Le chemin des travailleurs âgés est semé d’embûches

Suisse • Si tout le monde semble reconnaître la difficulté des chômeurs de plus de 50 ans à retrouver un emploi, l’empressement est moindre au moment de prendre des mesures concrètes.

Les plus de 50 ans sans emploi ne sont pas forcément plus nombreux que les autres catégories de la population, mais une fois au chômage, ils ont beaucoup plus de difficultés à retrouver un travail et y demeurent longtemps, venant finalement grossir le nombre de personnes à l’aide sociale. La question, bien connue, revient régulièrement sur le tapis, mais peine à trouver des solutions réelles. C’est que si tout le monde fait mine de se préoccuper du problème, lorsqu’il faut agir par des mesures concrètes, on se presse moins au portillon, et en particulier à droite. C’est ce que pointait cette semaine le parti socialiste, dont plusieurs interventions visant à améliorer la situation étaient traitées ces jours par différentes commissions du conseil national.

«Tant qu’elle peut prendre l’immigration comme prétexte, l’UDC prétend vouloir renforcer la protection des travailleurs et travailleuses âgés. Mais dès qu’une proposition concrète est posée sur la table, l’UDC refuse tous les efforts visant à améliorer leur sort», dénonçait ainsi la conseillère nationale genevoise Laurence Fehlmann Rielle dans un communiqué, pointant en particulier l’attitude du parti de droite radicale.

Deux initiatives rejetées
Une initiative parlementaire du conseiller national Corrado Pardini qui visait à protéger les travailleurs de plus de 55 ans et avec au moins 10 ans d’ancienneté contre le licenciement a ainsi été rejetée par 18 voix contre 7 par la commission des affaires juridiques du Conseil national. Du côté de la commission de l’économie et des redevances du même conseil, deux autres initiatives qui visaient à étendre le droit à l’assurance-chômage des plus de 50 ans (en accordant un droit à 520 jours d’indemnités chômage à partir de 50 ans et non 55 ans, comme c’est le cas actuellement, ou en prolongeant ce droit à 650 jours) ont elles aussi été rejetées par les partis bourgeois.

D’une façon générale et sous la pression de la droite, la volonté politique d’agir sur cette thématique est faible, à commencer par celle du ministre Johann Schneider-Ammann, en charge de la question, partisan d’une intervention publique minime. En avril 2017, la troisième conférence nationale sur les travailleurs âgés, convoquée par ses soins et réunissant Confédération, cantons, patrons et syndicats n’avait d’ailleurs débouché que sur une décevante liste de constats. «Dans certains cas, des pratiques pénalisantes ont cours… les participants à la conférence se sont engagés à les rejeter dans le cadre de leurs responsabilités et selon leurs possibilités (…) Ils ont également rappelé que des investissements en faveur de la capacité de travail et de l’employabilité demeuraient nécessaires», pouvait-on notamment lire dans le communiqué de la Confédération.

«Un simple appel à la raison» est bien insuffisant, avaient tonné les syndicats, dénonçant l’attentisme ambiant, alors que du côté de l’USAM, on fustigeait «toute nouvelle intervention régulatrice», martelant que «le meilleur garant d’un faible taux de chômage est un marché du travail souple et libéral». Autrement dit ne faisons rien, et laissons la main invisible s’occuper de tout!

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Des mesures proposées à Genève

Au niveau cantonal, le conseiller d’Etat Mauro Poggia a récemment proposé deux mesures à l’attention des chômeurs de plus de 50 ans, qui devront encore être soumises au Grand Conseil: la première vise à soutenir les entreprises qui engageraient des personnes âgées de 50 ans et plus en prolongeant la durée des allocations d’initiation au travail (AIT), mesure fédérale qui prévoit la prise en charge par l’assurance chômage d’une partie du salaire de la personne engagée sur les 12 premiers mois de son contrat de façon dégressive: 60% sur les 6 premiers mois, puis 40%. La mesure proposée par M. Poggia vise à prolonger cette prise en charge du salaire de 6 mois, à hauteur de 40%, par le canton.

La seconde proposition du ministre genevois consiste en une allocation-pont pour les personnes qui arriveraient en fin de droit 3 ans ou moins avant l’âge de la retraite. Elle assurerait un revenu mensuel (avec un certain plafond) à ces personnes durant 18 mois au maximum, afin de leur permettre de continuer à cotiser à l’AVS notamment.