La Suisse tradera-t-elle plus blanc?

Mobilisation • Le contre-sommet sur les matières premières se tiendra ce week-end à Lausanne. Pour ses organisateurs, la Suisse doit se doter d’outils contraignant les multinationales à respecter les droits humains.

La semaine prochaine se tiendra à Lausanne la sixième édition du traditionnel «Global commodities summit», organisé par le Financial Times. La manifestation réunira du 27 au 29 mars les géants du commerce des matières premières au Beau-Rivage Palace. Mais ce grand raout de mastodontes du négoce comme Glencore, Mercuria ou Gunvor, dont beaucoup sont basés en Suisse, n’est pas du goût de tous. Ainsi, un contre-sommet se tiendra le 25 mars au centre socioculturel Pôle Sud.

«A l’échelle planétaire, la Suisse est la première place de négoce des principales matières premières. Sa responsabilité quant aux dégâts sociaux et environnementaux qui en résultent est donc indiscutable», annonce le Collectif contre la spéculation sur les matières premières, organisateur de l’événement, dans un communiqué. «Nous demandons que cesse ce pillage organisé des ressources depuis la Suisse, que les droits des populations locales soient respectés et qu’elles reçoivent la part des richesses qui leur revient», poursuit-il.

Appel à soutenir l’initiative pour des multinationales responsables

Le collectif organisateur appelle à soutenir l’initiative «Pour des multinationales responsables», qui a été déposée à la Chancellerie fédérale à la fin 2016. Soutenue par 80 organisations de la société civile, elle demande des règles contraignantes pour que les entreprises respectent les droits humains et l’environnement aussi dans leurs activités à l’étranger, notamment via l’introduction dans la loi d’un devoir de diligence. Celui-ci obligerait les sociétés à vérifier si leurs activités à l’étranger conduisent à des violations des droits humains ou des standards environnementaux, à prendre des mesures pour y remédier et à rendre des comptes, faute de quoi elles pourraient être amenées à répondre de leurs manquements devant les tribunaux suisses.

«Le Conseil fédéral souligne le devoir des multinationales de respecter les droits humains et les standards environnementaux, mais il ne mise pour cela que sur la bonne volonté des firmes. Les scandales qui ont défrayé la chronique ces dernières années montrent toutefois que les initiatives volontaires ne suffisent pas», écrit Amnesty International, l’une des organisations initiantes, sur son site internet. Du côté des organisateurs du contre-sommet de ce week-end, on cite l’exemple de l’enquête récemment rendue publique par l’ONG Public Eye sur le commerce du pétrole organisé depuis la Suisse.

Un plan d’action national peu ambitieux
En décembre 2016, le Conseil fédéral a rendu public un plan d’action national (PAN) de mise en œuvre des principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits humains. Celui-ci propose «50 instruments visant à promouvoir le respect des droits de l’homme auprès des entreprises suisses, qu’elles soient actives sur notre territoire ou à l’étranger», explique le Conseil fédéral dans un communiqué. Le plan ne convainc toutefois pas les organisations à l’origine de l’initiative pour des multinationales responsables, qui l’ont qualifié de «très décevant» ou de «plan d’action sans action».

«D’entrée de jeu, le texte exclut l’adoption de mesures contraignantes», ont-elles dénoncé, soulignant qu’il ne contenait que 6 mesures véritablement nouvelles. Celles-ci «se limitent à la promotion et à l’amélioration des activités existantes du DFAE», ajoutent-elles, regrettant que «presque aucune des principales propositions de la société civile n’a été intégrée dans le texte final». Notamment, l’obligation de diligence en matière de droits humains n’apparaît pas.

Une manifestation prévue

La journée du 25 à Pôle sud s’organisera autour d’une conférence, suivie de présentations et débats en plus petits groupes. René Lehnherr, l’un des instigateurs du tribunal citoyen sur Monsanto, qui s’est tenu à a Haye en octobre dernier, sera présent pour évoquer cette expérience. Le réalisateur Suisse Daniel Schweizer, auteur d’une trilogie sur le thème du commerce des matières premières sera également de la partie. Une projection de son dernier film Trading Paradise est prévue en soirée aux Galeries du cinéma. Enfin, une manifestation est prévue le lundi 27 mars à 18h. Depuis la Place Saint-François, elle rejoindra le Beau-Rivage Palace, où se réunissent les négociants et leurs financiers.

programme sur www.stop-speculation.ch