Journal de coronavirus

La chronique féministe • Suite du Journal de confinement depuis Perly.

Lundi 20.4.20, 18°

Réveil 6h30, avec les chants des oiseaux. Jardin première fleur de muguet!
La pollution tue 2200 personnes par jour, le coronavirus 1600, où est la logique?
Kaboul. 5 lycéennes tentent de fabriquer un respirateur artificiel bon marché à partir de pièces de voitures usagées.
Le tourisme est à la peine. Encourager les Suisses à prendre leurs vacances dans leur pays? Je songe à faire le tour des châteaux, un projet que je nourris depuis des décennies.
10h, Josiane vient m’aider à arracher les mauvaises herbes, elle aime ce genre d’exercice, nous gardons nos distances. Première fois que j’invite quelqu’un depuis le confinement, ça fait du bien. Une fourre «à classer»: le rendez-vous littéraire du Quinze, au Café Romand de Lausanne, années 70-80, où je fus invitée.
Revue Bouquet du 21.6.81: le récit de ma fugue depuis le chalet de G. aux Mayens de Sion jusqu’en Grèce. Un souvenir à la fois cuisant (je ne cessais de pleurer un amour perdu) et exaltant (je découvrais la liberté).
Mes études de lettres commencées en 1968, l’achat de mon appartement en 79, le voyage seule en Grèce en 80 et le marathon d’écriture en Avignon 84 auront été 4 étapes vers l’autonomie.
Je reçois un manuscrit, que je transmets à Marthe.
Bullitt, de Peter Yates, 1968, avec Steve McQueen. La fameuse poursuite de voitures dans les rues de San Francisco, où nos avons circulé avec mon fils en 1989, nos plus belles vacances. 21h36.
Je trie, Salon des célibataires de Paris, j’avais eu droit à un grand article de La Suisse.
Lis Le Courrier. Qui n’a que 8 pages, aujourd’hui!

Mardi 21.4.20, 20°

Un T-shirt noir reproduit la phrase devenue mythique d’Alain Berset: «Il faut agir aussi vite que possible mais aussi lentement que nécessaire».
10h30, physio, la dernière.
On sonne: la livraison de la desserte, lourde! En métal noir, comme le gril, parfait.
Je termine ma chronique, 8200 caractères. Je refuse 2 manuscrits (une personne m’envoie 3 recueils, dont un de 444 pages!)
Tri. Des articles sur le Jura libéré (mon grand-père paternel ne l’aura pas vécu, lui qui avait soutenu la cause toute sa vie), 1965, ma participation à la revue Jeunesse, 1966, ma collaboration à Coopération de mars 68 à septembre 69. Il me semblait bien qu’il y avait, dans le dernier carton, des documents d’avant mon déménagement, février 1979.

Mercredi 22.4.20, 22°

France-Inter. -13% du pouvoir d’achat des Français depuis les 35 heures, par rapport à l’Allemagne et d’autres pays.
Il y a 40 ans disparaissait Jean-Paul Sartre. Les médias en ont peu parlé, même Libé, qu’il avait cofondé, n’a publié qu’un article AFP. Je tombe sur un article parlant de son enterrement,avec Simone de Beauvoir dévastée, incroyable coïncidence. Classeur «Carnet noir».
Le pétrole au-dessous de zéro, on paie pour se défaire de ses stocks. Mais à la pompe en Suisse, seulement -7%!
Le menuisier sonne à 9h, il changera les charnières de 2 portes, ajustera les autres, remettra des vis aux tiroirs.
Vais acheter le Canard, reviens par les vignes, il fait un temps magnifique.
Documentaire sur Ella Maillart, qui aurait dû donner son nom à l’ESC Malagnou, devenue Emilie-Gourd.

Jeudi 23.4.20, 23°

Lever du soleil à 5h59. Pollux a perdu son collier!
Le ramadan en confinement. Une femme pense que cela permettra aux maris d’aider leurs épouses. A voir… Mais d’une manière générale, la pandémie péjore la situation des femmes, notamment pour les grossesses, les avortements, les violences. Rien de nouveau sous le coronavirus.
Lis le journal de René sur sa maladie au Covid-19, terrifiant!
Je rédige et envoie mes invitations «on déconfine», n’arrive pas à faire un Doodle, quelques réponses enthousiastes.
Procès de deux tortionnaires syriens aux ordres de Bachar, crimes contre l’humanité. Il y a aujourd’hui encore 90’000 personnes torturées dans les prisons syriennes. Je n’arrive pas à m’endormir avant 3h!

