Fausses notes pour la Cité de la musique

Genève • Un comité référendaire aux profils variés (élu.e.s PdT, Ensemble à Gauche et UDC), ainsi que des représentant.e.s de la sauvegarde du patrimoine s’opposent au futur projet de Cité de la musique.

Président de l’Association Sauvegarde Genève, Jean Hertzschuch s’en est pris à l’abattage de plus de 130 arbres du domaine. (DR)

Financé par des mécènes privés sur un terrain cédé en droit de superficie par l’ONU, le projet lancé en 2014 se veut grandiose. La Ville de Genève ambitionne de créer cette future institution musicale dans un périmètre d’un hectare jouxtant la Place des Nations.Le futur édifice permettrait de rassembler en un même lieu une salle de concert de 1580 places, les musiciens professionnels de l’Orchestre de la Suisse Romande et 500 étudiants de la Haute école de musique. Viendraient aussi s’ajouter deux plus petites salles de concerts, une bibliothèque-médiathèque et un restaurant. Le parc alentour serait ouvert au public, alors qu’il ne l’est pas actuellement.

Le Conseil de la Fondation pour la Cité de la musique de Genève dispose déjà du soutien de son mécène principal, la Fondation Hans Wilsdorf-Rolex. Celle-ci assure plus de 75% des 300 millions que coûterait la construction.

Patrimoine et arbres menacés

Accepté récemment au Conseil municipal par le PLR, le MCG, le PDC et le PS, ce projet rencontre l’opposition d’un comité référendaire. Ce dernier regroupe des élu.e.s de droite, mais aussi de la gauche radicale, ainsi que des défenseurs du patrimoine qui dénoncent un «paquebot culturel». A l’occasion d’une conférence de presse le 27 octobre, ils ont présenté leurs griefs.

Historienne de l’architecture, architecte et membre de SOS patrimoine-Contre l’enlaidissement de Genève, Leila El-Wakil a rappelé que la construction de la future Cité impliquerait la destruction de la villa historique dite des Feuillantines, une demeure patrimoniale de grande valeur. Président de l’Association Sauvegarde Genève, Jean Hertzschuch s’en est pris à l’abattage de plus de 130 arbres du domaine. «Les compensations proposées sont encore une grande fumisterie quand on sait que les nouveaux arbres plantés prendront de très longues années à devenir mâtures. Les dégâts écologiques seront immenses et pérennes».

«Monoculture bling-bling»

Membre du comité directeur du PdT et ancienne Conseillère municipale, Maria Perez affiche aussi son opposition. «On nous dit que seuls les frais de fonctionnement de la Cité seraient à la charge du Canton et que le Ville n’aurait théoriquement qu’à financer l’entretien du parc. Or, ce projet soutirera chaque année des finances publiques et des budgets culturels existants une dizaine de millions pour son fonctionnement et son entretien. Ceci alors que les budgets actuels sont insuffisants. Et que le Canton est incapable d’avoir une politique culturelle, laissant pratiquement la Ville porter à bout de bras cette mission régalienne» souligne-t-elle.

A n’en pas douter pour Maria Perez, voici «un nouveau projet élitiste et de prestige. Il favorise la monoculture bling-bling et l’entre-soi. Les Genevois avaient refusé l’extension du Musée d’art et d’histoire, du fait de l’implication d’un mécène privé Jean-Claude Gandur. Ils.elles doivent refuser ce nouveau projet, qui ne répond absolument pas aux demandes et besoins du monde culturel genevois. La Cité de la musique accentuerait encore la précarité et les inégalités entre artistes. On peut aussi se demander le sort réservé au Victoria Hall, bâtiment public en parfait état de fonctionnement, une fois le projet pharaonique de la Cité de la Musique construit», ajoute-t-elle.

Nouvelle vague problématique

Pour l’heure, un autre problème occupe les esprits du comité référendaire. L’épisode de deuxième vague pandémique et le semi-confinement imposé à Genève rendent difficile la récolte d’ici le 18 novembre des 3200 signatures nécessaires au référendum. Face à ce périlleux défi, le PdT demande que le Canton envisage l’allongement des délais pour le dépôt des signatures. Mais aussi le soutien à la diffusion à destination de tout le corps électoral des listes de signatures et argumentaires des comités référendaires et d’initiative. Une intervention en ce sens a été déposée par la députée PdT au Grand Conseil Salika Wenger.