Droit au mariage enfin étendu

Votations • Le 26 septembre, le peuple suisse se prononce sur le Mariage pour tous concernant les couples de même sexe. Députée vaudoise du POP et vivant en partenariat enregistré, Céline Misiégo nous explique les enjeux de la votation.

En quoi ce scrutin est-il important pour les couples homosexuels?
Céline Misiégo Le mariage pour tous va permettre de leur donner les mêmes droits – naturalisation facilitée, adoption conjointe, procréation médicalement assistée – que les couples hétérosexuels connaissent déjà. Le mariage pour tous ne changera rien pour ces derniers, mais permettra d’accorder la pleine égalité aux autres.

Quel est le point le plus important de cette loi?

Céline Misiégo Elle permettra aux couples en partenariat enregistré de ne plus devoir être obligés de faire leur coming out, chaque fois qu’ils remplissent un dossier administratif, en devant indiquer leur statut de couple. Nous n’aurons ainsi plus à dévoiler systématiquement et publiquement notre orientation sexuelle.

Les opposants dénoncent «la réduction de l’enfant à un produit de consommation», critiquant l’accès facilité au don de sperme pour les couples lesbiens. Qu’en pensez-vous?

Il ne faut pas se leurrer, les opposants à la nouvelle loi sont avant tout contre l’homosexualité. Le don de sperme est autorisé pour les couples hétérosexuels depuis 2001, pourquoi serait-il interdit aux couples homosexuels? Il ne faut pas nous la faire. En ce qui concerne l’éducation des enfants, les études scientifiques sont unanimes: les couples de même sexe sont d’aussi bons parents que les couples hétérosexuels, qui proposent encore trop souvent une éducation très genrée à leurs enfants. Ceux-ci ont avant tout besoin de personnes de référence stables et aimantes, indépendamment de leur genre ou de leur orientation sexuelle et affective.

La nouvelle loi va-t-elle ouvrir les portes à la gestation pour autrui (GPA) pour les couples homosexuels comme le prétendent les référendaires?

La GPA est interdite pour tout le monde en Suisse, tant pour les couples homme/femme que pour ceux de même sexe. Si le débat devait s’ouvrir, il concernerait donc aussi les couples hétérosexuels, mais un tel projet n’est pas sur la table, ni en discussion en Suisse.

Les référendaires disent que le terme de «père» sera barré du Code civil et remplacé par celui d’«autre parent», en matière de filiation. Votre réaction?

Je ne vois pas vraiment le problème. Un parent reste un parent. Ce changement permettra d’élargir la notion de famille, pour le bien de l’enfant. Dans le cas d’un mariage lesbien, les deux femmes seront reconnues comme les parents de l’enfant dès la naissance. Cette réglementation progressiste place l’intérêt supérieur de l’enfant au centre, car les enfants sont légalement protégés en cas de décès d’un parent.

La plupart des partis, à l’exception de l’UDC ou du Parti évangélique, sont en faveur du mariage pour tous. Qu’est-ce que cela signifie?

Cela montre que l’homosexualité est de mieux en mieux acceptée en Suisse, à l’exception des personnes ouvertement homophobes. Les jeunes montrent aussi leur ouverture d’esprit, et rejettent toujours plus le cadre hétéronormé conventionnel. Les sondages, qui montrent une large acceptation populaire du mariage pour tous, confirment cette évolution de la société suisse. Cela fait plaisir.

La cheffe du Département de l’intérieur, Karin Keller-Sutter, a annoncé que l’administration fédérale travaille sur un rapport concernant le pacte civil de solidarité (Pacs) L’objectif serait de créer pour les couples de tous sexes, un régime ayant des conséquences juridiques moins étendues que le régime matrimonial. Qu’en pensez-vous?

La France connaît déjà un tel statut. Pour les personnes, qui ne veulent pas d’un mariage dans un cadre religieux, cela serait plus simple, notamment en matière de séparation et de succession, même si j’ai encore de la peine à estimer le besoin d’un tel Pacs après l’acceptation du mariage pour tous.