Les députés recalent Franz Weber

VAUD • Le groupe La Gauche est le seul partisan unanime à l'initiative « Sauver Lavaux III ».

Le groupe La Gauche est le seul partisan unanime à l’initiative « Sauver Lavaux III ».

Ah les trémolos pour évoquer Lavaux ! Le paysage, le dur labeur des vignerons, l’harmonie des coteaux, le merveilleux UNESCO. Un socialiste parodie Ramuz, Philippe Leuba déclame laborieusement un texte du poète vaudois, ceux qui avaient durement ferraillé contre l’initiative de protection de Lavaux font d’humbles mea culpa et remercient Franz Weber… tout ça pour refuser par 124 voix contre 12 et 2 abstentions la 3ème initiative d’Helvetia Nostra, jugée trop contraignante.

Les arguments des auteurs de l’initiative qui relèvent des erreurs dans le rapport de la commission sont balayés d’un revers de main et de péremptoires raisonnements juridiques. C’est par l’ironie que les commissaires qui ont voté le refus d’entendre les représentants de l’initiative réfutent leurs regrets : « Ils n’avaient qu’à nous écrire ». Le Conseil d’Etat, sous l’impulsion de Philippe Leuba – qui se targue de ses origines proches du milieu vini-viticole et qui habite Chexbres – propose un contre-projet. Les députés, pourtant peu habités à cette pratique, ont décidé de mettre de l’eau dans le vin de l’initiative et la grande majorité a soutenu ce coupage inaccoutumé qu’est le contre-projet.

Petit historique d’une saga

Il faut rappeler que la région de Lavaux revient de loin. La première initiative de Lavaux date de 1972. Elle avait été soutenue activement par le POP. Le tollé avait été général dans la région et les combats inénarrables. Mais le peuple avait accepté l’initiative en 1975 et la protection de Lavaux inscrite dans la Constitution. Or, lors de la révision de la Constitution vaudoise, cet article avait disparu sous prétexte qu’une loi suffisait à garantir la protection. Nouvelle initiative, nouveau succès spectaculaire : 80% de oui en 2005. En 2007, l’UNESCO inscrivait Lavaux à son patrimoine. Nouvelle initiative en 2009 « Sauver Lavaux III » contre le bétonnage insidieux de la région, considérée comme invalide par le Conseil d’Etat de l’ancienne majorité, mais validée de justesse par le Grand Conseil, y compris par le PS. Recours des opposants de la région auprès de la Cour constitutionnelle qui invalide l’initiative. Recours de Franz Weber et des Verts auprès du TF qui déclare l’initiative valide en 2011. Entre-temps, le Grand Conseil avait voté une loi de protection de Lavaux entrée en vigueur en 2012. Aujourd’hui, le Conseil d’Etat propose un contre-projet avec retard, l’initiative sera soumise à votation 4 ans après son lancement alors qu’elle avait deux ans pour être proposée au peuple. Mais, tout le monde paraît s’en ficher.

Pressions et dogme de l’autonomie des communes

Il n’y a actuellement pas moins de 250 demandes de construire en attente dans le périmètre de Lavaux, dont 71 maisons et locatifs, moult parkings et autres piscines. Les habitués du trajet entre Lausanne et Chexbres peuvent déjà se faire une idée de ce que représentent les constructions des « merveilleuses » villas déjà autorisées… Les opposants à l’initiative clament qu’on mettrait Lavaux « sous cloche » pour en faire « un musée et non un lieu vivant ». Ils affirment que l’Hôpital de Lavaux ne pourrait être agrandi comme aussi un EMS. Or à la simple lecture de l’initiative rédigée, on voit que de tels projets pourraient être autorisés par le Conseil d’Etat. Mais ce qui gêne en réalité, c’est que la sainte autonomie des communes serait égratignée, autonomie des communes qui est en revanche pleinement garantie par le contre-projet du Conseil d’Etat. C’est là que la chatte a mal au pied. La nouvelle répartition des dicastères du gouvernement fait que deux conseillers d’Etat sont en charge de ce dossier, le libéral Philippe Leuba et la verte Béatrice Métraux. D’où une crise de conscience des Verts qui déclarent ne pas pouvoir prendre position à la majorité avant le vote final, voire voter deux fois oui. Mais pas de tels cas de conscience au PS, qui est comme on le sait devenu totalement gouvernemental. Le groupe La Gauche est donc le seul à avoir soutenu l’initiative à l’unanimité. Le deuxième débat aura lieu mardi.