Zemmour, persona non grata à Genève

Genève • La venue prévue, les 24 et 25 novembre, d’Eric Zemmour, polémiste cathodique surmédiatisé et précandidat à l’élection présidentielle française suscite une forte opposition à Genève.

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Cela a commencé par une pétition en ligne, lancée par Karim Bakhti, membre d’une association d’aide aux migrants contre la venue d’Eric Zemmour à Genève. Avec 2000 signatures au compteur, elle demande que «l’Etat et la Ville de Genève prennent leurs responsabilités et agissent selon les mêmes règles qui ont été appliquées pour la venue d’autres personnalités jugées polémiques, tels que Kémi Séba (adepte du suprémacisme noir, ndlr) ou encore Dieudonné M’Bala M’Bala, qui ont tous deux été interdits de salle par le passé». Elle en appelle à l’interdiction de la tenue de toute conférence du polémiste français, adepte de la théorie d’extrême droite du «Grand remplacement» sur le territoire genevois. Pour mémoire, cette théorie estime qu’un processus de substitution de la population française et européenne par une population non européenne est à l’œuvre.

Lettre ouverte

Redoublant cette pétition, une lettre ouverte a été adressée aux autorités par le député socialiste, Emmanuel Deonna, et cosignée par une soixantaine de personnalités politiques dont le conseiller national du même parti, Christian Dandrès ou Jean Ziegler. Elle dénonce les prises de position racistes, sexistes, anti-musulmanes, antisémites ou homophobes, du journaliste. «Cette personne a été condamnée à de nombreuses reprises par l’opinion publique européenne, et par les tribunaux français, pour provocation à la discrimination raciale et incitation à la haine religieuse. Eric Zemmour distille depuis longtemps et sans vergogne sur les plateaux de télévision et dans les autres médias des propos dont certains vont à l’encontre de l’art. 261 bis du Code pénal suisse», relève la missive, qui se félicite que la Ville ait refusé la tenue d’un débat entre lui et l’avocat Marc Bonnant au restaurant des Eaux-Vives. La lettre demande que le Canton ne contribue pas à l’accueil du personnage sur leur territoire genevois.

Du côté des milieux antifascistes comme Action Antifasciste Genève ou du Collectif 8 Mars pour un féminisme révolutionnaire ou de la mouvance alternative comme le Silure, soutenus par les syndicats ou partis comme celui du Travail, on a décidé de se passer du soutien de la Ville ou du Canton. Et on tentera d’empêcher la venue d’Eric Zemmour, à l’occasion d’une manifestation le 24 novembre en soirée. «Ce personnage est devenu la figure et le porte-parole des idées d’extrême droite en France; de plateaux télé en plateaux télé. Il prône une société dirigée par des hommes, blancs, «bons français», et dont les personnes étrangères, racisées sont exclues», précise le mouvement sur le site renverse.co.

«Il est nécessaire que les forces qui veulent s’opposer aux idées que Zemmour et son monde véhiculent, et à la menace qu’ils représentent, se réunissent pour empêcher sa venue. Il faut faire la démonstration, dans la rue, massivement, du fait que ces idées – celles que prônent Zemmour et le multimillionnaire Bonnant – n’ont pas droit de cité. C’est une mobilisation indispensable aujourd’hui pour éviter de devoir, à plus ou moins long terme, faire face aux fruits amers de la banalisation du fascisme et du racisme», martèle le mouvement, tout en affûtant ses tags vengeurs dans la rue.