Les coopératives reviennent en force

Alternatives • Les coopératives sont-elles l’avenir de l’humanité? A l’invitation du journal «Pages de gauche», plusieurs intervenants ont participé fin juin à un débat sur la question dans la salle commune de la coopérative d’habitation UV, à Genève.

En préambule, la syndicaliste et membre du comité du journal socialiste Anne Holenweg a rappelé combien les coopératives étaient liées au mouvement socialiste au même titre que la lutte syndicale ou l’action politique. Ces structures économiques alternatives, qui ne veulent pas favoriser à tout prix la quête du profit maximum et promeuvent l’autogestion et la participation de tous les coopérateurs, se sont développées dans la deuxième partie du XXe siècle. «Au XXe siècle, on assiste à une fragmentation, une sectorisation ou une spécialisation progressive. Des coopératives agricoles, de distribution, de consommation (comme… La Coop ou Migros), bancaires (comme Raiffeisen) et d’assurance, de construction, de logement ou culturelles apparaissent», relève la Renanaise.

Tombée un peu en désuétude, la forme coopérative connaît pourtant un regain d’intérêt à l’heure des multiples crises du capitalisme et face au chômage de masse. S’alliant au courant de l’économie sociale et solidaire, elle essaime aujourd’hui à nouveau dans des projets de coopératives de logement ou énergétiques dans le Nord ou dans des projets agricoles communs et de financement alternatif dans le Sud. Au point que l’OIT (Organisation internationale du travail) a créé une unité spéciale dédiée aux coopératives. Représentant de l’organisation, Guy Tchami a expliqué comment elles pouvaient servir à proposer un travail décent et rémunérateur pour les «non-inclus», plus facilement que sur le marché du travail privé traditionnel. L’organisation internationale, qui a édicté la recommandation 193 sur le sujet, n’hésite pas à apporter son expertise auprès des Etats qui le demandent. Il a aussi rappelé que la création d’une coopérative n’est pas si facile notamment du fait de problèmes internes comme les problèmes de gestion, notamment dans les coopératives de travailleurs, ou externes, comme les obstacles juridiques.

«On nous taxe trop souvent de ‘bobos’»
Des initiatives existent pourtant localement, notamment des projets de coopératives de logement soutenus par des pouvoirs publics de gauche. Habitant d’un logement de la Codha (Coopérative de l’habitat associatif) à Lausanne, Benoît Biéler a ainsi expliqué que la capitale vaudoise prévoyait de mettre un quart des terrains du futur écoquartier des Plaines-du-Loup en droit de superficie pour les coopératives d’habitants. Président de la coopérative d’habitation UV, Julien Reinhard a quant à lui évoqué la nécessité de changer l’image de cet habitat alternatif et les aprioris qui lui sont liés. «On nous taxe encore trop souvent, même à gauche, d’être des ‘bobos’ et de cultiver l’entre-soi, ce qui n’est pas le cas», explique-t-il. «La forme coopérative est un modèle hypercréatif, que cela soit en termes de partage, de solidarité, de protection de l’environnement ou de démocratie participative», insiste Benoît Biéler.

Guy Tchami, Manuel sur les coopératives à l’usage des organisations de Travailleurs, BIT, Genève, 139 p, 2004