La «dictature» mise hors jeu par le MAS

Il faut le dire • Le peuple bolivien a donné au Mouvement vers le socialisme (MAS) un vote de confiance plus net que prévu par les sondages.

Le peuple bolivien a livré une leçon de combativité, de force et de maturité. Il a donné au Mouvement vers le socialisme (MAS) un vote de confiance plus net que prévu par les sondages. Ceci par plus 52% des voix exprimées pour Luis Arce, ex-Ministre de l’Economie de Morales et socialiste modéré. Il distancie de 20% des votes son plus proche concurrent. Une victoire incontestable associée à une majorité dans les deux chambres de l’Assemblée législative plurinationale.

Arce ne s’est pas laissé désarmer ni intimider par l’exil forcé en Argentine des président et vice-président Morales et Linares, figures emblématiques du MAS, qui ont dirigé le pays de 2005 à 2019. Mais aussi par le refus du gouvernement de facto de Mme Añez de délivrer un sauf-conduit à des ex- ministres et gouverneurs qui sont restés depuis un an «enfermés» dans l’ambassade du Mexique à la Paz. Sans compter les pressions que les leaders locaux ou régionaux ont subies. Chacun a résisté. Ainsi à l’Assemblée législative durant cette longue année. Et dans la rue. Quand le blocage des routes, organisé de manière efficace et pacifique en août, a obligé la présidente auto- proclamée à fixer une date pour ces élections. Enfin la population a su se faire confiance. Elle est allée voter massivement et de manière ordonnée. Ceci malgré les tentatives d’intimidation de l’armée qui était largement déployée le 18 octobre.

Le MAS a su trouver la bonne équipe présidentielle. Avec Luis Arce, artisan reconnu de la stratégie ayant permis un boom socio- économique inédit dans le pays ainsi qu’une redistribution de la richesse réelle (entre 2006 et 2014, le PIB a été multiplié par quatre, la pauvreté est passée de 60% à 37%, ndlr). Et David Choquehuanca, ex- Ministre des Affaires étrangères (2006- 2017), compagnon historique de Morales, dont il partage les origines aymara.

Une parenthèse d’une année s’est refermée. Elle n’aurait jamais dû s’ouvrir. N’en déplaise à certains esprits chagrins, même à gauche, tant il est devenu évident que si fraude il y a eu en 2019, c’est celle rassemblant la droite, l’OEA et les Etats-Unis. Elle n’a pas fait plier le peuple bolivien. Celui-ci a aussi bénéficié d’une solidarité internationale essentielle, à travers le Mexique d’An- drés Manuel López Obrador et de l’Argentine dirigée par Alberto Fernández.

C’est un nouveau souffle pour la gauche latino-américaine et un avertissement que la stratégie mise en place par les Etats-Unis contre les gouvernements de gauche n’est pas toujours gagnante, surtout si ceux-ci reposent sur des mouvements sociaux solides. Il y a des semaines où il est plus facile de croire qu’un autre monde est possible.