La pauvreté est liée au marché de l’emploi

spécial 1er Mai • Interview de Pascale Gazareth, sociologue spécialisée dans les thèmes d'exclusion sociale et conseillère générale popiste de La Chaux-de-Fonds.

Interview de Pascale Gazareth, sociologue spécialisée dans les thèmes d’exclusion sociale et conseillère générale popiste de La Chaux-de-Fonds.

L’Union européenne fait de 2010 une année de la lutte contre la pauvreté. Caritas veut réduire la pauvreté en Suisse de moitié d’ici 2020. Comment lutter contre ce fléau ?
Pascale Gazareth Il faut d’abord comprendre que la pauvreté est multiforme. On peut la considérer d’un point de vue absolu, calculée en minima vitaux. Elle peut aussi être relative, en relation avec les standards de vie moyens, et traduisant alors une forme d’exclusion sociale. Une allocation universelle permettrait de lutter contre la pauvreté absolue, mais elle serait insuffisante pour permettre une pleine intégration sociale. Ce qui est clair, c’est qu’en Suisse, la pauvreté est fortement corrélée au marché de l’emploi, du fait que la plupart des citoyens tirent leurs revenus de leur salaire ou de prestations des assurances sociales qui découlent des cotisations des travailleurs. Il convient donc de renforcer les mesures sur le marché de l’emploi, en instaurant par exemple une rémunération suffisante ou un salaire minimum. La redistribution des richesses, par l’impôt et par des augmentations de salaires, est aussi fondamentale. Pour le reste, il faut défendre l’Etat social, en s’opposant au démantèlement de notre protection sociale. Aujourd’hui, les trous dans les assurances sociales poussent trop de personnes directement vers l’aide sociale. Pour finir, il convient aussi de changer notre regard sur la pauvreté. En Suisse, société riche, on a honte d’être pauvre. Ce qui ajoute des difficultés psychiques au problème strictement monétaire.

L’augmentation du chômage dans le canton de Neuchâtel et à La Chaux-de-Fonds a impliqué une croissance de la pauvreté. Quelles sont les mesures qu’a prises la Ville ?
L’automne passé, la crise dans l’horlogerie a fait monter le taux de chômage officiel à 10%, le double en comptant le chômage partiel. Dans le même temps, on a constaté l’ouverture de nombreux dossiers supplémentaires à l’aide sociale, liés à des pertes d’emplois ou des indemnités de chômage trop basses. Alors que le Canton n’a pas pris de mesures particulières, la Ville a maintenu l’allocation communale spécifique pour lutter contre les effets de seuil, une revendication portée par le POP. La ville a aussi mis 4 millions pour relancer une politique de rénovations et de travaux, pour que la crise ne s’étende pas au secteur du bâtiment. Ce crédit a aussi permis de financer des stages dans l’administration communale pour les jeunes qui finissaient leur apprentissage.