Incertitude sanitaire et législature combative

Neuchâtel • Le POP maintient ses sièges aux exécutifs du Locle et de La Chaux-de-Fonds. Cédric Dupraz et Théo Bregnard livrent leurs impressions d’après scrutin.

Cédric Dupraz et Théo Bregnard sont bien réélus au Conseil communal dans leurs communes respectives. (POP Neuchâtel)

Tout comme Denis de la Reussille, conseiller communal du Locle depuis 1996, le popiste Cédric Dupraz a été réélu pour un quatrième mandat à son poste au Conseil communal. La liste était partie seule, du fait que l’apparentement entre partis était inenvisageable. «Notre résultat nous satisfait, sachant que nous avons fait l’objet d’attaques aussi bien du PLR, qui a mis des moyens conséquents dans la campagne, mais aussi en provenance du PS, qui voulait récupérer son siège à l’exécutif perdu en 2012. Ce qu’il n’est finalement pas parvenu à faire», explique le nouveau réélu.

Pour le Conseil général, le POP obtient 28,15% des voix, mais passe de 16 sièges à 12 sur 41, avec une délégation rajeunie. «Cela s’explique par la faible mobilisation, passant d’un taux de participation de 38% en 2016 à 31% cette année, et la fusion avec le village des Brenets, qui traditionnellement vote à droite», souligne Cédric Dupraz. La gauche garde pourtant sa majorité à la Ville. Les Verts emportent 6 sièges tout comme le PS, le PLR devenant la première formation du Locle.

Il était une panne

Revenant sur la panne informatique cantonale, qui a paralysé le dépouillement des bulletins de vote, faisant beaucoup de bruit dans le landerneau, le conseiller communal se félicite que le système informatique reste en mains de la Ville, «malgré les velléités de la droite de le transférer au Canton». Pendant deux jours, les bulletins de vote du Locle en attente de dépouillement ont été conservés en sécurité par le service du domaine public.

La nouvelle législature commence de façon incertaine, plombée par une situation sanitaire tendue sur le front du Covid-19 et les menaces minant l’emploi dans l’horlogerie. «La situation des Montagnes neuchâteloises est difficile tant au niveau économique, social que démographique, avec une baisse du nombre des habitant.e.s», rappelle C. Dupraz. «Il nous faudrait un plan Wahlen* du Canton pour sortir de cette situation. Ceci en renforçant les services publics (hôpitaux, centres de formation) et les services étatiques, qui sont centralisés à Neuchâtel», avance-t-il encore.

Le Locle, cité la plus à gauche du pays

Quels seront les enjeux des quatre ans à venir? «L’un des principaux concerne la construction de la route de contournement du Locle, qui devrait voir le jour en 2029-30. A plus long terme, autour de 2035, la réalisation d’une liaison ferroviaire plus rapide entre le Bas et le Haut du Canton. Nous voulons aussi continuer à investir dans le centre-ville, en créant des zones piétonnières pour favoriser le vivre-ensemble et la convivialité, renforcer les transports publics. Pour ce faire, nous bénéficierons de plusieurs millions de la part de la Confédération dans le cadre de FORTA (Fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération) et du projet d’agglomérations. Nous voulons maintenir les prestations sociales comme les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI. Sans oublier de développer le tourisme, en valorisant notre patrimoine urbain», précise Cédric Dupraz.

En matière écologique, l’objectif est notamment de végétaliser la zone urbaine et de redonner de la vie au Doubs, rivière transfrontalière à l’agonie. «Du fait de la fusion avec les Brenets, le Locle possède dorénavant une frontière avec ce cours d’eau. Nous voulons valoriser son parc naturel dans le cadre de l’agglomération du Doubs (comprenant Le Locle, La Chaux-de Fonds en Suisse et Villers-le-Lac et Morteau côté français)», conclut-il, tout en ne cachant pas sa fierté que «Le Locle reste la ville la plus à gauche de Suisse».

Le POP en ses Montagnes

A la Chaux-de-Fonds, le nouvel élu écologiste Patrick Herrmann arrive en tête pour le Conseil communal, prenant le siège de la socialiste Katia Babey. Il est suivi par Théo Huguenin-Elie (PS) et le popiste Théo Bregnard. Viennent ensuite les candidats PLR et UDC. «Ma réélection montre que le POP est bien ancré dans les Montagnes de par sa proximité avec la population, à travers sa permanence sociale notamment. Mais l’on voit aussi que le canton est en crise et que les gens ont besoin de changements. D’où l’élection de Patrick Herrmann. Dans le même ordre d’idées, il y a probablement une lassitude du pouvoir de la part des électeur.trice.s en ce qui concerne le PS, qui perd un siège. Enfin, globalement la gauche et les Verts sortent renforcés du scrutin», analyse Théo Bregnard.

Quels seront les défis pour demain? «Après la crise financière de 2015, la Ville a fortement réduit ses dépenses. Dans un nouveau contexte de crise sanitaire et économique liée au Covid-19, il s’agit à la fois de relancer la Ville et de trouver de nouvelles recettes. Nous voulons obtenir une part plus juste des subventions fédérales pour les communes d’altitude dans le cadre de la péréquation. Une initiative populaire sur le sujet a d’ailleurs abouti cet été.»
Au niveau cantonal, un impôt de solidarité sur les grandes fortunes comme une initiative du POP l’a proposé il y a trois ans déjà, nous paraît indispensable», assure-t-il. Rappelons que cette initiative populaire législative «pour une fiscalité plus équitable» prévoit une hausse modérée de l’impôt sur les fortunes imposables supérieures à 500’000 francs. Ce qui équivaut à 140 frs par an pour une fortune de 600’000 frs, ou à 700 frs annuellement pour un million.

Une attractivité à renforcer

Dans une commune qui perd des habitant.e.s, il importe de renforcer «l’attractivité» de la Ville. «La Chaux-de-Fonds a des atouts tant culturels que sportifs. Pour l’année 2025, nous souhaiterions nous positionner comme capitale culturelle suisse, en suivant le modèle existant en Europe (qui depuis trente ans et chaque année décerne ce titre à des villes au riche patrimoine). Enfin, il est indispensable de créer, par exemple, une vraie zone piétonne, ce qui nous manque encore pour accroître la qualité de vie dans le cadre d’une transition écologique», conclut Théo Bregnard.

* Programme mis en place en 1940 par la Confédération pour pallier la pénurie de ressources et de matières premières vitales.