Une vraie victoire populaire

Il faut le dire • Les voix obtenues par Pedro Castillo sont vraiment celles des classes populaires, des paysans et des populations issues des peuples originaires.

Le ballottage des 2 candidats que tout oppose a bien penché en faveur de celui de gauche Pedro Castillo face à la candidate de la droite unie Keiko Fujimori. C’était déjà une surprise que Pedro Castillo soit arrivé largement en tête au premier tour avec presque 19% des voix, alors que Keiko Fujimori n’en obtenait que 13%. Cette dernière est la fille d’un ancien président multimillionnaire détenu depuis 2009 pour de graves violations des droits humains et des actes de corruption. Elle est elle-même accusée de détournements de fonds et de trafic d’influence. C’est d’ailleurs frappant combien toute la droite s’est rangée derrière cette candidate, malgré ses casseroles judiciaires. La campagne électorale pour ce 2e tour qui s’est achevée dimanche passé a été dure, avec une diabolisation systématique de Pedro Castillo entretenue par les grands médias locaux, agitant le spectre du communisme. Et rappelant les pires moments de la guerre froide des années 50. Cela a attisé la polarisation extrême entre les 2 projets de gouvernementaux antipodes.

Et les résultats très serrés montrent bien qu’une partie significative de la petite bourgeoisie citadine s’est rangée du côté des élites qui ont pourtant «mal gouverné» depuis 2 générations (et dont plusieurs présidents sont poursuivis et souvent condamnés pour corruption) plutôt que de suivre les propositions de changements du candidat de gauche. Les voix obtenues par Pedro Castillo sont vraiment celles des classes populaires, des paysans et des populations issues des peuples originaires. C’est bien de là qu’il tirera sa légitimité pour faire les changements politico-sociaux qu’il a promis. Mais face à la droite et un parlement où il n’a pas de majorité claire, il devra compter sur les mouvements sociaux pour les imposer. Castillo en aura déjà besoin pour défendre sa victoire face à une droite bien décidée à ne pas céder le pouvoir. Il le sait, d’ailleurs lui l’ancien « maître d’école rurale» et responsable du syndicat des enseignants. C’est sa base sociale naturelle.

De toute façon, le Pérou, va continuer à être difficilement gouvernable, et les défis sont immenses. Mais c’est une victoire inespérée qui montre le degré de rejet de la classe politique traditionnelle. C’est aussi un souffle nouveau au plan international et renforcera la position de la Bolivie, de l’Argentine, du Venezuela, du Nicaragua et du Mexique dans cette Amérique Latine qui souffre grandement de la pandémie avec la crise économique et sociale qui en découle.

Hasta la victoria siempre.