Un 1er Mai contre la casse dans les retraites

Genève • Se démarquant des faîtières syndicales nationales, qui approuvent le paquet Berset, le comité des manifestations du 1er Mai à Genève met le paquet contre le projet de réforme des retraites Prévoyance 2020.

«La hausse de la TVA incluse dans le projet Berset imposait un référendum obligatoire, mais nous, nous sommes opposés à l’entier de la loi soumise au vote le 24 septembre», annonce Paolino Casanova, militant syndical. «Une partie de la droite est opposée au projet, parce qu’elle est contre la revalorisation des retraites de 70 francs pour les nouveaux retraités, mais nous voulons faire aussi entendre un non de gauche à ce mauvais plan. Il faut aussi que les centrales syndicales nationales prennent en compte cette protestation de la base», renchérit Jocelyne Haller, membre de solidaritéS et députée Ensemble à Gauche au Grand Conseil.

Une journée de récolte de signatures
Contrairement aux directions nationales de l’USS, d’Unia, du SEV, de Syndicom ou de Travail.Suisse, qui soutiennent la réforme, le comité du 1er Mai genevois, qui regroupe une trentaine d’organisations, a décidé, tout comme la CGAS, de faire de leur opposition au paquet Berset le centre des revendications du 1er Mai, avec une grande journée de récoltes de signatures pour décrocher les 50’000 paraphes nécessaires avant juillet.

«Nous sommes contre toute dégradation des rentes. La défense des retraites dignes est au cœur du combat des syndicats et de la gauche», prévient, en préambule de conférence de presse, Manuela Cattani, présidente du comité, de la CGAS et secrétaire générale du SIT. Et de rappeler que l’année précédente, le comité avait axé le 1er Mai sur un soutien à l’initiative AVS+, qui demandait une augmentation de 10% des rentes AVS, proposition rejetée par le peuple à l’automne 2016. Pour elle, la réforme comporte quatre points noirs. Cela commence par l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes, qui passera de 64 à 65 ans. «PV 2020 coûtera cher aux femmes. En faisant perdre en moyenne 24’000 francs aux femmes par cet allongement de cotisation d’un an, c’est près de 1,3 milliard de francs que l’on prend sur leur dos», insiste Manuela Cattani. «On ne doit pas mettre le doigt dans cet engrenage qui conduira, comme la droite le propose déjà, à la hausse de l’âge de la retraite de tous à 67 ans, alors qu’il faudrait plutôt baisser l’âge de la retraite», précise la syndicaliste.

«Ce paquet est particulièrement indigeste pour les femmes, alors même que les inégalités salariales hommes-femmes perdurent», souligne de son côté, Christian Zaugg , président du DAL (Défense des aînés, du logement de l’emploi et du social). Poursuivant sur sa lancée, Manuela Cattani dégomme aussi le bonus de 70 francs octroyé aux nouveaux retraités. «Il n’y aura rien de rien pour les 2,3 millions de retraités actuels. Ce qui divisera les retraités en deux catégories», critique-t-elle. «Le paquet Berset renforce les inégalités entre anciens et nouveaux retraités, personnes retraitées et personnes à l’AI. La hausse des prélèvements n’est même pas compensée par une indexation des prestations complémentaires. Il faut arrêter ces dérives, retrouver le cap du progrès social et rappeler aux faîtières syndicales qu’il faut abandonner cette logique de fatalisme et de pseudo-raison face à cette dégradation de la protection vieillesse», insiste Jocelyne Haller.

«Un véritable autogoal»
Les manigances sur le deuxième pilier provoquent aussi la critique du comité du 1er Mai. L’augmentation des cotisations du 2ème pilier, couplées à celles sur l’AVS et à la baisse du plancher de coordination de 21’500 francs à 14’100 francs va réduire le revenu disponible pour les bas salaires, analyse la faîtière cantonale. «C’est un véritable autogoal», assure Manuela Cattani.

Autre point de litige, la baisse du taux de conversion des rentes du 2ème pilier, qui passera de 6,8% à 6%. «Prévoyance 2020 n’assure pas de stabilité des rentes. Avec la baisse du taux de conversion pourtant refusée en 2010 par le peuple, il faudra travailler plus longtemps pour obtenir la même rente», décrypte Paolino Casanova. «La réforme est inacceptable parce qu’elle prévoit également le relèvement de l’âge minimum donnant droit à une rente du 2ème pilier qui passe de 58 à 62 ans», s’insurge encore le comité, qui rejette en bloc le paquet. Au-delà de l’opposition à cette réforme, le comité, qui invite tout le monde à Plainpalais, aura des motifs de faire la fête, notamment de célébrer la victoire contre l’inique troisième réforme des entreprises (RIE III) et l’opération de régularisation des sans-papiers. «La lutte a payé. Papyrus a permis à des milliers de gens de sortir de la clandestinité», se félicite Manuela ­Cattani.

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Fronde contre PV2020 en Suisse romande

Le paquet de réforme des retraites PV 2020 passe plutôt mal en Suisse romande. A l’occasion du 1er Mai, l’union syndicale vaudoise (USV), qui fait partie du comité référendaire contre la loi, récoltera à Lausanne des signatures pour renvoyer le paquet à l’expéditeur. «La majorité des composantes syndicales de l’USV s’est positionnée franchement contre cette réforme. Pour ce 1er Mai, nos mots d’ordre sont non à l’augmentation de l’âge de la retraite, non à la baisse des rentes et du pouvoir d’achat», explique encore Valérie Borloz Schaller, secrétaire de l’organisation.

Position plus nuancée à Neuchâtel où l’Union syndicale cantonale de Neuchâtel (USCN) n’a finalement pas pris position. «Je peux cependant officiellement confirmer que le comité du 1er Mai des Montagnes neuchâteloises (qui organise la journée d’action du 1er Mai au Locle) a pris formellement position sur la question de Prévoyance 2020. La position est la suivante: refus de Prévoyance 2020 et soutien au référendum», garantit Emmanuel Farron, secrétaire de l’USCN. A Fleurier et Neuchâtel, les comités locaux du 1er Mai sont contre la réforme et feront une récolte de signatures.

«L’union syndicale jurassienne et du Jura bernois (USJ) n’a pas formellement adhéré au comité référendaire national contre PV2020 et nous ne thématiserons pas cette problématique le 1er Mai. Les militants de nos différentes organisations qui sont majoritairement contre la réforme pourront cependant récolter des signatures», assure, de son côté, Thierry Sauvain, secrétaire syndical au SSP et secrétaire de l’USJ.