L’Espoir côté femmes

La chronique féministe • Samedi à 17h30 (heure suisse), CNN, puis la plupart des chaînes, ont annoncé la victoire de Joe Biden.

Après l’insoutenable suspense des élections américaines, l’attitude de plus en plus écoeurante de Trump, qui ne reconnaît pas sa défaite et semble avoir le projet d’appeler ses «troupes» à la violence, cela faisait du bien d’assister à la joie des démocrates. Cette joie a rempli en quelques minutes les rues désertes de Washington. Elle a touché celles et ceux qui dansaient devant l’estrade dressée pour le discours du nouveau président dans sa ville de Wilmington (Delaware). Mercredi matin, quand j’ai appris à la radio que la vague bleue annoncée n’avait pas eu lieu et que Trump se déclarait vainqueur, j’ai déprimé. Je voyais 4 longues nouvelles années avec ce monstre et son pouvoir de nuisance à la tête des USA. Je me disais que le monde ne s’en relèverait pas. J’étais encore plus effondrée quand je voyais les républicains fêter leur «héros», puis hurler «Arrêtez le décompte!», comme si les votes républicains étaient plus valables, légaux que ceux des démocrates. Devant ces excès, j’ai tremblé pour la démocratie.

Samedi à 17h30 (heure suisse), CNN, puis la plupart des chaînes, ont annoncé la victoire de Joe Biden. Ce fut un immense soulagement et des manifestations de joie. A 2h20, je me suis réveillée, j’ai allumé la télé, et j’ai vu la rayonnante Kamala Harris, vêtue de blanc. «Je suis la première femme, la première femme noire qui devient vice-présidente des États-Unis, mais je ne serai pas la dernière. C’est un exemple pour les filles de ce pays.» Elle a dressé un portrait de Joe Biden, empathique, rassembleur, à l’écoute, l’exact opposé de l’autre. A son tour, le 46e président des États-Unis a parlé: «Je serai le président de tous les Américains.» Sa première préoccupation sera la lutte contre la Covid. Il réintégrera le Traité de Paris sur le climat, et l’OMS. Sa femme Jill le soutiendra et, engagée, ne se contentera pas de sourire, comme la gravure de mode Melania.

En l’écoutant, en regardant les deux familles rassemblées, en admirant les feux d’artifice, je me disais que, certes, Biden sera un président apaisant, qui va tenter de guérir (to heal) un pays blessé, mais à 78 ans, c’est le président américain le plus âgé. L’énergie dont on a besoin, c’est Kamala Harris qui l’incarne. Elle crevait l’écran. Elle ne fera pas de la figuration, mais s’occupera de dossiers importants. Et sa vice-présidence sera un tremplin pour devenir, peut-être, la première présidente des USA. Brillante, elle a été procureure générale de Californie de 2011 à 2017, elle est sénatrice pour la Californie au Congrès depuis 2017.

D’autres femmes comptent dans les instances étasuniennes. Nancy Pelosi, 80 ans, présidente de la Chambre des représentants, qui a su tenir tête à Trump. Dommage que la grandissime Ruth Badr Ginsburg ne soit plus là, estimée de tous, juge de la Cour suprême de 1993 à sa mort, le 18 septembre 2020 à 87 ans, juste et libérale, notamment sur l’égalité des sexes et le droit à l’avortement. Malgré son testament, où elle demandait d’attendre l’élection, Trump a nommé à sa place Amy Coney Barrett, 48 ans, hyper-réactionnaire…

Une autre femme de pouvoir: Elizabeth Warren, née en 1949, est une femme politique et universitaire américaine, membre du Parti démocrate, elle siège au Sénat depuis le 3 janvier 2013 pour le Massachusetts. À 16 ans, elle remporte une bourse grâce à ses capacités oratoires pour l’université George-Washington. Ex-professeure à Harvard, où elle est spécialisée en droit du commerce; elle est l’une des personnalités les plus citées dans ce domaine. Sous la présidence de Barack Obama, elle devient assistante à la Maison-Blanche et conseillère spéciale au secrétaire du Trésor des États-Unis pour le Bureau de protection des consommateurs en matière financière. Elle fait partie des «100 personnalités les plus influentes» du Time en 2009, 2010 et 2015. The National Law Journal, en 2010, la nomme parmi les «quarante avocats les plus influents de la décennie».

Après Bernie Sanders et Barack Obama, l’ex-candidate à la présidentielle américaine Elizabeth Warren a déclaré en avril 2020 son soutien à Joe Biden dans la course à la Maison Blanche. Elle va certainement lui demander de prendre des décisions pour davantage de justice, notamment envers les plus démuni.e.s. De même que deux autres femmes: Alexandria Ocasio-Cortez, d’origine latina, née en 1989, devenue en 2018 la plus jeune élue au Congrès. Elle se réclame du socialisme démocratique de Bernie Sanders, qu’elle a soutenu, avant de se ranger derrière Biden. Et Ilhan Omar, née en 1982, élue à la Chambre des représentants en 2018, première femme musulmane, avec Rashida Tlaib. Elles aussi ont soutenu Biden, elles aussi réclameront plus de justice.

Parmi les femmes qui donnent de l’espoir dans ce monde de brutes, citons les prix Nobel de la paix Ellen Johnson Sirleaf, première femme élue au suffrage universel à la tête d’un État africain (Liberia), Malala Yousafzai, la jeune Pakistanaise qui a échappé à une tentative d’assassinat en 2012, âgée de 15 ans, parce qu’elle s’était opposée aux talibans qui voulaient interdire la scolarisation des filles. Prix Nobel de la paix 2014 à l’âge de 17 ans, elle en est la plus jeune lauréate. Sans oublier Esther Duflo, prix Nobel 2019 d’économie. Elle est une pionnière d’expériences de terrain. Sous son impulsion, ce genre de méthode devient courant dans les agences d’aide au développement et à la Banque mondiale. L’hebdomadaire américain The New Yorker la qualifie «d’intellectuelle française de centre gauche qui croit en la redistribution et qui souscrit à la notion optimiste que demain sera peut-être mieux qu’aujourd’hui.»

Mais la meilleure de toutes, la plus grande malgré son jeune âge, c’est Greta Thunberg, née en 2003. Durant l’été 2018, à 15 ans, elle proteste devant le Parlement suédois contre l’inaction face au changement climatique, puis lance la grève scolaire pour le climat. Le mouvement se propage sur toute la planète. En 2019, il y eut plusieurs manifestations multivilles coordonnées, impliquant plus d’un million d’étudiant.e.s chacune. Pour éviter de voler en avion, elle navigue jusqu’en Amérique du Nord, où elle assiste au sommet des Nations Unies sur l’action climatique de 2019. Dans son discours, elle prononce son «How dare you?» («Comment osez-vous?»), devenu célèbre.
Pour moi, elle est à mettre sur le même pied que Gandhi, Martin Luther King ou Nelson Mandela. Trois modèles qui ont transformé