L’UDC, Appenzell Rhodes-Intérieures et consorts ont encore frappé !

Ça y est ! Les réacs suisses ont fait basculer le nombre des cantons dans le non, alors que l’ensemble de la population est en faveur d’une politique familiale (à 54,3%) qui permettrait aux femmes de concilier vie de famille et carrière. D’abord, il y a eu ce tout-ménage honteux de l’UDC qui présente des...

Ça y est ! Les réacs suisses ont fait basculer le nombre des cantons dans le non, alors que l’ensemble
de la population est en faveur d’une politique familiale (à 54,3%) qui permettrait aux
femmes de concilier vie de famille et carrière. D’abord, il y a eu ce tout-ménage honteux de l’UDC
qui présente des enfants en cages et numérotés comme du bétail, puis le retournement du PLR,
au grand dam des femmes libérales-radicales, enfin le manque d’engagement d’Alain Berset : la
comparaison avec celui de Doris Leuthard pour la LAT est cruelle. Et pour couronner le tout, le
manque de vision d’economiesuisse, qui a préféré mettre 8 millions contre l’initiative Minder
(passée avec 68% de suffrages !) plutôt qu’en faveur des familles, ce qui, au bout du compte, servirait
mieux ses intérêts.

Une fois de plus, ce sont les cantons dits « primitifs » qui imposent leur vision passéiste à la majorité
des citoyen-ne-s et aux cantons-villes. Parmi eux, Uri, Schwytz, Obwald, une partie de Niedwald
et l’incontournable Appenzell Rhodes-Intérieures, qui s’obstinait à refuser le droit de vote
féminin sur le plan cantonal, à tel point que le Tribunal fédéral a fini par le lui imposer en 1990.
Certes, c’est au trio Uri, Schwytz, Unterwald que nous devons l’existence de notre pays, mais leur
vision indépassable de Suisses aux bras noueux m’exaspère ou, comme aurait dit Lino Ventura
dans Les tontons flingueurs, « commence à me les briser menu ». Il devient tout à fait insupportable
qu’une poignée de cantons réactionnaires empêchent les cantons progressistes d’avancer.

L’UDC, dans ses prises de position, est fidèle à elle-même, qui souhaite renvoyer les femmes à la
maison. L’UDC s’est toujours montrée sexiste. Elle a combattu la loi de l’égalité (1995), réclame
depuis des années la liquidation du Bureau fédéral pour l’égalité, affirme, au mépris des faits,
que la question des salaires n’est plus une question de sexe. Considérant l’égalité comme une
idéologie qui vise à l’éclatement des familles et contribue à l’insécurité (!), elle a voté contre
toutes les mesures concrètes pour faire appliquer la loi. L’UDC participe en première ligne au
démantèlement social, qui pénalise tout particulièrement les femmes, comme c’est le cas pour
de la dernière révision de l’AI. Elle s’est opposée ces dernières années à la décriminalisation de
l’avortement, à l’assurance maternité, au partenariat enregistré pour les couples homosexuels.
A Genève, elle a combattu le subventionnement de l’association Viol-Secours. Quant au brillant
conseiller fédéral qui la représente, incapable de lire le contrat concernant le Gripen dont il est
chargé « parce que c’est compliqué, technique, plein d’annexes et en anglais », il a donné la
mesure de sa vision des femmes dans la préface du livre Nestwärme für Kinder de Rösli Zuppiger
(éd. Zürcher Oberland, Wetzikon), qui célèbre les vertus des femmes au foyer. Ueli Maurer y compare
les humains aux chevreuils : c’est la femelle qui s’occupe du faon, pas le mâle. Avec des arguments
pareils, on n’est pas sorti-e de l’âge de la pierre… La vision d’enfants heureux parce que
leur mère reste à la maison est naturellement idyllique. Une femme frustrée ne sera guère stimulante,
alors qu’une femme épanouie par son travail aura une présence de qualité quand elle
retrouvera ses enfants, et c’est ce qui compte. Il me paraît aberrant de réduire les femmes à leur
seule fonction reproductrice, quand le taux de fécondité suisse est de 1,5 enfant par femme.
Rappelons enfin qu’un mariage sur deux se solde par un divorce et qu’alors, les mères sont bien
obligées de travailler. Il est donc absurde de s’accrocher à une représentation de la femme ange
du foyer, qui n’a été l’apanage, si l’on peut dire, que de la bourgeoisie. Les paysannes, les
ouvrières ayant toujours dû travailler.

Le PLR est gravement fautif d’avoir tourné casaque, pour une raison qui m’échappe d’ailleurs.
L’économie a besoin de l’apport des femmes, d’autant que les entreprises où elles représentent
plus de 35% dans les conseils d’administration se portent mieux que les autres. Beaucoup de
femmes, une fois devenues mères, renoncent à leurs études ou à leur travail, ce qui représente
un gâchis du potentiel des femmes et des pertes pour l’économie. Selon les statistiques, 72% des
Suissesses travaillent, et 60% à temps partiel. Aujourd’hui, il manque 120’000 places de crèches.

Personnellement, je pense qu’aucun adulte ne devrait renoncer à travailler. Gagner sa vie est
synonyme d’autonomie et il me semble discutable qu’une femme formée, intégrée dans le
monde du travail, y renonce à la naissance d’un enfant. Car ce faisant, elle régresse à l’état de
mineure, dépendant du salaire de son mari, comme, enfant, elle dépendait de celui de son père.
Mais pour cela, il faut que les parents puissent bénéficier d’infrastructures qui prennent les
enfants en charge.