L’écologiste «pragmatique» qui veut succéder à Merkel

Allemagne • Alors que la bataille des chefs fait rage chez les chrétiens-démocrates, les Verts intronisent leur coprésidente Annalena Baerbock pour briguer ouvertement la succession d’Angela Merkel.(Par Bruno Odent, Paru dans L’Humanité)

Les Verts allemands ont finalement pris un peu d’avance sur les chrétiens-démocrates dans la désignation de leur tête de liste à l’élection du Bundestag qui se profile en septembre. Annalena Baerbock portera leurs couleurs pour succéder à Angela Merkel à la chancellerie. La jeune femme dirige le parti Alliance 90 les Verts depuis 2018, en duo avec un alter ego masculin, Robert Habeck.

Un choix unanime et quasi acquis

La direction du parti a fait part de son choix lundi matin, dans une ambiance très consensuelle, voire complice, qui jure avec le mélodrame du combat des chefs qui se poursuivait au même moment au sein des formations chrétiennes-démocrates, où Armin Laschet, le patron de la CDU, et Markus Söder, son homologue de la CSU bavaroise, se déchirent.

Le choix unanime de la direction des Verts pour Baerbock serait provisoire avant la tenue d’un congrès du parti à la mi-juin. Mais sa désignation semble d’ores et déjà acquise parmi les adhérents. Au sein du duo dirigeant, Annalena Baerbock n’a pas franchement de différences avec Robert Habeck. Qu’il s’agisse de l’orientation politique du parti, du contenu de sa campagne électorale ou de ses ambitions à conduire les affaires de l’État quand les écologistes enregistrent une poussée d’influence inédite dans le pays. Tous deux appartiennent à la mouvance dite «realo» des «Grünen» et se retrouvent sur une orientation qu’ils qualifient de «pragmatique».

Annalena Baerbock est la première candidate des Verts à revendiquer ouvertement l’entrée d’une écologiste à la chancellerie. Les Verts, crédités d’environ 22% des suffrages dans les enquêtes d’opinion, sont devenus les principaux challengers de la CDU/CSU (réduite à 28% dans les sondages) et sont largement devant les sociaux-démocrates qui restent, pour l’heure, scotchés autour de 15%, alors que die Linke avoisine les 8% et que l’AfD est proche des 11%

Des glissements vers la droite

La candidate verte au poste suprême a appelé à faire preuve de «courage pour construire: le changemen». Pointant «les énormes attentes de la société à l’égard des Vert» elle a relev: « La protection du climat est la tâche de notre temps.» Âgée de 40 ans, mère de deux jeunes enfants, Baerbock a suivi un cursus universitaire mêlant des études en science politique et en droit public international à la London School of Economics (École d’économie de Londres).

Les Verts allemands non seulement n’affichent plus leur proximité avec la gauche, comme à leur début, mais ils ne rechignent pas à des glissements vers la droite. Ils codirigent déjà avec la CDU des Länder, comme le Bade-Wurtemberg, la Hesse ou, le Schleswig-Holstein au sein d’une triple alliance (CDU/Verts/FDP) adossée à la droite libérale. Et ils ne font plus mystère de leur inclination à cogérer le pays, comme «junior partenaire» de la CDU, si le verdict des urnes devait ouvrir une telle option.

Chez les chrétiens-démocrates, toujours en panne de candidat à la chancellerie, le président Armin Laschet a promis lundi 19 avril une décision pour la fin de la semaine. Tout en lançant quelques piques acérées à son concurrent à la candidature suprême. ll a ainsi mis carrément en garde contre une «polarisatio» façon Donald Trump dans une attaque à peine voilée contre le chef de la CSU. Lequel rassemble, il est vrai, au sein d’une mouvance national-libérale, influente parmi les parlementaires de la CDU ou dans l’organisation de jeunesse du parti qui lui a accordé son soutien dimanche. La politique migratoire de la chancelière, voire certaines logiques du plan de relance de l’UE y sont ouvertement contestées.