Les tensions entre Haut et Bas ne sont pas près de disparaître

Neuchâtel • Les résultats des votations du 24 septembre accroissent la division du canton. L’acceptation de la suppression des districts éloignera la politique des citoyens et le refus de l’Hôtel judiciaire renforce une tendance à privilégier les investissements sur le Littoral.

Neuchâtel devait se prononcer sur trois objets le 24 septembre dernier. Le POP neuchâtelois prend acte des décisions populaires mais regrette un taux de participation de 40% seulement sur des objets qui façonnent le futur de tous les habitants du canton. «Cette relative faible participation fait apparaître un problème de légitimité démocratique», considère son secrétaire cantonal German Osorio.

Un éloignement des habitants
Pour le POP, l’objet principal était la réforme des institutions, incluant notamment la suppression des districts, à laquelle il était fermement opposé. 58% des votants en ont décidé autrement. Le POP pourrait bénéficier de cette nouvelle situation puisque la baisse du quorum passant de 10 à 3% lui permettra d’avoir des élus dans davantage de communes. De plus, la fin des apparentements entre partis permettra la présentation aux citoyens de lignes politiques plus claires.

Dans son communiqué le POP rappelle avec un peu d’ironie, qu’il avait anticipé cette dernière mesure en refusant l’apparentement avec les socialistes lors des dernières élections cantonales! Ces éléments positifs sont toutefois ternis par la suppression des districts, qui provoquera un éloignement de la politique par rapport aux habitants. Les petites formations auront davantage de difficultés à présenter leurs listes dans les communes où elles ne sont que faiblement présentes. Ainsi, pour les popistes, cette décision risque de renforcer les élites et les experts au détriment des personnes provenant de la base de la société, qui apportaient une vision bien concrète de leurs conditions de vie.

Autre objet soumis au vote, le report de l’harmonisation des impôts n’a été accepté que par 50,3%. Si les communes industrielles sont momentanément soulagées par la décision, le vote laisse apparaître la pression du Bas contre le Haut. Les opposants à ce report voulaient en effet obtenir immédiatement le gain fiscal de la nouvelle répartition de l’impôt des frontaliers. Durant la campagne, leur affiche affirmait d’ailleurs: «31 communes sur 36 payent l’injustice»! Une position soulignant, s’il en était encore besoin, la fracture du canton.

Suite au vote, la radio neuchâteloise affirmait que les villes du Haut étaient les grandes bénéficiaires de cette décision. Elles ne sont pourtant que provisoirement soulagées puisque ce n’est pas la répartition fiscale qui a été refusée mais seulement un report de sa mise en place en vue de mieux étudier son impact. Dans son communiqué, le POP estime que cette petite victoire du bon sens devra se transformer en intelligence, afin que davantage de respect existe entre toutes les communes pour atteindre un début de réconciliation cantonale.

L’origine des difficultés financières
Enfin, le refus par 59% du corps électoral du Nouvel Hôtel judiciaire prévu à La Chaux-de-Fonds illustre les clivages existants au sein du canton. Bien que d’une importance relative sur la ville de La Chaux-de-Fonds, ce projet aurait un peu corrigé une politique d’investissement largement orientée vers le Littoral. Certes, les référendaires, provenant des milieux juridiques du bas du canton, insistaient sur les 50 millions du coût de ce projet par rapport aux difficultés financières du canton.

Ils ont utilisé un argument simple pour convaincre les citoyennes et citoyens qui subissent les réductions des tâches publiques d’un Conseil d’Etat sous le prétexte de manque d’argent. Personne toutefois n’a souligné que c’est la réduction des impôts des entreprises qui occasionne des dégâts dans les caisses publiques. Quelques jours avant la votation, Jean Guinand, ancien Conseiller d’Etat libéral, regrettait publiquement qu’une solution réunissant tous les milieux intéressés et prévoyant deux instances judiciaires, l’une en bas et l’autre en haut, ait été rejetée par le Conseil d’Etat! Pour le POP, il faudra peut-être y revenir.

En conclusion de ce scrutin, le POP est inquiet du manque de clairvoyance du Conseil d’Etat qui poursuit sa politique autocratique face au besoin d’équilibre auquel a droit la population du canton. Ses propositions ne font que de jeter de l’huile sur le feu des divisions et des incohérences au sein du canton.