Des solutions à la crise, il n’y a qu’à demander

Covid-19 • Alors qu’à l’instar des autres cantons romands, Genève retombe dans le semi-confinement jusqu’à la fin novembre, la CGAS et la gauche font leurs propositions pour soutenir l’emploi et les salaires.

Si la seconde vague de la pandémie met à rude épreuve le système de santé et que les hôpitaux suisses sont à la limite de leurs capacités pour accueillir des patient.es.s en soins intensifs, les menaces sur l’économie sont tout aussi présentes. Le 31 juillet s’achevait la possibilité de cautionnements solidaires par des prêts à faible intérêt pour les entreprises en difficulté au niveau national.

Depuis, le Conseil fédéral planche laborieusement sur un nouveau projet de soutien. Celui-ci vient de faire l’objet d’une ordonnance et devrait ouvrir la série de nouveaux prêts pour les «cas de rigueur», notamment dans le secteur des transports ou du tourisme. Ces aides seraient financées à parts égales entre la Confédération et les Cantons. A Genève, le Conseil d’État a pris les devants et déposé le 29 octobre un projet de loi d’aide financière extraordinaire de l’État destinée au secteur des forains et de l’événementiel.

Aides urgentes demandées

Pour le Parti socialiste genevois, il s’agirait d’aller plus loin. Dans une prise de position, il demande au gouvernement «d’agir dans les plus brefs délais pour octroyer des aides à fonds perdu aux secteurs économiques les plus touchés par ces restrictions, en particulier l’hôtellerie-restauration, du tourisme, de l’évènementiel, de la culture et du sport». Le parti voudrait aussi la mise en place immédiate des mesures afin d’éviter des congés et des faillites en lien avec les résiliations de bail.

Pour financer ce programme, les socialistes veulent que le Conseil d’État pratique une politique anticyclique à base d’emprunts et augmente ses recettes, en réalisant par exemple la réévaluation fiscale des immeubles par voie d’arrêté. «La fiscalité des plus riches doit être un levier majeur pour une sortie de crise par le haut», estime Lydia Schneider Hausser, coprésidente du PS genevois.

Absence de licenciements et contrôles

Des aides d’État aux entreprises? Pourquoi pas, estime la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS), qui tenait conférence de presse cette semaine, mais celles-ci doivent être «conditionnées à des garanties», estime Davide De Filippo, président de la faîtière. «Cela implique l’absence de licenciements, le maintien du revenu des travailleurs.euses et le respect des dispositions légales et conventionnelles lorsqu’elles existent», précise-t-il.

Secrétaire syndical d’Unia et vice-président de la CGAS, Alejo Patino a rappelé les 4 axes que défend la centrale dans la situation actuelle. Ils sont délimités par la protection de la santé des salarié.e.s, des salaires, de l’emploi et des droits syndicaux. «Une salariée travaillant dans une entreprise de nettoyage, qui a enregistré une dizaine de cas positifs et un décès dans ce dernier mois, nous a signalé qu’il n’y avait encore ni masque, ni gel à disposition, il faut que cela cesse», a expliqué le secrétaire syndical. Il a précisé que de larges améliorations avaient eu lieu dans le secteur de la construction depuis mars. Il en appelle à un renforcement des contrôles et à l’élaboration de plans de protection.

En ce qui concerne les salaires, Alejo Patino défend l’accès de toutes et tous aux réductions de l’horaire de travail (RHT) avec le maintien de 100% du salaire et la réactivation des assurances perte de gain (APG) pour les indépendant.e.s. Pour ceux et celles qui sont exclus du filet social comme les intérimaires, la CGAS préconise la création d’un fonds d’indemnisation, de même que «l’application immédiate du salaire minimum», approuvée en vote le 27 septembre.

Manifeste pour l’emploi

A l’occasion de sa conférence de presse, la centrale en a profité pour dévoiler son Manifeste pour l’emploi, sorte de guide pour l’après-crise en matière de politique socio-économique. «Il va à l’encontre des discours de la droite patronale, qui veut une relance économique par un allégement des contraintes et l’injonction faite à l’État de rester en retrait de l’économie», précise Davide De Filippo. Que contient-il? Le document veut tout d’abord «stimuler la relance par des hausses de salaire». «Les projets déflationnistes du Canton et de la Ville, qui portent atteinte aux salaires et au pouvoir d’achat de la fonction publique, vont à contre-courant d’une politique de relance», précise le président de la CGAS.

Le Manifeste souhaite aussi réduire la durée du travail, préconisant la semaine de 4 jours ou 32 heures. Face à la crise écologique, le texte en appelle aussi à une reconversion de l’emploi. Celui devrait être orienté vers les besoins sociaux, sanitaires et environnementaux de la population. A titre d’exemple, Davide De Filippo précise que les secteurs de la rénovation thermique, de la gestion des déchets, de l’accroissement des transports publics ou de l’économie circulaire ou locale pourraient créer de nombreux emplois. Et «pas seulement pour une main-d’oeuvre super qualifiée». «Parce que ce n’est pas aux salarié.e.s des branches en déclin de payer les effets de la crise et le tournant vers les emplois écologiques, il est nécessaire d’anticiper plutôt que d’attendre les licenciements perlés», proclame le texte.

Rente-pont dès 57 ans

Pour finir, ce nouveau Manifeste ambitionne de «resserrer les mailles du filet social». Si le parlement fédéral a accepté le principe d’une rente-pont pour les personnes au chômage à partir de 60 ans, la CGAS défend la version genevoise du principe. Un projet de loi, introduisant ce type de droit dès 57 ans est en discussion au Grand Conseil. La CGAS voudrait aussi une refonte de l’assurance-chômage, afin qu’elle puisse couvrir mieux les profils de carrière atypiques. Ainsi pour les salariés sur appel, les intermittent.e.s, les faux indépendants, les temporaires. Son accès doit être facilité pour toutes et tous et la durée d’indemnisation rallongée. Pour imposer ce programme, la CGAS compte en premier lieu sur la mobilisation des salarié.e.s. «Demain se prépare aujourd’hui», conclut Davide De Filippo.