Des moyens inégaux face aux coupes

Neuchâtel • L’Université dénonce les conséquences des réductions budgétaires qui la concernent. D’autres victimes de coupes n’ont toutefois pas les mêmes moyens.

A la suite de la décision du Grand conseil de supprimer un million de francs dans le cadre du budget 2018 de l’Université, le Conseil de l’institution a publié un communiqué signé par son président, le socialiste Didier Berberat. «Ce montant s’ajoute à une mesure d’économie de 1,7 million à laquelle a déjà eu à faire face l’Université en 2017 et à une réduction de 500’000 francs déjà appliquée au budget 2018. En deux ans ce sont donc 3,2 millions de francs qui manquent au budget de l’Université soit 6,5% de sa subvention cantonale», dénonce-t-il.

Une balle dans le pied
Le Conseil de l’Université souligne aussi que les recettes provenant de la Confédération et des autres cantons sont directement corrélées avec l’évolution du financement cantonal. «Lorsque des coupes obligent l’Université à revoir ses prestations à la baisse, ce sont des étudiants et étudiantes qui ne viennent plus, ainsi que des projets de recherches qui lui échappent. Or, le nombre de ces étudiants, étudiantes et projets de recherche conditionne la hauteur du subventionnement fédéral. Des contributions sont également versées par les autres cantons pour chaque étudiant ou étudiante qui choisit de se former à Neuchâtel. Ainsi, en réduisant de manière conséquente son soutien à l’Université, le canton de Neuchâtel perd progressivement un financement externe irriguant l’économie cantonale». En d’autres termes, la droite parlementaire, aidée par des socialistes, se tire une balle dans le pied.

Nous comprenons et partageons les propos du Conseil de l’Université. Mais cela ne nous empêche pas de souligner que plusieurs anciens universitaires composent le parlement. Or, ce sont eux qui prennent des décisions contraires aux intérêts de l’institution qui les a formés. L’origine politique de ces décisions se trouve dans la vision économique à court terme qu’une large majorité d‘élus partage. Ce sont les mêmes critères qu’utilise le Conseil d’Etat pour réduire l’argent de poche des résidents en EMS ou baisser de 10 francs le salaire des apprentis de l’Etat.

A la différence près que face à cette politique, l’Université, par son Conseil, peut faire des communiqués largement diffusés pour exprimer son mécontentement. On peut même imaginer que le Conseil d’Etat soit sensible à ces propos et en tienne compte pour les prochains budgets. Les résidents en EMS et les apprentis n’ont en revanche pas la même possibilité de faire entendre les préoccupations qui les touchent personnellement, chaque jour. Enfin, quels moyens pourront utiliser les employés de Nomad, établissement de droit public chargé par le canton d’assurer les soins à domicile, qui viennent d’apprendre que cette institution vise à réduire sa voilure de 28 postes en «musclant» ceux qui restent, pour reprendre le terme paru sur le site d’Arcinfo?

Les fous guident les aveugles
Il faudra beaucoup de courage aux victimes qui sont de plus en plus nombreuses à subir ces choix pour faire face à ce tsunami. Ils devront imaginer de vivre autrement, selon d’autres règles que celles de l’intérêt économique immédiat. Les personnalités qui dirigent notre société créent le cercueil du système face à une population qui ne voit rien venir. Cela nous rappelle les propos de Shakespeare dans le Roi Lear: «C’est un malheur du temps que les fous guident les aveugles».