Colombie: Le chemin est encore long!

Il faut le dire • Le 23 septembre dernier, les médias internationaux tournaient leurs yeux vers la Colombie, pays généralement oublié dans le flot d'informations dominant. «La Colombie sur le point de conclure la paix avec les FARC», pouvait-on lire en gros titres. Le jour précédent, le président Juan Manuel Santos avait annoncé à la tribune de l'ONU que le conflit était «en passe d'être véritablement réglé», en promettant que la paix serait signée dans les 6 mois...

Le 23 septembre dernier, les médias internationaux tournaient leurs yeux vers la Colombie, pays généralement oublié dans le flot d’informations dominant. «La Colombie sur le point de conclure la paix avec les FARC», pouvait-on lire en gros titres. Le jour précédent, le président Juan Manuel Santos avait annoncé à la tribune de l’ONU que le conflit était «en passe d’être véritablement réglé», en promettant que la paix serait signée dans les 6 mois.

Cette annonce fait suite à un accord sur la question de la justice transitionnelle dans le pays, censé régler la façon dont les crimes commis au cours de 50 ans de conflit seront jugés. Ce dernier prévoit la création d’une juridiction spéciale pour la paix, qui jugera «tous ceux qui de manière directe ou indirecte ont participé au conflit armé interne, FARC-EP et agents de l’Etat compris».

Si, au niveau international, les FARC sont souvent perçus comme le principal acteur du conflit, il semble en effet nécessaire de rappeler que l’enjeu principal d’un tel accord réside bien dans la façon dont seront jugés les crimes commis par les paramilitaires et agents étatiques: en particulier les cas de falsos positivos, ces paysans assassinés par l’armée et déguisés en guérilleros pour gonfler les statistiques guerrières de l’Etat, ainsi que les massacres commis par les groupes paramilitaires, qui ont provoqué le déplacement massif de populations. Officiellement démobilisés en 2007, ces derniers existent toujours sous d’autres formes, et les milieux qui leur étaient liés (grands propriétaires terriens et narcotrafiquants notamment), également visés par la nouvelle juridiction mise en place, ont encore une grande influence, notamment à travers le parti «Centro democratico» d’ Alvaro Uribe. L’ancien président s’est du reste ouvertement opposé à l’accord du 23 septembre.

Sur le terrain, cette influence se traduit par des assassinats et menaces à l’égard de défenseurs des droits humains qui n’ont jamais cessé, les acteurs du processus de restitution des terres aux 6 millions de déplacés étant particulièrement visés.

S’il faut saluer la possible signature d’un accord de paix, il ne s’agit donc pas, pour la communauté internationale, de détourner les yeux, comme le souhaiterait sans doute M. Santos pour attirer encore plus d’investisseurs étrangers. Car c’est bien lorsque l’application des décisions sera effective que l’on pourra véritablement parler de paix.