Solidarité avec le peuple kurde

Mobilisation • Une délégation de 70 militant.es internationaux. Dont l’ancien marie de Genève, Rémy Pagani, devait documenter les ingérences de l’armée turque dans le Kurdistan irakien. Tous ont été surveillés et certains refoulés vers l’Europe. (Par Tobia Schnebli, représentant du Parti du Travail dans la «Délégation pour la paix et la liberté»)

La délégation refoulée par le Gouvernement régional du Kurdistan irakien a été reçue sous les applaudissements à Francfort le 13 juin. (TSi)

Entre le 7 et le 12 juin, répondant à un appel du Congrès National du Kurdistan (KNK), une plateforme d’organisations indépendantistes kurdes de plusieurs pays, environ 150 personnes, militant.es et élu.es d’organisations, partis politiques et syndicats, activistes pour les droits humains et journalistes de différents pays européens ont voulu se rendre à Erbil, capitale de la région autonome du Kurdiatan irakien. Environ 70 délégués internationaux, parmi lesquels le sénateur français Pierre Laurent (PCF), Rémy Pagani, député au Grand Conseil genevois et encore Maja Hess, membre d’une ONG de Zurich, ont réussi à passer les obstacles dressés sur le chemin pour empêcher la tenue de cette délégation internationale. Le samedi 12 juin, probablement sous prétexte d’une prétendue participation à des activités d’organisations proches du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), la police fédérale allemande a empêché 27 participants venant d’Allemagne et de Suisse de partir depuis Düsseldorf, avec le même avion que le soussigné.

Avec d’autres délégué.es internationaux, dont 8 venant de Suisse, j’ai réussi à monter dans l’avion à destination d’Erbil. Nouveau coup de filet à l’arrivée, dans la queue pour le contrôle des passeports, la police du Gouvernement régional du Kurdistan (GRK) a sorti une quinzaine de participant.es, en laissant passer d’autres. Les dizaines de personnes refoulées ont été renvoyées par groupes à différentes destinations en Europe. Avec 10 autres délégue.es Suisses.ses, Allemande, Slovènes, j’ai été renvoyé sur Francfort après une nuit en détention à l’aéroport. Un accueil très touchant d’environ 150 manifestant.es kurdes avec banderoles, drapeaux, chants et slogans. Au premier rang, un groupe de femmes plus âgées avec leurs costumes traditionnels et une grande banderole, «Halte à l’invasion turque au Kurdistan du Sud».

Attaques turques depuis le 23 avril

En effet, l’objectif de la délégation internationale était de visiter et récolter des témoignages dans les villages et les camps de réfugiés situés au Nord du Kurdistan irakien, dans une zone proche de la frontière avec la Turquie. La région est soumise à de lourdes attaques de l’armée turque depuis le 23 avril de cette année. Commentant un bombardement par un drone turc qui a tué trois civils et fait de nombreux blessés le 5 juin dans le camp de réfugiés de Makhmur, le président Erdogan avait déclaré que ce camp de réfugiés est «un incubateur de terroristes». Le camp, géré par l’UNHCR abrite 13’000 Kurdes qui avaient fui le Kurdistan turc pendant la guerre sanglante menée par l’armée turque au Kurdistan turc au milieu des années nonante.

Visiblement le GRK ne souhaite pas de témoins de la sale guerre menée par l’armée turque contre les Kurdes sur le territoire irakien contrôlé par le parti kurde PDK de Netchirvan Barzani. Les délégué.es qui avaient réussi à sortir de l’aéroport ont ensuite été bloqués dans un hôtel d’Erbil jusqu’à mardi, quand la quarantaine de délégué.es restants a pu se rendre dans la capitale de la partie méridionale du Kurdistan irakien, Sulaymaniya, bien éloignée de la région sous attaque turque et sous contrôle de l’autre parti nationaliste kurde d’Irak, l’UPK de Jalal Talabani.

Il faudra trouver des moyens de développer la solidarité politique européenne avec les luttes de résistance de toutes les composantes du peuple kurde, dont le droit à l’autodétermination est systématiquement et historiquement nié à la fois par les quatre Etats dans lesquels il vit (Turquie, Irak, Iran, Syrie) et par les grandes puissances, en premier lieu occidentales, trop intéressés à ménager leurs intérêts dans la région. Environ 8% de tout le pétrole irakien est extrait de la région kurde sous le contrôle du PDK. Il est exploité en bonne partie par des compagnies internationales et exporté vers la Turquie. La Turquie en pleine phase d’expansion sur les territoires anciennement ottomans, est financée par l’Europe pour faire barrage à l’afflux en Europe de réfugiés du Moyen-Orient et d’Afrique. Dans le même temps, elle «produit» des centaines de milliers de réfugiés qui fuient les guerres qu’elle mène contre le peuple Kurde en Turquie, en Syrie et maintenant aussi en Irak. Les USA, l’Europe, la Suisse et Israël livrent depuis longtemps à la Turquie, membre de l’OTAN, les avions, les tanks, les canons, les munitions et les drones qui servent à mener les guerres turques.

Ces conflits menés par la Turquie contre les Kurdes font partie des guerres conduites, souvent indirectement, par les pays riches occidentaux contre les populations les plus pauvres de la planète se trouvant aux frontières des Forteresses européennes et étasuniennes, en d’autres termes aux marches des empires néocoloniaux occidentaux.
La Solidarité internationale et anticoloniale est plus nécessaire que jamais!

Manifestation de solidarité avec la résistance du Peuple palestinien à Lausanne le samedi 19 juin, 15h place Riponne