Les rentes se feront attendre

Genève • Un nouveau délai dans le versement des assurances sociales, difficile pour les bénéficiaires les plus précaires, passe mal.

Le cafouillage informatique de l’Office cantonal des assurances sociales va prétériter les seniors genevois. (Pixabay)

La semaine dernière les bénéficiaires de l’Assurance-vieillesse et survivants (AVS) et de l’Assurance-invalidité (AI) recevaient un courrier de l’Office cantonal des assurances sociales (OCAS) les informant du fait que leurs rentes, jusqu’à présent versées au premier jour ouvrable du mois, seraient, à partir de l’année prochaine, mises à disposition au sixième jour. Une décision que fustigent l’Association de défense et de détente de tou.tes les retraité.es et futur.es retraité.es (AVIVO) et le Parti du travail genevois (PdT).

Désapprobation

L’AVIVO proteste contre cette décision et demande à l’OCAS et aux autorités de «revenir à la raison» en annulant le versement au sixième jour ouvrable des rentes et en maintenant le calendrier actuel. «De facto cela signifie le 8, 9, ou 10 selon les mois. Cela pose un énorme problème pour les petits revenus, qui n’ont pas assez de liquidités d’un mois à l’autre pour assurer les paiements mensuels», s’indigne Ueli Leuenberger, vice-président de l’association. Il souligne qu’«il faut bien se rendre compte que pour ces derniers, c’est déjà maintenant une ‘‘jonglerie’’ permanente de nouer les deux bouts».

Il rappelle également que les loyers doivent en principe être payés au plus tard le dix de chaque mois et que certaines personnes ayant un arrangement avec leur régie pour un arriéré de loyer sont soumises à des règles beaucoup plus strictes. La date limite de leurs paiements étant souvent avancée au cinq du mois. Un problème pourrait aussi se poser en ce qui concerne l’administration cantonale des impôts qui exige que les règlements soient réalisés, là aussi, au plus tard le 10 du mois. En conséquence, l’AVIVO exprime son incompréhension et sa désapprobation totale à l’égard des mesures de l’OCAS et interpelle les autorités, particulièrement le Conseil d’Etat, pour qu’elles les annulent.

Retour en arrière partiel

Vendredi dernier, l’OCAS revenait sur sa décision et annonçait que les rentes seraient finalement versées au 4e jour ouvrable. L’Office justifiait ses mesures dans La Tribune de Genève par la bascule vers un nouveau système informatique ayant nécessité la modification de ses dates de versement. «Nous sommes conscients que ce changement a un impact sur nos bénéficiaires, c’est pourquoi le calendrier des paiements a été revu. Les rentes seront donc versées le 4e jour ouvrable du mois», expliquait l’OCAS, selon qui le changement de ses outils informatiques serait «indispensable».

Malgré ce rétropédalage partiel, le PdT s’indigne de la mesure consistant en un retardement du versement des rentes AVS et AI. «Il s’agit tout simplement d’un cas flagrant et grave d’une violence sociale inouïe contre des personnes souvent très précaires, qui doivent compter chaque franc, qui n’ont pratiquement pas de liquidités à la fin du mois, et qui doivent pourtant – sous peine de poursuites – effectuer des paiements lourds et incontournables au tout début du mois au plus tard», explique le Président du parti genevois, Alexander Eniline, qui considère la façon de procéder au moins aussi scandaleuse que le fond.

«Les bénéficiaires ont été informés de cette décision par simple circulaire administrative, avec pour seule explication… que légalement l’OCAS pourrait effectuer le versement encore plus tard. C’est une marque de mépris inacceptable, une façon profondément indigne de traiter les bénéficiaires, qui ont le droit de toucher les prestations qui leur sont versées», lance-t-il. Pour le Président du PdT, la justification par un changement de système informatique qui ne permettrait plus de verser les rentes au premier jour ouvrable est inepte. «Quelle serait cette prétendue ‘‘modernisation’’ qui rendrait subitement incapable l’OCAS d’assurer une prestation qu’il a toujours pu assurer jusque-là?», interroge-t-il. Contactée à propos des tenants et aboutissants de ces modifications de l’outillage informatique, l’OCAS n’a pour l’heure pas répondu à nos questions.

L’argent du personnel

Quelles que soient les motivations ayant conduit à ce nouveau délai dans le versement des rentes, le Président du PdT tient à rappeler que toute richesse vient du travail des travailleuses et des travailleurs.
«Les rentes AVS sont un droit, gagné par des années de travail et de cotisation. De même que les rentes AI, issues des cotisations prélevées sur le travail et d’une volonté de solidarité indispensable. Ce n’est pas un cadeau soumis à la discrétion de quelque technocrate. Ces rentes doivent être payées le premier jour ouvrable du mois! Aucune solution ‘‘intermédiaire’’! Aucune excuse!», conclut Alexander Eniline.