Cacher ce patronat que je ne saurais voir!

Genève • La polémique autour de la tenue à adopter dans les écoles ne cesse d’enfler. Il se pourrait qu’elle révèle plus qu’une histoire de taille d’habits et de nombrils dévoilés

Lors de la dernière rentrée scolaire plusieurs élèves du cycle d’orientation de Pinchat ont été contraint.e.s (il s’agissait en grande majorité de filles) de porter un T- shirt extra-large avec la mention «J’ai une tenue adéquate» pour recouvrir leur accoutrement jugé incorrect par l’établissement. Après que Le Courrier a rendu publique «l’affaire du T-shirt de la honte», celle-ci a pris de l’ampleur. Lors de sa dernière séance, «un Grand Conseil dramatiquement conservateur» selon Ensemble à Gauche (EàG), a refusé par 44 voix contre 39 une motion réclamant la fin immédiate des sanctions en raison des tenues vestimentaires considérées comme « inadéquates », «non correctes» ou «indécentes».
Depuis le vote au Grand Conseil, le Département de l’instruction publique (DIP) a de lui- même décidé de suspendre ces mesures le temps de mener une réflexion sur le sujet (TdG). Quelques jours plus tôt, la Conseillère d’Etat en charge du DIP, Anne Emery-Torracinta s’était exprimée sur le sujet dans une longue interview à la Tribune de Genève. Elle y expliquait que sur une volonté du législateur déclinée au niveau des établissements par un règlement, élaboré par enseignant.e.s, parent.e.s, et élèves, une tenue correcte dans le cadre scolaire est définie. Elle précisait que si le but du t-shirt n’était pas de punir, mais d’éviter que les élèves ne doivent rentrer à la maison pour se changer, le libellé était, lui, stigmatisant. Toujours selon elle, l’instruction publique n’est pas «l’arbitre de la mode, qui n’est ni bonne, ni mauvaise, mais adéquate ou pas selon les lieux. Dans le monde de l’entreprise, pour lequel nous préparons les jeunes, des règles assez claires sont aussi appliquées». En effet, la relation salariale étant un rapport de subordination hiérarchique entre un.e salarié.e et un patron (ou une matrone), ce dernier est en droit de décider des tenues à porter sur le lieu de travail. Ainsi, le patronat impose par exemple le port de l’uniforme dans un grand nombre de professions, afin de marquer les rapports sociaux de domination entre lui, les salarié.e.s et les client.e.s.
Il peut également demander à une hôtesse (plus rarement à un hôte) qu’elle porte des vêtements faisant d’elle un objet publicitaire à même de faire vendre sa marque, au salon de l’auto- mobile par exemple. Il conviendrait donc d’enseigner aux élèves une certaine discipline vestimentaire. Pour ce qui est du développement de leur personnalité et de leur esprit critique, on verra plus tard, après tout qu’en feraient- ils.elles dans «le monde de l’entreprise»?