», ajoute Jean-Luc Ferrière (SIT). «40% de la population n’a aucune fortune, alors que 5 à 10% de personnes détiennent le 80% de la fortune globale. La redistribution est faible à Genève, sachant que certains secteurs voient une stagnation ou une baisse de leurs salaires comme dans l’hôtellerie- restauration», a ajouté le syndicaliste.

Les femmes étant surreprésentées dans les catégories précaires de la population, elles sont également plus fortement touchées par les baisses des prestations. Françoise Nyffeler, membre du secrétariat du Collectif Grève féministe, est reve- nue sur les conséquences des politiques d’austérité sur les femmes, «qui se retrouvent souvent contraintes de compenser le recul et la dégradation des services publics». Ces pertes fiscales remontent à loin. «Les réformes fiscales de ces 25 dernières années ont massivement bénéficié aux plus riches et aux grandes entreprises. Cumulées, elles ont créé un manque à gagner de plus d’un milliard par an pour l’État», ont assuré les initiants.

Pression sur les communes

Député vert, Jean Rossiaud a insisté sur l’importance des rentrées fiscales pour mener une véritable politique environnementale «Comment faire face à l’urgence climatique et sociale, sans fonds publics? Ce n’est pas possible!» «Notre initiative veut aussi lutter contre le dumping fiscal et en combattant la concurrence fiscale intercantonale», a précisé Christian Dandrès, conseiller national PS. «Cette concurrence profite essentiellement aux multinationales et aux grandes fortunes, pour qui on multiplie les cadeaux fiscaux, tandis que la majorité de la population paie l’addition, victime de l’assèchement des finances publiques et des coupes dans l’éducation, les soins et la sécurité», a-t-il ajouté.

Enfin, Carole-Anne Kast, conseillère administrative PS à Onex, s’est exprimée au sujet des effets délétères des cadeaux fiscaux sur les communes, en particulier les communes urbaines et populaires: «Les cadeaux fiscaux ont un double effet négatif en réduisant les rentrées fiscales des communes et en réduisant la cagnotte de la péréquation intercommunale. Pourtant, les communes jouent un rôle essentiel en matière de services publics de proximité, notamment dans le domaine de la petite enfance». Pour leur part, la droite et le patronat appellent à refuser l’initiative, estimant que «zéro pertes, c’est avant tout zéro recettes, zéro prestations, zéro emplois».