A Courzieu, un festival pas comme les autres

Festival • Avec l’été revient le temps des festivals, petits et grands, à la limite de la pléthore. Si les grands rassemblements affichent souvent complet et se rapprochent plus du supermarché, il existe des festivals en mesure de proposer une autre vision de la culture. C’est le cas du festival des fromages de chèvre, à Courzieu, en France.

Céline Vacher à la voix, Arnaud Roman au piano, Christian Paccoud à l’accordéon, et Chahinez Hammadi qui anime et préside avec maestria, pour accompagner les chanteuses et chanteurs du dimanche après-midi, «chanter Gainsbourg assis dans l’herbe et sans micro», un moment fort du festival en 2016 (photo: C-A.F)

Si la culture, à elle seule, ne peut probablement changer le mon-de, elle est plus vitale que jamais. Elle nous offre des possibilités de reprendre énergie et espoir pour les luttes qui nous attendent. Ce n’est pas un hasard si les autoritaires de tous poils s’attaquent en priorité à la culture par des coupes dans ses budgets ou par la censure et l’interdiction. Du côté des partisan-ne-s du libéralisme, la culture est réduite à des marchandises «profitables», axées commercialement en fonction de «publics cibles» faisant ainsi de nous des «produits».

Heureusement, la culture vit et survit, envers et contre tout. Avec l’été revient le temps des festivals, petits et grands, festivals à profusion, à la limite de la pléthore. Si les grands rassemblements affichent souvent complet et se rapprochent plus du supermarché où les spectateurs viennent autant pour l’ambiance que pour la programmation, il existe des festivals en mesure de proposer une autre vision de la culture.

Faire tomber les murs entre un art estampillé et un art marginal
Le festival des fromages de chèvre, qui se tiendra à Courzieu du 26 au 31 juillet entre pleinement dans cette catégorie; une grande fête des cultures qui se déroule dans un site magnifique, dans les monts du Lyonnais. Trois bonnes heures de route depuis la Suisse et vous y êtes; avec possibilité de camping sur le site ou de se trouver une gîte dans les environs.

Le site du festival est ouvert à toutes et tous. Ici, ni ticket d’entrée ni abonnement, la seule caisse que vous trouverez est celle qui vous vend les bons pour les boissons et la nourriture. Ensuite, libre à vous de contribuer aux spectacles, en fonction de vos envies et de vos moyens, aux collectes à la sortie des spectacles. Ces collectes, animées par les «Sœurs Sisters», font aussi partie de l’esprit du festival.

A «L’extraordinaire festival des fromages de chèvre», il n’est pas fait de différence entre «grande» ou de «petites» têtes d’affiche, tous les artistes qui y participent bénéficient du même accueil professionnel et de la même qualité d’écoute. La marque de fabrique du festival est sa volonté de présenter à la fois des artistes professionnels et des artistes issus des marges de notre société: centre de réinsertion, institutions pour personnes en situation de handicap ou de rupture sociale, afin de «Donner la parole à ceux qui ne l’ont pas et pour d’autres raisons que ceux qui l’ont». Une volonté farouche de faire tomber les murs entre un art estampillé et un art marginal, entre normalité et marginalité. Ici seules importent la qualité et l’authenticité de chaque spectacle.

Ce festival est né d’une rencontre: l’auberge la Buissonnière accueille également des spectacles tout au long de l’année et c’est suite à un passage de Christian Paccoud sur cette scène que l’idée du festival a germé. Chantal, la responsable du lieu partage un même respect pour les faiseuses et faiseurs de spectacles, sans échelle de valeurs ni recherche de dominer l’autre. Le fils de la maison est régisseur plateau et connaît les réseaux culturels de la région lyonnaise. Christian Paccoud et Armelle Dumoulin apportent leur réseau de techniciens et d’artistes. Comme le dit Christian Paccoud: «Ici pas de chefs, pas d’AG pour répartir le travail, chacune et chacun sait ce qu’il y a à faire. Et ça fonctionne… […] Il faudrait que la société ressemble à ça […] une même envie libertaire de repeindre les couleurs du monde.»

Gainsbourg, assis dans l’herbe et sans micros
Ne cherchez pas la «grille horaire» de «L’extraordinaire festival des fromages de chèvre», seule sera dévoilée la liste des spectacles proposés pour ces cinq soirées. Dès le deuxième jour, un spectacle pour enfants est proposé à 11h, puis les débuts d’après-midi, de 13h à 16h, «Les Cabarets inattendus» occuperont la scène. Chacune et chacun pourra participer par la musique, la chanson, le théâtre, la danse, etc. La seule contrainte pour pouvoir participer est de ne pas être artiste ­professionnel.
Les soirées se poursuivent avec des spectacles à 17h, 20h et 22h, sur la grande scène ou sur la scène de la bergerie. Les spectateurs sont appelés à chacune des représentations et c’est à ce moment que vous saurez qui va se produire. A partir de minuit, les mémorables «After-chèvre» prolongent la fête à la bergerie, expérience à ne pas manquer. Vivre le festival, c’est faire preuve de curiosité et d’ouverture et se laisser emporter pendant cinq jours au fil des découvertes et des rencontres.

Au fil des jours, le festival propose tant de la chanson, que du théâtre, de l’humour et du spectacle de cirque. En plus des spectacles présentés sur scène, des moments de musiques naissent spontanément entre artistes et spectateur hors des scènes. Le dimanche après-midi, tout le monde se retrouve pour chanter les chansons. L’année dernière, c’étaient celles de Gainsbourg, assis dans l’herbe et sans micro. Les barrières disparaissent entre artistes et spectateur. Pour 2017, ce seront les chansons de Jacques Brel qui seront revisitées… avant le grand final du dimanche soir. Ce spectacle à représentation unique, qui met un point final au festival, est élaboré au fil des jours par les artistes présents. Un grand moment d’émotion qui vous laisse avec une furieuse envie de revenir pour le prochain festival…

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