Mais où sont passés les électeurs de Mélenchon?

Il faut le dire • Le 23 avril 2017, près de 20% des électeurs qui avaient participé à l’élection présidentielle glissaient le bulletin de vote de Jean-Luc Mélenchon dans l’urne. (Par Luca Schalbetter)

Le 23 avril 2017, près de 20% des électeurs qui avaient participé à l’élection présidentielle glissaient le bulletin de vote de Jean-Luc Mélenchon dans l’urne. Deux ans après, le constat est glaçant: la liste de la France insoumise obtient 6.13% aux européennes, soit plus de 5 millions et demi d’électeurs perdus…

Par le choix de changer une politique de souveraineté, appelée par les médias «populiste», pour une politique de guéguerre pour l’hégémonie sur la gauche, dont il rêvait d’être le nouveau Mitterrand, Jean-Luc Mélenchon a liquidé les possibilités et les espoirs qui pouvaient être mis dans sa formation. On ne construit pas une nouvelle force crédible en essayant de rassembler des vieux appareils en voie de disparition. La France insoumise avait manifestement décidé de s’adresser prioritairement aux classes urbaines éduquées, en abandonnant le rassemblement du «peuple» contre ses «élites». Le choix du profil de sa tête de liste est symptomatique: Manon Aubry, ancienne responsable de l’UNEF et porte-parole de l’ONG Oxfam.

Le contenu de classe du mouvement des gilets jaunes et la politisation qui l’accompagne auraient été une aubaine pour la France insoumise. Mais en abandonnant le champ de l’expression populaire pour se rapatrier dans la petite gauche, la France insoumise s’est détournée du mandat que les électeurs lui avaient donné en 2017. Les gens trouvaient enfin quelqu’un qui proposait, à gauche, d’aimer son pays et de défendre les travailleurs en même temps, comme Jaurès à son époque. En proposant de faire de cette élection un «référendum anti-Macron», la FI a donné au Rassemblement national le boulevard qu’il espérait.

Ce changement de ligne s’est évidemment accompagné de toutes les pratiques «gauchistes» éloignées de la majorité de la population et étrange aux travailleurs; thèses indigénistes, écriture inclusive, complaisance face au communautarisme… La France insoumise est donc apparue comme la nouvelle gauche urbaine adepte des micro-luttes sociétales, plutôt que le réel mouvement capable de fédérer le peuple contre l’oligarchie.

Bonjour les dégâts, la politique française se retrouve résumée à choisir entre l’extrême-droite et l’extrême-marché