L’incohérence de l’Union des paysans

Il faut le dire • Or, les dispositions prévues au chapitre de l’accord consacré à la durabilité sont en général formulées de manière vague.

Nous allons voter sur l’accord de libre-échange entre la Suisse et l’Indonésie. Il profiterait surtout aux exportateurs suisses. Qui verraient la suppression de droits de douane pour 98% de leurs produits. Or actuellement ceux-ci font face à un marché indonésien très fermé. Pour les produits industriels, par exemple, les droits de douane peuvent s’élever jusqu’à 31% du prix. C’est dire l’aubaine!

Il y a quelques mois encore, la faîtière des paysans expliquait que l’huile de palme bon marché, dont l’Indonésie est le premier producteur mondial, menaçait déjà la production nationale d’huile de colza et de tournesol, alors qu’elle était grevée d’un droit de douane important. Elle rappelait, à juste titre, la votation de 2017, qui a gravé dans la constitution fédérale la notion de sécurité alimentaire. Elle ne cesse de se plaindre de la concurrence de la production agricole étrangère qui envahit le marché. Des poulets chinois à la viande du Brésil ou d’Argentine en passant par le sucre européen.

Cela met, et c’est inquiétant, une pression énorme sur les paysans suisses qui voient leur revenu régulièrement baisser et entraîne la perte d’une entreprise agricole tous les 3 jours depuis des années. Et pourtant, l’Union suisse des paysans s’est alignée sur la droite marchande et propose d’accepter cet accord. Il faut le dire, une partie de la gauche aussi, qui croit avoir arraché des garanties de production «durable» de l’huile de palme.

Or, les dispositions prévues au chapitre de l’accord consacré à la durabilité sont en général formulées de manière vague. Elles «oublient» que le label chargé de vérifier le respect des critères de durabilité est sous le feu des critiques pour sa complaisance avec les grands producteurs d’huile de palme. En plus, l’acceptation de cet accord ouvrirait la voie à un accord similaire avec les pays latino-américains du Mercosur. Ce serait encore plus douloureux pour l’agriculture suisse et augmenterait notre dépendance alimentaire. Et si au moins l’huile de palme était bonne pour la santé!

Heureusement Uniterre l’a bien compris et s’oppose à cet accord. Au-delà des exportations, la faîtière Economiesuisse estime que «les entreprises helvétiques pourraient recourir davantage aux services fournis par les prestataires indonésiens, comme les centres d’appels». On se réjouit déjà d’avoir un appel au mois d’octobre venu d’Indonésie pour nous inciter à changer de caisse maladie ou souscrire une assurance complémentaire… La pandémie ne nous a-t-elle rien appris