Victoire pour la désobéissance civile

Vaud • Les militants ayant réalisé une action dans une succursale du Crédit Suisse, pour dénoncer les investissements du groupe bancaire dans les énergies fossiles, ont été acquittés. Le procureur général a fait appel de cette décision, dans un contexte d’urgence climatique, craignant qu’elle fasse des émules.

L’action du collectif Lausanne action climat (LAC) au Crédit suisse a été déclarée licite par le juge Philippe Colelough. Mais le procureur général a fait appel de ce verdict. (LAC)

Le verdict du juge Philippe Colelough est tombé lundi dernier devant une salle comble. Il reconnaît la nécessité licite de l’action des jeunes du collectif Lausanne Action Climat (LAC) face au danger imminent que constitue le réchauffement climatique.

A la sortie du tribunal, une avocate de la défense a salué une décision «historique». De son côté, le procureur général Eric Cottier déclare dans les colonnes d’Arcinfo: «Cette décision paraît étendre le champ d’application de cette disposition nettement au-delà des limites fixées jusqu’ici par la jurisprudence, dans un contexte comportant des aspects politiques». Le parquet vaudois a décidé de faire appel ouvrant la voie à un feuilleton judiciaire et médiatique qui pourrait bien aller jusqu’au Tribunal Fédéral.

Federer assure un service minimum

Quelles qu’en soient les suites, l’action non-violente de ces militants (voir GH 1-2) a d’ores et déjà suscité un fort retentissement. La médiatisation de leur affaire a ainsi ramené, une fois encore, les investissements peu écologiques de la place financière suisse sur le devant de la scène. Elle a également généré une campagne sur le réseau social Twitter sous le hashtag #RogerWakeUpNow, en référence au tennisman Roger Federer, «égérie» du Crédit Suisse, que ciblaient par leur action les militant.e.s de LAC.

Ce rôle «d’ambassadeur» de la marque, pointé du doigt dans de nombreux messages, a notamment été relayé par la militante écologiste Greta Thunberg auprès de ses 4 millions de «followers» (abonnés). Federer était ainsi interrogé quant à son approbation du procès des 12 activistes dénonçant les «crimes climatiques» de la finance. Il a répondu lundi par un communiqué de l’agence Reuters dans lequel il se déclare «heureux» d’avoir été rappelé à ses responsabilités. «Je prends très au sérieux les effets et la menace des changements climatiques, en particulier parce que ma famille et moi arrivons en Australie au milieu des ravages causés par les feux de brousse», a-t-il confié. «En tant que père de quatre jeunes enfants, […] j’ai beaucoup de respect et d’admiration pour le mouvement de la jeunesse pour le climat, et je suis reconnaissant aux jeunes militants […] de nous avoir tous poussés à examiner nos comportements et à agir sur des solutions novatrices», ajoute-t-il. Il s’engage enfin «à utiliser [sa] position privilégiée pour dialoguer sur des questions importantes avec [ses] sponsors». La balle est dans son camp.

De son côté, le CS n’est pas en reste. Plusieurs montages photographiques mettant en scène le logo de la deuxième banque du pays circulent sur les réseaux. On y voit, en fond, des représentations des incendies qui ravagent actuellement l’Australie, des paysages désolés ou encore un puits sans fond composé de billets de banque avec la mention «Crédit Suisse alimente le chaos climatique». Les slogans qui y sont associés dénoncent les milliards de dollars que la banque aurait investis dans les énergies fossiles ces dernières années.

Succès médiatique

Le résultat de ce premier procès, qui pourrait faire jurisprudence, ouvre la voie à de nouvelles actions de désobéissance civile par la jeunesse. Quoi qu’il ressorte de l’appel, l’étalage médiatique des investissements de la place financière dans les combustibles fossiles devrait amener les institutions visées à éviter de nouveaux procès. Par leur action, ces jeunes ont donc gagné une bataille d’importance contre le réchauffement climatique et ceux qui le financent, la bataille médiatique.

 

Les militants climat fustigent les Jeux olympiques de la jeunesse

Célébrés par les autorités vaudoises et médiatisés par la RTS ou Tamedia, les Jeux olympiques d’hiver de la jeunesse (JOJ), qui regroupent des sportifs et sportives de 15 à 18 ans en provenance d’une septantaine de pays pour un budget de 42 millions de francs, sont loin de convaincra les militants de la Grève du climat et d’Extinction rebellion. Dimanche 12 janvier, une trentaine d’entre eux se sont rendu.e.s aux Diablerets muni.e.s de banderoles pour manifester «contre l’hypocrisie» de ces joutes sportives et rappeler l’urgence climatique.

Ils ont dénoncé les canons à neige artificielle et la neige apportée en camion au diesel pour remplumer les pistes. Ils ont aussi critiqué la parade aérienne de la Patrouille suisse en ouverture des jeux. «Chacun de ces six avions a relâché 6.5 tonnes de CO2 soit une consommation équivalente à celle d’un.e Suisse.sse moyen-ne pendant six mois. Notons aussi que les sponsors de la compétition (Coca-cola, Retraites populaires, etc.) sont champions dans l’art de la destruction de l’environnement», ont-ils relevé dans un communiqué.

Dénonçant «le harcèlement médiatique et public des autorités lausannoises à propos de ces jeux olympiques de la jeunesse», les militants regrettent qu’aucun moyen ne soit engagé pour informer la population des crises de la biodiversité et climatiques. Pourtant, les autorités ont privilégié le recours aux transports publics pour l’acheminement des athlètes sur les sites et la participation de bénévoles locaux.

Ce manque de durabilité avait déjà été pointé en décembre par un élu vert, Xavier Company, lors du conseil communal de la Ville de Lausanne. Il avait par exemple relevé que la compensation du transport aérien des athlètes avait été confiée par le Comité international olympique à Dow Chemical, «géant mondial de la chimie». Dans ce débat, Ensemble à Gauche, considérant que la décision d’organiser les Jeux aurait dû être mise en cause dès le départ, s’est abstenu sur le rapport de la Municipalité.

Réd.