Fixer l’éphémère sans altération

Expo • Photographe de l’instant, Xael Wyss expose pour la première fois ses clichés sur support papier. Issues avant tout de sa pratique du BMX (bicycle motocross), les images sont présentées à l’état brut.

Malik Jeannet/Dirt, La chaux-de-Fonds (Xael Wyss)

Xael Wyss a vingt ans, et ses expériences photographiques lui ont permis d’acquérir un savoir digne d’un professionnel. Mais pour l’instant, cet apprenti mécanicien sur vélo garde cela comme loisir: «J’ai tout financé moimême pour cette exposition. Ça a été une expérimentation, je ne savais pas vraiment comment procéder». C’est sur fond sonore de machine à tatouer que le jeune photographe a ainsi décidé de tenir sa première exposition.

L’atelier «Noir Tattoo» à Fribourg se prête d’ailleurs particulièrement bien aux photosexposées: BMX, vues d’espaces urbains, lieux abandonnés, les images présentent un univers de création bien différent du «monde de la culture» tel qu’il est souvent présenté. Et c’est ce qui fait la force du travail de Xael: «Je fais du BMX depuis des années avec Les brigadiers [crew de BMX]. Certains d’entre eux font aussi de la photo ou de la vidéo, ensemble on effectue régulièrement des sorties et même des voyages. Pouvoir partager ces passions avec eux, c’est aussi une motivation».

Ce qui ne l’empêche pas d’aller seul à la recherche de lieux à immortaliser, en particulier de bâtiments et d’espaces désaffectés. La visite de tels sites, portant le nom anglais d’«urban exploration» ou «urbex», Xael en a fait sa passion. «Il y a beaucoup d’émotions qui remontent quand je vais là-bas, ça peut être très intense». Ces découvertes sont également liées aux sports urbains, qui se pratiquent souvent en ces lieux inoccupés ou marginalisés:«Tout se mélange dans ce milieu. Le BMX, l’urbex, la photo et la vidéo sont connectés les uns aux autres». En effet, immortaliser figures et postures est une pratique courante dans le domaine. La création  lie alors chacun de ces éléments, et tend à effacer leurs distinctions.

C’est aussi dans la polyvalence que Xael s’adonne à la photographie. Entre couleurs et nuances de gris, appareils analogiques ou numériques, le photographe a ses préférences mais ne s’impose pas de limites et aime expérimenter: «Lorsque je photographie en analogique, j’utilise souvent des films périmés. Ils prennent parfois une teinte plus bleue, jaune ou rose… Ça donne un rendu intéressant, mais c’est toujours du hasard, car les couleurs peuvent encore être très bonnes». L’important est surtout de ne pas modifier la photo a posteriori: Xael apprécie le charme des défauts de l’image, et il est essentiel pour lui de ne pas les rectifier. «Je sais que l’on peut faire des choses incroyables avec un logiciel, mais ce n’est pas mon but. Je recadre parfois les  photos, mais c’est tout».

Le choix du photographe se porte ainsi plus souvent vers l’analogique, parfois avec des appareils particuliers: il présente avec enthousiasmeson Kiev 88, appareil soviétique possédant un viseur sur le dessus et permettant une grande précision d’image dans les nuances sombres et claires. «Je l’utilise souvent pour les photos de BMX, mais c’est un défi de prendre des clichés de sujets en mouvement avec cet appareil. Il faut être bien préparé».

Xael présente ce que l’on espère être la première d’une longue série d’expositions. Sa passion tant pour le médium photographique que pour les sujets qu’il fixe se ressent dans l’image, et plonge le spectateur dans l’exploration.

Exposition jusqu’au 30 septembre chez «Noir Tattoo», Rue du Nord 7, 1700 Fribourg