Quand le monde politique s’égare

Neuchâtel • A l’heure où la population s’éloigne de plus en plus du monde politique, il faut veiller d’autant plus à sa représentation. Le cas français ou celui, près de nous, de la commune de la Grande Béroche en sont un mauvais exemple.

Drôle d’époque. En France, il semble qu’il suffit d’être un ancien banquier talentueux soutenu par diverses personnes issues du même milieu, et de prétendre représenter des «forces nouvelles» – qui en réalité ambitionnent de rendre la marchandisation du monde encore plus efficace – face au fiasco des partis politiques traditionnels, pour connaître un succès électoral fulgurant. Pourtant, la nouvelle Assemblée nationale ne sera que peu représentative. Elle ne comptera aucun ouvrier.

Les informations diffusées à ce sujet ne disent pas si la précédente assemblée en comptait plus. Dans tous les cas, on observe partout que les ouvriers se font de plus en plus rares dans les instances politiques et même au sein des partis censés défendre leurs intérêts. Pas étonnant dès lors que la participation électorale soit située au-dessous de la moyenne, en France comme ailleurs. Les élus, censés représenter le peuple dans toutes ses composantes sociales, devraient se préoccuper en priorité de cette démocratie en berne et chercher à la réformer pour la rendre davantage crédible.

Une représentation géographique inégale
Le canton de Neuchâtel ne fait pas exception et doit lui aussi faire face à une participation limitée tout comme à la difficulté à trouver des candidates et des candidats prêts à s’engager en politique. Pour faire face à ce problème, le Conseil d’Etat envisage toutefois une curieuse solution: réduire le nombre de députées et députés et de supprimer les districts. Ce procédé permettra, certes, de répondre au slogan «un canton – un espace», si chéri par le Conseil d’Etat. Mais va-t-il véritablement renforcer la confiance entre les autorités et les citoyens? L’exemple de la toute nouvelle commune de la Grande Béroche, issue de la fusion récente de plusieurs petites communes et qui élisait le 18 juin dernier ses autorités, laisse à ce titre songeur.

A l’issue du scrutin, le PLR a obtenu la majorité des voix (19 sur 41), mais pas la majorité absolue. La représentation des différentes régions de la nouvelle commune s’avère toutefois inégale. Ainsi, l’ancienne commune de Bevaix sera mal représentée dans le nouveau législatif. Ses habitants, qui représentent le 42% de la population de la nouvelle commune, devraient proportionnellement être représentés par environ 17 élus. Ils n’en auront cependant que 6, à majorité Verte. Bevaix fait donc le même résultat que Montalchez, la plus petite ancienne commune. Le système prévu pour garantir à chaque commune sa représentation au sein du nouveau parlement n’empêche pas les distorsions, dont certains se plaignent déjà.

Quel lien avec nos réflexions sur la participation? Le risque, c’est que le peuple ne s’y reconnaisse pas et de moins en moins. D’ailleurs, seuls 33,5% des électrices et électeurs potentiels ont participé à ce qui devait être un changement moderne pour l’avenir! Décidément il y a quelque chose qui semble ne plus fonctionner, et ce au cœur de l’une des plus vieilles démocraties du monde!