L’hôpital continue à déchirer les Neuchâtelois

Neuchâtel • Suite à des informations diffusées par le collectif défendant deux hôpitaux complémentaires, les législatifs des villes du Haut ont manifesté leur inquiétude quant au respect du vote populaire du 12 février. La direction d’HNE dément.

Le 12 février dernier, la majorité du peuple neuchâtelois a décidé qu’elle voulait deux hôpitaux complémentaires dans le canton. Suite à cela, le Conseil d’Etat a institué un groupe de travail chargé «d’émettre d’ici à l’été des propositions concernant les principes d’organisation future conformes à l’initiative et les modalités de transition vers cette nouvelle organisation», comme le rapporte l’Impartial du 16 février.

Simultanément, le gouvernement confirmait Madame de Vos Bolay à son poste de présidente du Conseil d’administration. Dans un article paru le 24 mars, Laurent Kurth précisait qu’il ne s’agissait pas pour le Conseil d’administration de mettre en œuvre l’initiative, mais d’assurer la conduite des affaires courantes, dans l’attente de la concrétisation de l’initiative. Dans un autre article du 7 juillet, il confirmait que «rien ne bougera dans l’organisation actuelle avant que les décisions politiques ne soient prises». La commission a rendu son travail cet été et le Conseil d’Etat a nommé une nouvelle commission ayant pour tâche de suivre à l’avancement des travaux de réorganisation.

L’inquiétude du Haut persiste
Depuis, et jusqu’à ce mercredi, date à laquelle le Conseil d’Etat a rendu publiques les premières orientations de la nouvelle organisation hospitalière, la population n’avait pas été informée. Mais le collectif défendant deux hôpitaux complémentaires, lui, a suivi la situation de près.

Ainsi, dans un communiqué diffusé il y a quelque temps, il dénonçait la poursuite du démantèlement de l’hôpital des Montagnes, listant différentes observations: transfert du matériel médical, informatique, de bureau, ainsi que du personnel en direction de l’Hôpital Pourtalès (PTS) à Neuchâtel, disparition au 1er janvier 2018 de la consultation d’angiologie du site de La Chaux-de-fonds en destination de PTS, création d’un centre du sommeil au même endroit, création d’un centre de la douleur chronique sur le site de PTS, pose de gabarits pour accueillir le nouveau centre de scanner sur le même site, rénovation des urgences sur le site de PTS (2.9 millions), démantèlement du service d’endoscopie récemment rénové du site de La Chaux de Fonds, transfert des opérations stationnaires d’urologie à l’hôpital privé de la Providence par manque de place dans les blocs de Pourtalès alors que les blocs neufs de la Chaux-de-Fonds sont sous-occupés, baisse majeure de l’activité des blocs opératoires de la Chaux-de-Fonds non seulement en nombre de cas mais aussi en durée d’utilisation.

Ces indications ont jeté un froid parmi la population des Montagnes. Dans une réunion commune, les législatifs des villes du Locle et de La Chaux-de-Fonds ont ainsi chargé leurs exécutifs d’intervenir auprès du Grand conseil pour qu’il oblige le Conseil d’Etat à agir dans le respect de la décision populaire.

Madame de Vos Bolay a réagi vivement à cette démarche en réfutant, via un communiqué, des accusations qu’elle qualifie de «non conformes à la réalité». «L’HNE souhaite rectifier des assertions mensongères ou délibérément imprécises», assène le communiqué. Et de souligner par exemple que la consultation d‘angiologie n’a pas été transférée à Neuchâtel, mais que les deux médecins qui en avaient la charge ont décidé de recentrer leur activité sur leurs cabinets privés pour des motifs de surcharge professionnelle. Ou que l’endoscopie n’est pas démantelée, mais ouverte quatre jours par semaine contre cinq auparavant depuis le mois de mai, pour «mieux lisser l’activité sur la semaine». Par ailleurs, selon la direction d’HNE, la sous-occupation des blocs opératoires de La Chaux-de-Fonds résulte de la décision de médecins installés dans le Haut de référer leurs patients hors canton, de la démission de chirurgiens au cours des dernières années et de la difficulté d’inciter les patients du Bas à se faire opérer en ambulatoire en Haut. «Cette tendance s’est amplifiée depuis le vote du 12 février et risque encore de s’accroître avec les projets de développement d’acteurs privés (Clinique La Tour, Centre Volta, Clinique Montbrillant)», précise le communiqué.

Celui-ci souligne encore que les consultations spécialisées dans le domaine des douleurs chroniques et des troubles du sommeil qui verront le jour en 2018 sur le site de Pourtalès n’induisent pas d’investissement et devraient éviter des consultations hors canton. Enfin, le communiqué indique que «la répartition des investissements entre les sites principaux de l’HNE est favorable au site aigu des Montagnes, plus ancien», et cite divers travaux effectués, sans toutefois préciser qu’ils ont eu lieu avant le 12 février.

Trop de questions suscitées

On peut dire que l’ambiance ne s’améliore pas et que les renseignements fournis par le communiqué de la présidente soulèvent davantage de questions qu’ils n’apportent de réponses. Pourquoi autant de médecins ont quitté HNE? Pourquoi sont-ils surchargés? Pourquoi des médecins envoient-ils leurs patients hors canton? Autant de faits qui mériteraient des explications.

Pour notre part, nous estimons que les difficultés de l’hôpital ont commencé après la décision du Grand conseil de l’autonomiser, soit de le transformer en établissement de droit public, au début des années 2000 (contre l’avis des députés du groupe PopVertsSol). Concrètement, le Conseil d’Etat est alors devenu le garant financier, le Grand conseil ne pouvant cependant intervenir que par le biais du budget et des comptes. Cette volonté de «privatiser» certains services publics les oblige à être gérés selon les principes de l’économie libérale, où l’argent est au centre des décisions, que ce soit pour développer ou pour réduire leur fonctionnement. Les aspects économiques priment sur le principe de service public.

Pour sortir l’hôpital neuchâtelois de cet imbroglio et pour éviter que le dossier ne soit traité que par communiqués contradictoires, le ministre de la santé pourrait introduire des rencontres régulières entre des représentants du Conseil d’Etat, des trois villes, des vallées et d’HNE. Cela faciliterait l’écoute, qui demeure le seul outil pour apaiser les ressentiments.