Vendredi 24.4.20, 24°

RSR, les + de 65 ans (1/4 de la population) en ont ras le bol d’être confinés plus que les autres.
André Comte-Sponville, dans Le Temps: «Sacrifier les jeunes à la santé des vieux, c’est une aberration.»
TdG. On fait venir des saisonniers portugais par avion: contrats signés. On en engage 30’000 en Suisse. Mais certains renoncent, par peur de ne pas pouvoir retourner au pays.
Téléphone avec Marie. Quand je lui parle de mon tri, elle me dit que mon bureau ressemblait à l’idée qu’elle se faisait d’une éditrice!
Spritz avant le repas.
C à vous. Bernard Guetta fustige l’imbécilité de Trump, se dit consterné qu’il tienne la paix et la guerre du monde entre ses mains.
Brigitte nous informe que les répétitions de la chorale ne reprendront pas avant septembre. Une sacrée pause!
Dans Le Courrier, chronique à l’humour grinçant d’Anne-Catherine Menétrey sur les personnes à risque que nous sommes, nous, les vieux et les vieilles, je la félicite.
TJs. De Chine sont arrivées à Saint-Gall des machines à fabriquer des masques. 40’000 par jour. Enfin! Je ne comprends pas qu’un pays comme la Suisse, capable de construire des machines-outils, des ascenseurs, des trains, ne soit pas capable de fabriquer des machines pour confectionner des masques.

Samedi 25.4.20, 25°

Simonetta Sommaruga: Il faudra revoir la situation du personnel soignant et des personnes indispensables. Le contraire de ce qu’a dit l’affreux Nantermod la veille!
J’arrive aux Mattines juste avant l’ouverture. Les asperges coûtent 3 fois plus qu’à la Migros.
TdG. L’analyse de Jérôme Fourquet, politologue français. «Cette crise est le révélateur d’un déclassement de la France, qui se trouve plus proche de l’Italie et de l’Espagne que de l’Allemagne, de l’Autriche ou des Pays-Bas. On croyait avoir le meilleur système de santé au monde, mais nous avons été pris au dépourvu.»
Cet été, on ne pourra probablement pas aller en vacances au bord de la mer. Une photo apocalyptique d’une plage où s’entassent des baigneurs. En 2018, 90% des Suisses ont voyagé à l’étranger, dont 2/3 pour l’agrément.
Les asperges sont délicieuses.
France: Emmaüs n’a plus de rentrées, appel à dons… comme l’abbé Pierre en 1954! Perpétuel recommencement…
Pollux vient du dehors, je lui donne des croquettes, puis il ronronne sur moi, dans le fauteuil. Une sacrée présence…

Dimanche 26.4.20, 18°

Alain Baraton, responsable des jardins de Versailles, sa connaissance encyclopédique, son enthousiasme. Il intervient une dizaine de minutes le samedi et le dimanche matin un peu avant 8h. Rien à voir avec l’émission gnangnan «Monsieur jardinier» (au masculin!) de la RSR1 le dimanche matin, qui dure 3 longues heures, de 6 à 9!
Je lis les articles que mon ami Denis me découpe sur divers sujets féministes. Le viol est l’essence même du capitalisme et du colonialisme: prendre à quel- qu’un ce qu’il ne veut pas donner.
Où est Kim Jong-un?
F2, Le Corniaud de Gérard Oury, 1965, avec Louis de Funès et Bourvil, un film que j’ai déjà vu et revu, qui m’a fait hurler de rire à sa sortie, entraînant 3 rangées de la salle.
Je trie et classe un bac. Marche Mondiale des Femmes 2000, souvenirs exaltants.
Balade, le ciel est clair vers le Fort l’Ecluse, il ne pleuvra pas ce soir, malgré les prévisions météorologiques.
Un éléphant est abattu toutes les 15’. Comment peut-on tuer ces animaux extraordinaires? L’humain est la pire des espèces animales, comme dit Jean-Noël.
Je copie mon journal dans celui du coronavirus, commence à le travailler.
Mal à la gorge, comme un début d’angine. Echarpe, jaquette, chaussettes, châle sur les genoux.
Repas: soupe aux fanes de radis.
TJs. Une ligne de points lumineux dans le ciel: Starlink, des satellites lancés par Space X, le programme spatial du milliardaire américain Elon Musk. Ils ont pour objectif de fournir Internet à haut débit partout depuis l’espace. Les astronomes sont furieux.
EMS, un vieux derrière une vitre pour la visite de son fils… François Compagnon! Que j’ai eu comme prof de français à l’ESC, qui allait visiter sa mère aux Tilleuls dans la période où je rendais visite à mes parents… Le monde est petit!
Mise au Point reprend.
Pas envie de regarder un document sur la grippe espagnole. Je vais à d’Artagnan ou plutôt à sa fille, Philippe Noiret et Sophie Marceau. Là, les bons sont récompensés et les méchants punis. Je passe une bonne nuit.