Une vie au service de la paix

Colombie • Carlos Lozano, le directeur de l’hebdomadaire communiste colombien «Voz», est décédé fin mai. Il a été l’une des chevilles ouvrières des accords de paix en 2016 (Par Cathy Dos Santos, paru dans L’Humanité)

Jamais Carlos Lozano, né en 1949, dans la ville d’Ibagué, ne s’est départi de sa finesse politique, de sa rigueur d’analyse, et de sa disponibilité. Jamais, pas même lorsqu’il faisait face à la terrible maladie qui l’accablait depuis des années. La dernière fois que nous l’avions rencontré, c’était il y a un an, dans son bureau de l’hebdomadaire communiste Voz, qu’il dirigeait avec énergie et enthousiasme.

Il était alors intarissable sur les accords de paix survenus quelques mois plus tôt entre le gouvernement du président Juan Manuel Santos et la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Il insistait sur la portée de cet événement transcendental, mais avertissait également des écueils et des menaces qui continuent de peser sur la paix. Carlos Lozano était un fin connaisseur du conflit qui a ensanglanté son pays. Il en maîtrisait les acteurs, les histoires derrière l’Histoire, les trahisons et les espoirs douchés. Ce n’est pas exagéré d’affirmer qu’il fut l’une des chevilles ouvrières du rapprochement des différents protagonistes de la guerre, qui a abouti à l’actuelle concorde nationale, indispensable pour les Colombien.ne.s et si fragile…

Il aimait aussi écrire. Dans les colonnes de son journal bien sûr, mais pas seulement. Il laisse derrière lui pas moins de six ouvrages de référence sur le conflit colombien et la théorie marxiste. Il collaborait avec la chaîne câblée latino-américaine Telesur, où il conduisait le programme: «Paix par Lozano». Comme une évidence.

Une campagne de dénigrement d’Uribe

Ses idées, qu’il défendait avec conviction au sein du comité central du Parti communiste colombien (PCC), sur les plateaux de télévisions ou encore aux micros de nos consœurs et confrères, lui ont valu les pires inimitiés des ennemis de la paix. Au premier rang de ces chantres belliqueux se trouve l’ancien président ultradroitier Alvaro Uribe. Ce dernier ira jusqu’à orchestrer une prétendue affaire d’accointances avec la guérilla pour mieux étouffer le scandale de la «parapolitique», qui l’éclaboussait, lui et sa majorité présidentielle, en raison de ses liens avec les milices paramilitaires. En 2008, en pleine tourmente, Paris élève Carlos Lozano au rang de Chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur. Les pressions nationales et internationales finiront par étouffer cette sale campagne. Vent debout contre les calomnies, l’homme restera digne. Sans vaciller