Pas d’acquis sociaux sans audace!

Premier Mai • Prévoyance vieillesse 2020 sera au cœur des manifestations du 1er Mai en Suisse. Opposés au relèvement de l’âge de la retraite des femmes, les militants feront signer leur référendum, tandis que les dirigeants nationaux des syndicats et du PS profiteront de la journée pour convaincre des bienfaits de la réforme.

C’est presque un hold-up que les dirigeants de la gauche et des syndicats à Berne ont lancé sur les manifestations du 1er Mai en Suisse. Ils entendent en effet utiliser la journée revendicative pour promouvoir Prévoyance vieillesse 2020. La direction de l’Union syndicale suisse (USS) a ainsi fait de PV2020 le thème central du traditionnel «Appel du 1er Mai» en développant tout un argumentaire en faveur des «importantes avancées sociales» que contiendrait le projet. De son côté, le secrétariat du Parti socialiste suisse (PSS) a choisi la date du 30 avril pour communiquer le résultat de sa consultation interne, comme pour donner de l’écho le lendemain 1er mai à l’approbation attendue par le principal parti de gauche à cette réforme «équilibrée».

C’est pourtant le 1er Mai que le mouvement ouvrier et socialiste doit montrer son unité sur ses luttes, ses revendications et ses projets. Or, une forte opposition s’est formée à l’encontre de PV2020, refusée à 46% des délégués des syndicats Unia et SSP. Plusieurs sections syndicales, des unions syndicales cantonales, des organisations comme le Parti suisse du Travail – POP, solidaritéS ou l’AVIVO, et de nombreux militants se sont engagés dans un référendum. Ce n’est donc pas très correct de la part des dirigeants, mais c’est à l’image des manigances et des pressions qui ont accompagné ce dossier dès le début.

Cotiser plus et plus longtemps pour toucher moins

Certes, comme nous l’avons dit, tout n’est pas à jeter dans PV2020, qui renforce dans une certaine mesure l’AVS et ceci au détriment du 2ème pilier. 70 francs supplémentaires par mois ne sont pas rien pour des «petits vieux» obligés de recourir aux prestations complémentaires. Mais cette augmentation ne s’appliquera qu’aux futurs rentiers, les retraités actuels qui peinent à joindre les deux bouts ne verront aucune amélioration de leur situation. Au contraire, ils subiront comme tout le monde une hausse de la TVA. Un comble. Et, outre le relèvement inadmissible à 65 ans de l’âge de départ à la retraite des femmes, PV2020 induira une baisse des rentes du 2ème pilier. La majorité des salariés devront cotiser davantage et même plus longtemps pour les femmes, pour, au final, toucher moins. Comme si c’était aux travailleurs de raquer alors que les grands patrons et les actionnaires s’en mettent plus que jamais plein les fouilles.

Le moindre mal?

On peine donc à trouver «l’équilibre» et les «avancées sociales» vantées par le PSS et l’USS. Ultime argument, on nous dit que c’est un moindre mal, qu’en cas d’échec de la réforme la droite déboulera avec la retraite à 67 ans pour tous. Admettons. Seulement, sans prise de risques, sans audace, le 1er Mai même n’existerait pas. Au début, on tirait sur les ouvriers qui osaient sortir manifester dans la rue et c’est encore ainsi dans certains pays. Sans audace, l’AVS elle-même n’aurait pas vu le jour. Rappelons qu’il a fallu une grève générale en 1918 pour l’inscrire dans l’agenda politique, puis de nombreuses grèves ouvrières au sortir de la dernière guerre, une forte mobilisation syndicale et politique pour parvenir à l’arracher. Nos grands-parents avaient plus de courage! Et quel manque flagrant de confiance dans le peuple! Il est pourtant possible de convaincre et d’emporter l’adhésion, comme l’a montré la victoire sur la Troisième réforme de l’imposition des entreprises.

Un vaste mouvement de progrès social
Les militants ont donc de bonnes raisons de faire signer le référendum. Mais si le 1er Mai est une journée d’action, c’est aussi une fête, celle du mouvement syndical international, qui constitue la principale force de résistance au rouleau-compresseur capitaliste. Partout sur la planète, sous le ciel des démocraties comme dans l’ombre des dictatures les plus féroces, dans les banlieues ouvrières, les centres d’affaires ou les bidonvilles du marché mondialisé, des travailleurs et des syndicalistes luttent pied à pied. Nous pouvons nous réjouir de l’existence de ce vaste mouvement pacifique et de progrès social, qui, malgré les capitulations, les défaites et les vicissitudes de l’histoire, offre de l’espoir pour l’avenir de l’humanité. Bon 1er Mai à tous et toutes!