L’austérité du Conseil d’Etat ne passe pas

Neuchâtel • Les mesures d’économies prévues par le Conseil d’Etat pour permettre au canton de «retrouver la voie de la prospérité» suscitent la révolte de nombreux secteurs.

L’annonce du programme de législature 2018-2021 du Conseil d’Etat a provoqué comme un coup de tonnerre dans le canton. Afin de «retrouver la voie de la prospérité», soi-disant, celui-ci présente une quarantaine de mesures d’économies. Ainsi, il entend fermer la Haute école de musique, augmenter le nombre d‘élèves par classes, couper dans l’orthophonie, réduire les aides financières aux plus démunis (réduction possible d’un tiers des subsides à l’assurance-maladie et coupes dans les aides aux personnes âgées notamment), ou encore diminuer les subventions à différentes institutions. Il maintient cependant la réalisation de la ligne ferroviaire directe entre le haut et le bas du canton, veut baisser la fiscalité (sic) des personnes physiques pour attirer des contribuables, ambitionne de rester leader dans la haute précision, d’unir les forces, de réduire le chômage et l’aide sociale et d’accroître les investissements!

Une aggravation des dissensions est à prévoir
Le gouvernement fixe quatre axes à sa stratégie: attractivité, prospérité, cohésion et responsabilité. D’habiles expressions «marketing» qui sont cependant rapidement démenties lorsqu’on se penche sur ses propositions concrètes. A-t-il les yeux bouchés? Ne voit-il pas les contradictions dans ses propositions? Comment ose-t-il parler de rassemblement des forces et des régions dans le cadre d’une vision qu’il veut audacieuse et concrète, tout en contribuant directement à écarteler les riches des pauvres et à accroître les dissensions entre communes? Même si le conseiller d’Etat Jean-Nathanaël Karakash affirme que «ce n’est pas de gaieté de cœur» qu’il propose des mesures antisociales, il n’en reste pas moins qu’elles vont encore aggraver les dissensions entre les personnes, les régions et les partis politiques.

Pendant combien de temps la population acceptera-t-elle de courber l’échine face à l’augmentation de la fortune des riches et à l’appauvrissement des plus faibles? Le Conseil d’Etat, et avec lui toute la droite, accompagnée par le parti socialiste, semble incapable d’avoir l’audace de prendre l’argent là où il se trouve pour le mettre là où il faut. Au contraire, il s’entête à favoriser l’accumulation de l’argent là où il est déjà et à continuer à le réduire là où il faudrait qu’il soit pour construire une société humainement équilibrée.

Le vrai courage consisterait à rechercher de véritables moyens pour corriger une direction suicidaire. Même au sein de la droite, l’aggravation de la situation sociale du canton n’est sans doute pas acceptable pour tous. Il faut trouver des réponses audacieuses pour vivre mieux et autrement. Les discussions sur le budget, qui ont débuté cette semaine et se poursuivront les suivantes, seront difficiles. Les élus popistes tenteront d’y faire des propositions constructives.

Multiples mobilisations
La situation actuelle n’est que le reflet de l’incohérence planétaire guidée par les seuls intérêts des forces économiques et financières. Ne pas comprendre que l’humanité ne pourra pas survivre dans un système qui permet aux riches de devenir encore plus riches et aux pauvres de mourir à petit feu dans un environnement dévasté, c’est se boucher les yeux.

Face à ces mesures, la population n’a toutefois pas tardé à réagir. Les professeurs de la Haute école de musique récoltent des signatures pour défendre leur école et se sont manifestés mardi devant le Grand Conseil. Des assistants sociaux étaient également présents pour exprimer leur opposition aux troisièmes mesures d’économies décidées dans leur domaine par le Conseil d’Etat en onze mois.

Ils soulignent dans un communiqué qu’«alors même que la fiscalité des entreprises est une des plus basses de Suisse, le Conseil d’Etat impose à nouveau à celles et ceux qui n’ont déjà rien de se serrer encore plus la ceinture». Fâchés, ils écrivent que «couper dans les prestations d’aide sociale, c’est précariser encore les personnes les plus fragiles de notre société, au détriment de leur dignité et de leur santé. Réviser les normes d’aide sociale à la baisse, c’est retirer toujours plus aux assistantes et assistants sociaux les moyens de faire leur travail. Diminuer le minimum vital c’est oublier que la force d’une communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres».