L’œuvre de Colette Magny enfin rééditée

Musique • La quasi-intégralité des œuvres de Colette Magny, chanteuse française qui a accompagné de nombreuses luttes politiques, dont celles de Mai 68, vient d’être rééditée chez Sony.

Un article paru le 10 novembre 2017 dans Gauchebdo présentait l’anthologie Colette Magny, De Melocoton à Kevork, éditée par epm. Une réédition de tous les albums et enregistrements de cette grande dame de la chanson semblait alors très improbable à l’auteur de ces lignes. Mais voilà, parfois des miracles se produisent. A l’initiative de Périne Magny Lecoy, Grégoire «Boule d’or» Magny – que Colette Magny évoque dans sa chanson «Melocoton» – et de Bruno Barré, paraît ce printemps chez sony music Colette Magny – Anthologie 1958 – 1997. Pour Périne Magny, nièce de Colette, il s’agissait de donner une seconde vie à l’œuvre de sa tante. Les cinquante ans des révoltes de 1968 ont peut-être aidé à la concrétisation de ce projet, par une visibilité redonnée à la chanson engagée.

Une artiste parfois déroutante
Ce coffret est dénommé «Anthologie», terme qui a semblé plus élégant à ses initiateurs qu’«Intégrale», même s’il s’agit ici bel et bien d’une réédition de pratiquement l’intégralité des enregistrements de Colette Magny. Au fil des 10 CD qui composent le coffret, les chansons ont été replacées, grâce au travail de Bruno Barré, dans leur chronologie d’origine. Pour la petite histoire, les premiers disques de Colette Magny avaient été produits par CBS, qui était la filiale française du label Columbia, qui est devenu Sony music aujourd’hui.

Les explorations tant musicales que textuelles de Colette Magny peuvent parfois dérouter, mais c’est une artiste sincère, authentique et rigoureuse dans son travail. Auteure, compositrice, interprète, elle a également mis en musique des textes et collages de textes, passant notamment de Lénine à Jean-Paul Sartre, Victor Hugo ou Rainer Maria Rilke. Elle a également chanté le blues et fait appel à des musiciennes et musiciens du jazz pour la mise musique de ses propres textes. Nous lui devons la très belle mise en musique du poème de Louise Labé, poétesse du 16e siècle, femme libre et féministe «Baise m’encor». Elle explora l’univers musical du jazz et du freejazz et Il n’est pas galvaudé de dire d’elle qu’elle fut précurseur (notre belle langue française ne propose pas de féminin de précurseur) du rap et du slam.

Une œuvre visionnaire

Le livret, qui accompagne le coffret, s’ouvre avec un texte de présentation de Jacques Vassal, qui évoque une «œuvre visionnaire». Ce texte fourmille d’informations sur les enregistrements et le contexte dans lequel ils ont été réalisés. Jacques Vassal nous donne ici des «clés» pour mieux aborder l’œuvre. Le livret contient également l’ensemble des textes des chansons écrites par Colette Magny. Au final, cette Anthologie 1958 – 1997 se présente comme un coffret plein de sobriété, qui rend enfin accessible des enregistrements devenus pratiquement introuvables et ce, à un prix plus que raisonnable.

A noter également la parution chez Sony music d’un double CD A cœur et à cris, qui reprend une sélection de chansons du coffret répartis sur deux disques: un premier CD A cœur, qui propose vingt-trois chansons du registre poétique et musical et un deuxième CD A cris, avec vingt chansons du registre plus politique, même si vouloir séparer politique, poétique et exploration musicale chez Colette Magny tient de la gageure. Ce double CD peut servir d’invitation à se procurer l’anthologie complète. A signaler pour terminer que Colette Magny a légué ses droits à Sidaction et que les droits de ces deux parutions sont versés à cette association.